Le 15 juillet 1944 des troupes allemandes procédèrent à l’exécution de 23 personnes au camp militaire de Bourg-Lastic (Puy-de-Dôme), principalement des résistants arrêtés et faits prisonniers les jours précédents ainsi que quelques otages civils exécutés en représailles. Le 1er août 1944, une unité de la brigade Jesser qui se repliait vers Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) exécuta sommairement au même endroit 6 résistants faits prisonniers en Corrèze.

Au début du mois de juillet 1944, devant la montée en puissance des maquis qui harcelaient les troupes allemandes, l’État-major allemand basé à Clermont-Ferrand entreprit de maintenir à tout prix la sécurité des axes de communication vers le sud et le sud-ouest. La brigade mobile de répression du général Kurt von Jesser composée d’éléments disparates de la Wehrmacht, des SS et de divers services de police avait été chargée de réprimer et d’anéantir les maquis de la région, d’abord dans le secteur du Mont-Mouchet, puis dans le Cantal, où les combats durèrent jusqu’au 8 juillet. Le 7 juillet 1944, un convoi de la Wehrmacht du 95ème Régiment de Sécurité (95e Sicherungs-Regiment) circulait sur la nationale 89, en provenance de Clermont-Ferrand, pour soutenir et ravitailler la garnison d’Ussel (Corrèze), une garnison de 180 hommes appartenant au 3ème bataillon du régiment (PC à Tulle), menacée d’encerclement par les maquis corréziens. Le convoi composé de deux camions de troupes et d’une automitrailleuse fut attaqué vers 14 heures dans les gorges du Chavanon (à la limite de la Corrèze et du Puy de Dôme) par la demi-brigade AS de Haute-Corrèze et la 3ème compagnie de la zone 3 des FFI d’Auvergne. L’unité allemande fut pratiquement anéantie (23 morts dont le lieutenant Willy Hahn, commandant de la compagnie en garnison à Tulle). La gravité de la menace sur les axes stratégiques Clermont-Ferrand – Limoges et Clermont-Ferrand – Tulle amenèrent alors l’État-major allemand à diriger la brigade Jesser vers le Limousin et l’est du département du Puy-de-Dôme. L’une des colonnes (colonne rapide du commandant Coqui, régiment de sécurité motorisé n°1000), arriva sur zone dès le 9 juillet dans la journée et commença aussitôt des opérations de ratissage dans le secteur de Bourg-Lastic (Puy-de-Dôme), Eygurande (Corrèze) et La Courtine (Creuse).
Le dimanche 9 juillet, vers 19h. en pleine fête patronale une forte unité allemande occupa Bourg-Lastic. Un civil arrêté le jour même aux gorges du Chavanon, Azdendorphe Chalus fut abattu pour faire un exemple sur la place du village devant sa famille et la population présente.
Tous les hommes furent rassemblés le soir même à la mairie, et un grand nombre gardé en otages. Un détachement du SIPO-SD venu de Clermont-Ferrand procéda les jours suivants à des recherches, perquisitions et interrogatoires à Bourg-Lastic et dans les villages voisins à la recherche des maquisards responsables de l’attaque des gorges du Chavanon et dont un certain nombre se trouvait au camp de Saint-Genès-Champespe (AS de Messeix et de Bourg-Lastic).
Un rapport adressé par l’adjoint au maire de Bourg-Lastic au préfet de la région Auvergne (brochure ONAC op. cit.), précise remarquablement la suite des évènements : « J’ai l’honneur de vous faire connaître qu’à la suite d’une attaque contre un convoi allemand sur la route nationale 89, le 7 juillet sur le territoire du département de la Corrèze, à environ 5 km. du Bourg-Lastic, notre commune a été occupée le dimanche 9 juillet par les troupes d’opération allemandes. Pendant cette occupation, dès 21h, des otages, au nombre de 43 ou 44 ont été enfermés à la mairie.
Le lundi, les Allemands ont continué à opérer des arrestations et se sont livrés à des enquêtes pour tâcher d’établir la participation d’éléments réfractaires à l’attaque de leur convoi. Pendant toute la semaine, ils ont mené leurs enquêtes tant à Bourg-Lastic qu’à Messeix où ils se sont rendus dans la soirée du 12 juillet. Leurs opérations se sont terminées le vendredi 14 par la déportation d’un certain nombre d’otages, environ 25 ou 26, y compris deux femmes, et le samedi, par la fusillade de 23 hommes, 12 de Bourg-Lastic, un 13ème avait été fusillé le dimanche soir dans la rue, 6 de Messeix, un d’Herment et 4 non identifiés. Parmi eux, M. Chassagny maire de Bourg-Lastic. La fusillade a eu lieu au milieu du champ de tir au camp de Bourg-Lastic sur le territoire de cette commune. La sentence nous a été signifiée après l’exécution, sur la place publique samedi soir vers 14 h, devant le monument aux morts.
Le Maire étant mort, on m’a demandé de faire assurer les corvées habituelles au service des troupes. J’ai alors pris l’initiative de demander aux autorités allemandes l’autorisation d’enlever les corps du lieu d’exécution et de les rendre à leurs familles, tant pour ceux de Bourg-Lastic que pour ceux de Messeix. Cette autorisation ayant été accordée, nous avons procédé à la relève des cadavres le dimanche matin vers 9 h. les hommes de Messeix ont été enlevés par les soins des Houillères. Il m’a été signifié de les enterrer sans aucune cérémonie, sans cortège, et sans aucune manifestation en vue de les honorer et ce sous ma responsabilité. »
Parmi les 23 victimes (autant que de soldats allemands tués le 7 juillet lors de l’embuscade, ce qui souligne bien la volonté de représailles) presque tous des résistants du secteur, le maire-adjoint mentionne dans son rapport 4 inconnus. Trois furent rapidement identifiés : il s’agissait de trois résistants FTPF creusois, Charles Couturier et Émile Nivet d’Aubusson et Roger Fourneaux du Puy-Malsignat, faits prisonniers dans une embuscade dressée par une unité de la colonne Jesser le 14 juillet à Clairavaux (Creuse), à quelques kilomètres du département du Puy-de-Dôme et qui ont donc été joints aux personnes arrêtées sur place sans doute pour faire le nombre précis de 23. D’autant plus que deux autres maquisards creusois ne furent pas fusillés mais furent eux, joints aux 24 prisonniers (dont deux femmes) qui partirent le soir du 14 juillet pour Clermont-Ferrand, avant d’être déportés vers le Struthof puis vers l’Allemagne. Une seule victime reste donc à ce jour non identifiée.
Liste des victimes :
CHALUS Azdendorphe le 9 juillet.
BASTE Jacques
BEAULATON Louis
BRUT René,
CHASSAGNY Pierre
COUTURIER Charles
DORION Noël
DULAC Henri
DURANTON Georges
FAURE Antonin
FOURNEAUX Roger
GIRAUD Lucien
MACKOWIAK Étienne
MAGNOL Jean
MARCHE François
MARCHE Michel
MARCHE Pierre
MICHARD René
MONFIL Augustin
NIVET Émile
PIEDPREMIER Maurice
RIOCOURT Jean
VIDAL José
INCONNU Bourg-Lastic
2. Fin juillet 1944, la brigade Jesser, une formation militaire allemande de répression des maquis, composée d’éléments disparates de la Wehrmacht, des SS et de divers services de police (SIPO-SD, Feldgendarmerie) qui venait d’intervenir en Creuse et en Haute-Vienne dans la deuxième quinzaine de juillet 1944, revint en Corrèze, autour d’Ussel où était installé le poste de commandement de la brigade. Le groupement sud de la brigade poursuivit dans cette zone ses activités de répression, au sud et l’ouest d’Ussel, entre Meymac et Neuvic, entre le 27 et le 31 juillet procédant à des exécutions et des arrestations (dont Georges Moneger arrêté le 31 juillet à Neuvic). Le 1er août 1944 face à la multiplication des activités de la résistance et à la désertion d’un groupe important de Tatars de la Volga intégrés dans l’Ost-Legion, la brigade Jesser se replia vers Clermont-Ferrand. Le convoi fut une nouvelle fois attaqué par la Résistance (comme le 7 juillet précédent) dans les gorges du Chavanon (à la limite de la Corrèze et du Puy de Dôme). Le soir même (en représailles ?) à proximité du camp militaire de Bourg-Lastic où elle cantonnait pour la nuit, la légion Azerbaïdjanaise (un bataillon de l’Aserbajdzansche Legion appartenait également à l’Ost-Legion, élément constitutif de la brigade Jesser) exécuta sommairement 6 résistants,dans une sapinière sur la route de Messeix, à peu de distance de la route nationale 89 qui reliait Tulle à Clermont-Ferrand.
Liste des victimes :
GERSTENZANG Zysja
KOHN Icek
LAKUSSE Joseph
MONEGER Georges
ROH Antoine
WAWILEICZINKO Vladimir
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Puy-de-Dôme (901 W 175) — ONAC La Résistance dans le Puy-de-Dôme — Marc Parrotin Le temps du Maquis, Histoire de la Résistance en Creuse Ed. Verso 1984 et Mémorial de la Résistance creusoise Ed. Verso 2000 — Laveissière (Cantal), la brigade JesserJournal La Montagne — site Wikipedia Brigade Jesser — Mémorial genweb.

Michel Thébault

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