Né le 16 décembre 1911 à Niguarda (Milan, Italie) ; ouvrier plombier ; un des principaux dirigeants des FTP-MOI de la région parisienne, abattu à l’occasion d’un affrontement avec une patrouille allemande en avril 1944 lors de l’accomplissement d’une mission en banlieue parisienne avec une équipe de combattants, tous abattus avec lui.

Alfredo Terragni
Alfredo Terragni
Alfredo Terragni était né dans une famille ouvrière, lui-même devenant plus tard ouvrier spécialisé dans la plomberie. Son parcours (la chronologie aidant : trop jeune pour avoir connu en adulte la montée du fascisme, mais pas assez pour que son initiation politique se fasse à l’occasion des combats contre l’occupant nazi) fut relativement atypique par rapport à celui de la plupart des résistants issus de l’immigration italienne. À la rigueur on peut se demander si le terme même d’immigré est pertinent dans son cas. La préfecture de Milan n’établit sa fiche de signalement (cheveux châtains ; yeux châtains ; teint blanc-roux) qu’en août 1937, suite à son émigration clandestine vers la France advenue le 26 juillet de la même année. Jusque-là sa conduite n’avait pas donné lieu à des remarques particulières de la part des organes policiers du régime : « …travailleur acharné, il vit des revenus de son travail. Il jouit d’une bonne réputation. Son comportement à l’égard de sa famille est irréprochable […]Il se réclame du communisme, mais il n’a jamais appartenu à aucun parti […]Il n’a participé à aucune manifestation politique […] Son casier judiciaire est vierge. » Et si le 7 septembre 1936 il fut déféré au Tribunal spécial pour la défense de l’État sous l’inculpation d’appartenance à association subversive ce fut pour être blanchi aussitôt par le Président du Tribunal lui-même dans une lettre daté du mois de novembre 1936 : « la position de Terragni a fait l’objet d’une nouvelle appréciation à la lumière du rapport des Autorités militaires faisant état du comportement méritoire du même Terragni à l’occasion des opérations militaires en Afrique Orientale Italienne (alias la guerre d’Éthiopie) : le mandat d’arrêt est révoqué et il sera mis fin à toute poursuite ultérieure.
La surprise de autorités sera d’autant plus grande de constater qu’à peine quelques semaines après avoir pris congé de son uniforme vert de gris, en juin 1937, il annonça à sa mère, dans une lettre postée à Paris, qu’il s’était rendu en France dans le but précis de s’engager « dans les milices rouges espagnoles ».Nous ne savons pas grand’chose de son évolution dans les Brigades internationales, sauf qu’il y resta jusqu’aux tous derniers jours de la république même après la chute de Barcelone, qu’il fut blessé deux fois en juin (sur le front de Huesca) et en août 1937 : les fonds documentaires soviétiques tout comme les papiers de la police italienne n’en disent pas plus. Il ne semble pas y avoir exercé de fonctions de commandement. Quoi qu’il en soit, après la débâcle des républicains, Alfredo Terragni connut, comme tant d’autres, le camp d’internement de Gurs, dans les Basses-Pyrénées (Pyrenées-Atlantiques). .
Enrôlé dans les compagnies de travailleurs étrangers pour le travail obligatoire, il réussit à s’échapper en 1941. Il entra alors en contact avec les milieux de l’immigration italienne déjà engagés dans le combat contre l’occupant. C’est en février 1943 qu’il s’engagea dans les FTP-MOI : mettant à profit sa précieuse compétence militaire acquise d’abord en Afrique et consolidée sur les champs de bataille de la péninsule ibérique, « Le-rouge » (à cause sans doute de son teint), ou encore « Banfi », mieux connu parmi les combattants FTP-MOI comme « Secondo », Terragni devint ensuite, quand les chiffres seront préférés aux pseudonymes trop facilement repérables, la matricule 10263. Il fut responsable militaire du troisième détachement (composé dans sa majorité d’Italiens) pour être successivement propulsé, d’abord, août 1943, responsable technique dans le triangle de direction des FTP-MOI parisiens puis, après la grande chute de novembre 1943, responsable politique des FTP-MOI de la zone Nord. Boris Holban après avoir rendu hommage à ses qualités en tant que chef du troisième détachement (vigilance, étude détaillée des objectifs, organisation minutieuse du repli) décrit ainsi l’issue tragique de cet itinéraire de combattant : « … grâce à sa vigilance, il fut le seul membre du triangle de direction à échapper à la grande chute de novembre 1943. Dès mon retour à Paris, en décembre 1943, il collabora étroitement avec moi pour régler l’affaire Davidovitch et pour la reconstitution des unités. Il est mort de manière imprévue et tragique en avril 1944. Il se déplaçait en vélo sur la ceinture parisienne avec une équipe de combattants pour accomplir une mission. Interpellés par une patrouille allemande qui leur demandait leurs papiers, ils sortirent leurs revolvers et immobilisèrent la patrouille. Terrible hasard : une voiture allemande passait au même moment. Une fusillade s’engagea. Malgré des pertes infligées aux Allemands, Secondo et tous ses camarades succombèrent sous le nombre. Ils furent abattus jusqu’au dernier. »
Sources

SOURCES : Archivio centrale dello Stato, Roma, Casellario politico centrale(CPC), busta 5072 ; Russie, RGASPI,545.6.50, Biografie di compagni della brigata Garibaldi (Fornite dal compagno Trippa). — Pia Carena Leonetti, Les Italiens du maquis, Paris, Del Duca, Éditions mondiales, 1968. — Stéphane Courtois, Denis Peschanski, Adam Rayski, Le sang de l’étranger, Paris, Fayard, 1989. — Boris Holban, Testament, Après 45 ans de silence, le chef militaire des FTP-MOI de Paris parle, Paris, Calman-Lévy, 1989. — Stefano Schiapparelli (Willy), Ricordi di un fuoruscito, Pref. di Giorgio Amendola, Milano, Edizioni del Calendario, 1971. — DVD, La Résistance en Île de France, AERI, 2004.

Iconographie
PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo. GB 189.

Antonio Bechelloni

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