Né le 3 février 1912 à Mahón, Île de Minorque, Îles Baléares (Espagne), exécuté sommairement le 27 juin 1944 près du lieu-dit Vaugeton, commune de Celle-Lévescault (Vienne) ; Espagnol ; dessinateur de mode ; membre du Parti communiste d’Espagne clandestin ; interné ; résistant FTPF.

Rafaël Massa Andreu
Rafaël Massa Andreu
Carlos Fernandez, op. cit.
Dans la nécropole nationale</br> de Sainte-Anne-d'Auray
Dans la nécropole nationale
de Sainte-Anne-d’Auray
SOURCE :
Photos Jean-Pierre et Jocelyne Husson
Fils de Rafael et de Catalina, née Andreu, Rafael vivait en Espagne ; il était adhérent de l’Union générale des travailleurs (UGT). Lors de la retraite des armées républicaines de Catalogne, il entra en France le 13 février 1939, par la commune frontalière de Saint-Laurent-de-Cerdans (Pyrénées-Orientales). « De son visage au front large et dégarni, au menton bilobé, c’est surtout son regard perçant, serein et la douceur de ses yeux azurés qui marque son entourage. » Il cachait sa profession en se déclarant découpeur de chaussures, de manière à trouver facilement un emploi et brouiller les pistes de ses origines. En réalité, cet homme très cultivé maitrisant le latin, le grec et le français, était un dessinateur de mode en vogue, dans un des plus grands magasins de Barcelone, la « Maison Jorba ». Il mentionna aux autorités françaises sa qualité « d’ ex-soldat de l’armée républicaine » mais dissimula ses responsabilités de commissaire politique dans l’aviation militaire au 4e bataillon.
Il fut successivement interné dans les camps d’Argelès-sur-Mer, puis de Saint-Cyprien (Pyrénées-Orientales) et en mai 1939 dans celui de Gurs (Basses-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques). Par la suite, il fut affecté à la 214e Compagnie des Travailleurs Étrangers (CET) et rejoignit Nevers (Nièvre) où il intégra le 114e CET. En juin 1940, à l’arrivée de l’armée allemande, il partit par ses propres moyens à Cusset (Allier) puis en juillet 1940, se dirigea vers Roanne (Loire). Le préfet le reversa dans une nouvelle CET, la 74ème ; il fut dirigé sur Châtel-Guyon (Puy-de-Dôme) où il travailla comme cordonnier, puis en novembre 1940, à Égletons (Corrèze). Depuis le 27 septembre 1940, les CET avaient donné naissance aux GTE, Groupements de Travailleurs Étrangers, qui regroupaient des étrangers ne pouvant regagner leur pays et dont l’objectif était de fournir de la main-d’oeuvre pour les gros travaux. C’est dans ce cadre qu’il fut affecté comme manœuvre au service des autorités allemandes de l’organisation Todt, à la construction de la base sous-marine de Saint-Nazaire (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique) ; il était interné au Camp Franco regroupant environ 250 républicains espagnols, situé à Gron dans les Hangars de Montage Central HMC jouxtant l’aérodrome de Montoir-de-Bretagne. Dans ce camp, l’organisation clandestine du Parti communiste d’Espagne était importante, 31 militants en 1942. Rafael Massa Andreu y adhéra et devint secrétaire d’une cellule. Joan Escuer Gomis, responsable de la résistance espagnole sur Saint-Nazaire en lien avec Pierre Mahé, communiste responsable militaire du secteur, témoigna après sa déportation à Dachau : Rafael était mon substitut au comité de notre organisation. Au moment de son arrestation le 27 juin 1942 par la police nationale de Nantes (d’après Arch.PPo), jour de déclenchement de la répression sur Nantes ou le 5 juillet 1942 (d’après Carlos Fernandez), Rafael Massa Andreu était localisé par le Service de police anti communiste SPAC comme étant secrétaire à l’agitation et à la propagande et donc responsable du triangle de direction du camp Franco. Joan Escuer Gomis relata au sujet des interrogatoires à Nantes : « Rafael Massa fut le premier à être interrogé mais il avait été boxeur dans la catégorie amateur et, au premier coup qu’il reçut, il se retourna contre eux avec une telle rapidité qu’il laissa les deux policiers de la B.S. (Brigade spéciale) étendus sur le sol. Leur réaction ne se fit pas attendre : ils se lancèrent sur lui et s’acharnèrent si violemment qu’ils durent le ramener en le traînant jusqu’à nous ».
Avec ses camarades,il fut transféré le 11 juillet 1942 à Paris, mis à la disposition des policiers des Renseignements généraux chargés de l’affaire. Envoyé au Dépôt pour infraction au décret-loi du 26 septembre 1939, il fut emprisonné à la prison de la Santé. Il comparut devant la Section spéciale de la Cour d’appel de Paris, fut condamné le 11 décembre 1943 à dix-huit mois de prison et mille deux francs d’amende.
Le 13 décembre 1943, avec son groupe, il fut interné à la caserne des Tourelles, puis transféré le 7 mai 1944 au camp de Rouillé (Vienne). Des résistants libérèrent quarante-six internés dans la nuit du 10 au 11 juin 1944, Rafael Massa Andreu rejoignit le maquis de Saint-Sauvant (Vienne), prit part à plusieurs actions contre les militaires allemands.
Le matin du 27 juin, une colonne motorisée de plus de mille cinq cents hommes de la SS, de la Wehrmacht et de la Milice encerclèrent la forêt. Le hameau de la Branlerie, quartier général du maquis fut incendié. Cinq maquisards étaient tués les armes à la main. En fin d’après-midi, vingt-cinq hommes frappés à coups de crosses étaient exécutés sur le bord d’une route au lieu-dit Vaugeton, commune de Celle-Lévescault. Parmi-eux se trouvaient neuf Espagnols qui s’étaient évadés de Rouillé : Luis Gomez Castaño, Juan Hernandez Rodriguez, Antonio Serra Clariani, Honorio Perez Gonzalès, Ricardo Rojas Gil, Santiago Marruedo Fraile, Rafael Massa Andreu, Angel Sanchez Garcia et Vicente Rossel Barrachina.

Rafael Massa Andreu est inhumé dans la nécropole de Sainte-Anne-d’Auray (Morbihan).

Il a obtenu la mention « Mort pour la France » et a été homologué FFI.

Une stèle fut dressée sur la route départementale 7, près du lieudit Vaugeton (Vienne) : « À la Mémoire des Glorieux Soldats sans Uniformes Tombés à cet Endroit le 27 Juin 1944 pour la Paix et la Liberté. Massacrés par les nazis. Ils sont Morts pour la France et la Liberté ».
Sources

SOURCES : SHD, Vincennes, Rg 16 P 401204. — Arch. PPo., 77W 454. – Site Internet Vienne Résistance Internement Déportation (V.R.I.D.). – Carlos Fernandez, De la Guerre d’ Espagne...à la Résistance, Nantes, Comité départemental du souvenir des fusillés de Châteaubriant et Nantes et de la Résistance en Loire-Inférieure, 2010 . — Joan Escuer Gomis Mémoires d’un Républicain espagnol détenu au camp de Dachau trad. Amicale de Mauthausen, 2009, pp.138 à 159 . — Site Internet GenWeb. — Notes et photographies de Jean-Pierre et Jocelyne Husson.

Daniel Grason, Annie Pennetier

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