Né le 30 mai 1925 à Donnement (Aube), fusillé le 30 avril 1944 à la prison de la Santé à Paris (XIVe arr.) ; ouvrier fromager ; résistant FTPF.

Fils de Georges, cultivateur, et de Georgette, née Paillard, Gaëtan Senlis habitait à Villemorien (Aube), où il exerçait la profession d’ouvrier fromager.
À la fin de l’automne 1943, sous la direction du chef de compagnie FTP Robert Massé, cinq groupes de combattants furent formés. Gaëtan Senlis, chef du groupe Patrie, participa à des sabotages dans la région auboise, à des actions de représailles contre des collaborateurs et à des destructions de sacs de céréales destinés aux réquisitions allemandes.
Du 21 octobre 1943 au 24 février 1944, trente-trois hommes menèrent dans l’Aube et dans l’Yonne cent huit actions, dont vingt et une pour se procurer du ravitaillement, dix cambriolages de mairies probablement pour récupérer des tickets d’alimentation et dix-huit cambriolages de bureaux de tabac. Deux tentatives de meurtres échouèrent, mais dix-huit assassinats suscitèrent beaucoup d’émoi dans la population, si bien que les actions furent assimilées à celles de la « bande à Robert » (Robert Massé). Ce dernier fut arrêté le 25 février 1944 lors d’une opération conduite par la police française et les Groupes mobiles de réserve (GMR). Il y eut dix-huit interpellations, dont celle de Gaëtan Senlis. Les interrogatoires furent d’une grande violence. Tous les interpellés furent transférés de Reims (Marne) à la prison de la Santé à Paris.
Vingt-neuf accusés comparurent le 30 avril 1944 devant une cour martiale composée du directeur du service pénitentiaire et de deux assesseurs, qui siégea dans la prison de la Santé. Le tribunal se déclara incompétent pour vingt d’entre eux. Neuf jeunes d’un maquis de l’Aube et de l’Yonne, âgés de dix-neuf à vingt-trois ans et originaires de l’Aube, de la Marne et de Suresnes, furent accusés d’actions de résistance armée, de destruction de récoltes et de vols. Gaëtan Senlis, Casimir Malak, Albert Finance, Bernard Bosmayer, Guy Hénault, Alfred Godefroy, Claude Courvoisier, André Ott et Robert Massé furent condamnés à mort, et passés immédiatement par les armes par des miliciens dans un chemin de ronde de la prison à 6 h 40 du matin.
Une note des Renseignements généraux donna quelques échos des exécutions. Certains condamnés crièrent « Vive de Gaulle ! », « C’est malheureux d’être fusillés par des Français », « Je voudrais mourir avec un drapeau bleu, blanc, rouge portant la croix de Lorraine ». Sur le chemin qui menait au lieu de la fusillade, ils chantèrent « La Marseillaise ». Après l’exécution, des détenus qui assistèrent de leur cellule à la fusillade ou qui entendirent le bruit des balles chantèrent « L’Internationale » et scandèrent « Assassins ! » à l’adresse des bourreaux.
Le dimanche 28 avril 1946, il y eut une cérémonie rue Jean-Dolent, devant la prison de la Santé. Une plaque de marbre fut dévoilée : « Derrière ces murs 18 patriotes antifascistes furent exécutés sur les ordres d’un Gouvernement au service de l’ennemi. Ils sont morts pour que vive la France. Français, n’oubliez jamais ! » Quarante-huit heures plus tard, l’Humanité en rendait compte en une, par une simple photographie légendée, en « l’honneur de 18 patriotes guillotinés ou fusillés ». Le nom de Gaëtan Senlis figure sur le monument aux morts érigé dans le cimetière de la commune de Villemorien.
Figure contestée de la Résistance auboise, Robert Massé fit l’objet de vives critiques après la guerre. Selon Sébastien Touffu, « il semble bien qu’il ait quelquefois confondu Résistance et aventure personnelle, mais il n’en demeure pas moins que son groupe a participé aussi d’une manière active à la lutte contre l’occupant ».
Sources

SOURCES : Arch. PPo., BA 2117, 77W 813, 77W 1340. – F. Marcot (sous la dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, R. Laffont, 2006. – Sébastien Touffu, La Résistance dans l’Aube, CRDP de Champagne-Ardennes-AERI, 2010. – L’Humanité, 30 avril 1946. – Jean-Pierre et Jocelyne Husson, La Résistance dans la Marne, DVDrom, AERI, 2013. – Mémorial GenWeb. – État civil.

Daniel Grason

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