Né le 2 août 1895 à Lodz (Pologne), fusillé comme otage le 15 décembre 1941 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; brodeur.

Né dans une famille juive polonaise, fils de Chaïm et Sarah, née Reinerz, Bernard Fischel travailla à partir de 1921 dans la Sarre, à Sarrebruck. Depuis le traité de paix de Versailles du 28 juin 1919, ce territoire était placé sous mandat de la Société des Nations (SDN), et ses mines de charbon étaient devenues propriété de la France. Le 13 janvier 1935, un référendum fut organisé pour le maintien de la situation ou pour le rattachement de la Sarre à l’Allemagne, et plus de 90 % des électeurs votèrent pour le rattachement à l’Allemagne dirigée par Hitler.
De nationalité polonaise, juif, il ne se sentit plus en sécurité. Une carte d’identité lui fut délivrée à Sarrebruck lui attribuant la qualité de « réfugié sarrois ». Or, le traité de Versailles stipulait que seuls les habitants domiciliés dans la Sarre au moment de la signature étaient considérés comme sarrois. Bernard Fischel résida à Tarbes (Basses-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques), puis à partir du 4 janvier 1936 à Paris. Célibataire, il demeurait 34 rue de Vaucouleurs (XIe arr.). Muni d’un contrat de travail, il exerçait sa profession de brodeur, 171 rue La Fayette (Xe arr.). Il était titulaire d’une carte d’identité valable jusqu’au 31 mars 1942.
Bernard Fischel s’était en tout point conformé aux lois du 3 octobre 1940 et du 2 juin 1941 portant statut des Juifs. De ce fait, il ne pouvait vivre de son métier. Considéré comme « sympathisant des Jeunesses communistes », il fut arrêté à son domicile, interné à la caserne des Tourelles, Paris (XXe arr.) le 19 août 1941, puis transféré le 22 au camp de Drancy (Seine, Seine-Saint-Denis), réservé aux Juifs.
Il fut créé au sein des Renseignements généraux, en 1937, une Section spéciale de recherche (SSR) chargée de la surveillance politique des étrangers dans le département de la Seine. Il y eut plusieurs « rayons », « espagnol », « russe », « italien », « allemand », « polonais »... Rompant avec le principe de la nationalité, fut créé en octobre 1941 un « rayon juif », chargé de surveiller les étrangers comme les Français. Les Allemands étant à Paris, il n’était plus question de les surveiller. La direction du « rayon juif » fut confiée à son ex-responsable, Louis Sadosky, qui n’eut qu’un objectif, donner satisfaction à ses chefs de la direction des Renseignements généraux. Chargé d’arrêter des Juifs, il ne faillit pas. Il établit un fichier des « Juifs suspects », il n’hésita pas à falsifier les rapports des inspecteurs qu’il eut sous ses ordres. Lui-même se vantait d’avoir fait fusiller entre soixante et quatre-vingts personnes.
Louis Sadosky en rajouta, Bernard Fischel devint : « Suspect au point de vue politique, sympathisant des théories communistes et susceptible de se livrer à la propagande clandestine en faveur de la IIIe Internationale. Dangereux pour l’ordre public. »
Bernard Fischel fut désigné comme otage et exécuté le 15 décembre 1941 au Mont-Valérien. Après la Libération, à cause de sa nationalité étrangère, la mention « Mort pour la France » ne lui fut pas accordée par le ministère des Anciens Combattants.
Sources

SOURCES : Arch. PPo., 1W 0001, KB 95. – DAVCC, Caen, otage B VIII dossier 2 (Notes Delphine Leneveu, Thomas Pouty). – Louis Sadosky, brigadier-chef des RG, Berlin 1942, CNRS Éd., 2009. – Dominique Rémy, Les lois de Vichy, Romillat, 1992. – Serge Klarsfeld, Le livre des otages, op. cit. – Site Internet Mémoire des Hommes.

Daniel Grason

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