Né le 7 juin 1914 au 20, rue de l’Evescot à La Rochelle (Charente-Inférieure, Charente-Maritime), fusillé après condamnation le 15 juin 1944 à Paris (XVe arr.) ; employé de commerce ; membre du Parti communiste (PC) clandestin ; FTPF.

Albert Portron était le fils de Jules, Ernest Portron officier d’artillerie, médaillé militaire et de Jeanne, Marie, Albertine Laurans, il fut adopté par la nation par décision du tribunal civil de Brest (Finistère) le 20 novembre 1924.
Albert Portron, employé de commerce à Brest épousa le 1er août 1936, à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), Jeanne Le Mansec, institutrice née en 1912 qui enseignait à l’école publique de Pleslin-Trigavou (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor). Le couple s’installa en 1938 dans le hameau de Saint-Quay en Plélo (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), où Mme Portron avait été nommée. Ils eurent deux enfants, nés en 1940 et 1942. Albert Portron, qui était employé de commerce à Saint-Brieuc, perdit son emploi après la Débâcle. Il travailla alors comme terrassier sur des chantiers à Guingamp. Le PCF clandestin fut pratiquement décapité dans les Côtes-du-Nord après les grandes arrestations d’août 1943. Sous l’impulsion de Louis Picard, les structures clandestines se reconstituèrent avec une nouvelle génération de militants. Très rapidement, la direction des FTP s’engagea dans les premiers déraillements de train, en particulier sur l’axe Paris-Brest. Ces opérations furent menées par le groupe « Félix Cadras » de Châtelaudren-Plouagat mis en place par André Cavelan au début de l’année 1943.
Les époux Portron étaient en contact avec la résistance communiste de la région depuis le printemps 1942. Albert Portron intégra le groupe dirigé pendant l’été 1943 par Pierre Malfoy et Jean-Baptiste Morvan. Le sabotage commis le 15 octobre 1943 sur la voie ferrée Paris-Brest au lieu-dit Kerfichart en Plouvara, provoquant le premier déraillement de train dans les Côtes-du-Nord, mit en mouvement toutes les forces de répression. Le 1er novembre 1943 vers 16 h 30, ayant blessé accidentellement sa fiancée, Agnès Mordelet, au domicile de celle-ci, Jean-Baptiste Morvan se rendit de lui-même à la brigade de Châtelaudren, où il fut arrêté par les gendarmes Broustal et Le Carnuzel. On trouva sur lui une photo d’Albert Portron. Deux heures plus tard, au bourg de Plélo, Le Carnuzel arrêta Albert Portron, porteur d’une arme, qui fut remise aux autorités allemandes. Incarcéré à la maison d’arrêt de Saint-Brieuc, dans le quartier allemand, il retrouva ses deux camarades Jean-Baptiste Morvan et René Thouément.
Albert Portron fut transféré à la maison d’arrêt Jacques-Cartier de Rennes (Ille-et-Vilaine), puis à celle Fresnes (Seine, Val-de-Marne) vers le mois de mars 1944.
Le 1er juin 1944, il fut jugé avec ses quatre camarades FTP (Gilbert Le Taillandier, Jean-Baptiste Morvan, René Thouëment et Hyacinthe Tilly) par un tribunal militaire allemand, condamné à la peine de mort pour activité FTP ainsi que deux autres costarmoricains Célestin Briend et Jean-Marie Le Gallais.
Le 15 juin 1944, le Mont-Valérien à Suresnes n’étant pas accessible, ils furent fusillés au ministère de la Défense, direction générale des armées, 2 bis avenue de la Porte-de-Sèvres à Paris (XVe arr.), à cet emplacement se trouvaient à l’époque les champs de tirs de l’armée de l’air.
Le décès d’Albert Portron fut constaté par un médecin allemand à 15 h 34, il avait 30 ans.
Quelques heures avant son exécution Albert Portron écrivit une lettre d’adieux adressée à sa famille.
Fresnes, le 15 juin 1944,
Ma petite femme très aimée,
Mes chers petits.
Pardonne à ton pauvre mari pour le mal qu’il va te faire, ma chérie. Quand tu recevras cette lettre, je ne serai plus. Je suis condamné à mort, l’exécution doit avoir lieu cet après-midi à 3 heures. J’ai beaucoup de courage, essaie ma chérie, d’en avoir autant que moi. Ne t’abandonne pas au désespoir, je pense à nos petits. Elève-les, je t’en prie dans l’honnêteté la plus scrupuleuse.
Aie du courage, ma chérie, je finirai avec vos chers noms à tous sur les lèvres. Je te demanderai de ne pas être trop triste à cause des petits. Sois forte. Ils ne doivent pas, les chers petits, vivre entourés de tristesse. Sois la digne fille de tes parents. Tu embrasses bien le père Le Mansec et ta mère pour moi. Bien des choses également à la famille ainsi qu’aux voisins et amis. Ma pauvre chérie, les enfants et toi n’êtes pas tard à souffrir. Supporte courageusement cette dure épreuve.
Fasse le ciel que nous soyons les dernières victimes de cette guerre atroce et que nos chers petits ne voient pas une catastrophe comme celle-ci. Pense de temps en temps à ton pauvre Albert, ma chérie, mais de grâce ne t’éternise pas dans ton chagrin. Sache bien que je t’ai aimée comme il n’est pas possible de le faire. Nous aurions encore vécu si heureux si j’étais revenu. Adieu, ma chérie et sois heureuse. Adieu mes chers amours.
Bon courage, ton Albert qui t’adore et qui t’envoie ses derniers baisers.
Vive la France.
Vive la paix.
Albert.

Albert Portron fut inhumé au cimetière Saint-Michel de Saint-Brieuc, son nom figure sur La plaque du ministère de la Défense à Paris XVème et sur La stèle du bourg de Plélo.
Jeanne Le Mansec épouse d’Albert Portron, dont les activités de Résistance furent reconnues à partir de mai 1942, termina sa carrière à Saint-Brieuc. En 2022 la municipalité de Plélo nomma l’école publique "école Jeanne Le Mansec Portron".
Site des Lieux de Mémoire du Comité pour l’Étude de la Résistance Populaire dans les Côtes-du-Nord
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Côtes-d’Armor, 1T1610, dossier professionnel de Mme Portron versé par l’Inspection académique ; 2W235, 1043W33 (activité du PCF de 1940-1944), 1140W2. – L’Aube Nouvelle, hebdomadaire de la fédération des Côtes-du-Nord du PCF (1945-1951). – Joseph Darsel, La Bretagne au combat, Éd. Le Signor, 1980. – Louis Pichouron, Mémoire d’un partisan breton, Presses universitaires de Bretagne, 1969. – Alain Prigent, Histoire des communistes des Côtes-du-Nord (1920-1945), Saint-Brieuc, 2000. – Alain Prigent, Serge Tilly, « La Bataille du rail », Les Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 8/9, 2000. – Alain Prigent, Serge Tilly, « Les fusillés et les décapités dans les Côtes-du-Nord (1940-1944) », Les Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 12, 2011. – Serge Tilly, « L’occupation allemande dans les Côtes-du-Nord (1940-1944), Les lieux de mémoire », Les Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 10, 2004 et no 11, 2005. – Manuscrit inédit de Jean Le Lévrier, membre du groupe Félix Cadras de Plouagat-Châtelaudren, déporté.

Alain Prigent, Serge Tilly

Version imprimable