Né le 11 janvier 1889 à Ozolles (Saône-et-Loire), fusillé sommairement le 9 juin 1944 à Communay (Isère) ; fonctionnaire aux PTT, commis, puis inspecteur des postes à Mâcon (Saône-et-Loire), puis receveur principal à Valence (Drôme) ; syndicaliste CGT des PTT ; résistant

Paul Gateaud
Paul Gateaud
Paul Gateaud était le fils de Claude, jardinier et de Marie Thévenet, sans profession. Entré aux PTT en tant que commis, Paul Gateaud s’engagea dans le syndicalisme confédéré de sa profession, le syndicat national des agents (SNA), l’un des trois principaux syndicats de la fédération postale confédérée.
Se confond-il avec le Paul Gateau qui versa 10 francs à la souscription de l’Humanité pour « élever un monument à Jaurès » (8e souscription publiée le numéro du 27 avril 1919) ?
Paul Gateaud avait sans doute déjà un long parcours de militant lorsqu’à 32 ans, alors qu’il travaillait à Lyon, le 21 avril 1921, lors du congrès du syndicat des agents, il présenta un projet sur la réforme des salaires proposée par le gouvernement, face au projet du Conseil du syndicat proposé par Raynaud. Il proposait de réduire l’échelle des salaires de manière à ce que le salaire de début ne puis être inférieur à 1/6e du salaire le plus élevé, alors que la proposition du Conseil syndical le proposait à 1/3. C’est sa proposition qui fut adoptée par le congrès. Le 23 avril 1921, il se révéla comme militant réformiste de la majorité confédérale, dans le cadre de la discussion sur l’orientation syndicale. Pour lui les réformistes étaient des révolutionnaires qui voulaient « construire avant de détruire ». « Ils ne craignent pas la révolution, ils veulent étudier les moyens d’y arriver, et ils n’aiment pas les violences des CSR. ». Il était certes favorable à la liberté des CSR, mais voulait leur interdire « d’aller dans une internationale adverse, et de désorganiser la CGT ».
Le 23 avril 1922, dans la grande salle de la Bellevilloise, réunis pour la dernière fois avant longtemps dans un Congrès de la Fédération postale unifiée, les congressistes constatèrent l’impossibilité de rester ensemble, car deux syndicats (ouvriers et employés) étaient adhérents à la CGTU ; un troisième (Agents), restait adhérent à la CGT. Les unitaires quittèrent le congrès. La scission était consommée. L’après-midi, et le lendemain matin, Gateaud resta avec ses camarades confédérés, et ils tentèrent de poursuivirent le congrès. Dans la dernière demi-journée, c’est lui qui présenta le rapport de la commission chargée de la révision des statuts. Le siège de la fédération fut transféré au 211 rue Lafayette. En 1923, il participa au 17e congrès confédéral de la CGT, tenu à Paris du 30 janvier au 2 février, en tant que délégué des syndicats des agents des PTT du Rhône et de la Loire.
Paul Gateaud eut une forte implication dans la vie de son syndicat national, puisqu’il présida la première séance du congrès du syndicat national des agents (SNA) tenu à Paris, le 24 mai 1923. Dans les séances suivantes, il intervint à plusieurs reprises dans le débat. En 1924, il fut d’ailleurs élu membre suppléant du Conseil supérieur des PTT, au titre de ce syndicat.
Ayant été muté à Mâcon, Paul Gateaud devint le secrétaire de Saône-et-Loire de la Fédération postale, et fit voter, en début février 1928, un ordre du jour pour les revendication par l’assemblée des Agents des PTT de Mâcon. Il s’inscrivait ainsi dans la démarche imprimée par Jean Mathé, le nouveau secrétaire du syndicat national. Celui-ci, dans un contexte de forte montée du mécontentent provoqué par les mesures de rationalisations imposées par l’administration des PTT, avait fait se prononcer son syndicat pour un rapprochement avec les unitaires. Mais la direction de la fédération postale confédérée brisa ce mouvement.
Paul Gateaud représenta le Cartel des services publics de Saône-et-Loire, à la conférence du Cartel Confédéré des services publics, réuni à Paris le 18 mars 1928. Il intervint sur les salaires, et demanda au Cartel de se prononcer contre l’exploitation de la radio-diffusion par des firmes privées. L’ordre du jour suivant fut voté à l’unanimité en ce sens :« Le Cartel des services publics confédérés, constatant que les ennemis des monopoles mènent une campagne mensongère dont le but évident est de servir de puissants intérêts privés ; Dénonce le danger que présenterait, pour le consommateur et pour l’indépendance même de l’État, toute cession même déguisée, des monopoles actuels, cession qui aboutirait à leur remplacement par des monopoles de fait ; Proclame sa volonté de défendre les richesses internationales contre les cupidités dont elles sont l’objet et de dénoncer toutes les tentatives qui pourraient se produire pour entraver l’essor des régies municipales. »
En mai, on retrouvait Paul Gateaud intervenant dans un meeting des agents, à Paris, convoqué par le syndicat national au lendemain de son congrès. Le 25 mai 1928, d’après Le Populaire, un nombre considérable d’agents s’y pressèrent dans les deux salles de la Bourse du travail de Paris qu’il avait fallu ouvrir pour contenir la foule : salle Ferrer (Présidence : Carrière*, de Marseille) et salle Jean-Jaurès (présidence : Dupont, Pascal*, Debove*, Mme Dussard, et Cartier* (est-ce Honoré Cartier* ?). Le congrès du SNA avait, en effet, voté un ordre du jour favorable à l’unité, et les Unitaires avaient appelé les agents à se rendre en masse au meeting. Mais le congrès de la fédération postale confédérée, tenu quelques jours plus tard, mit fin à cette tentative d’ouverture.
Paul Gateaud continua à être un membre influent du SNA et de la fédération postale, car il participa le 28 octobre 1928 au conseil national de la fédération postale, et y intervint sur la question des salaires. Le 12 février 1930 à 20h30, secrétaire régional de la 9e région du syndicat des agents, il intervint en tant que délégué de la fédération postale confédérée dans un meeting tenu à la Bourse du travail de Mâcon, qui réunissait plus de 200 fonctionnaires de diverses administrations. Délégué au congrès de la fédération postale en juin 1934, Gateaud appela à voter le rapport moral.
Il fut nommé inspecteur des PTT à Mâcon le 21 novembre 1936 ; il avait 47 ans.
S’agit-il du même Gateaud qui intervint en tant que délégué de la Fédération de Saône-et-Loire au congrès national de la Ligue des droits de l’homme, tenu à Amiens du 15 au 17 juillet 1933 ? Celui-ci insista fortement pour que la Ligue des droits de l’Homme (LDH) s’engage pour "plus de cohésion démocratique contre la barbarie fasciste". Face au problème posé à la démocratie par les puissances d’argent il réclama, au nom de sa fédération, "la nationalisation des monopoles de fait". Il réclama que la LDH se prononça pour que des "des mesures énergiques soient prises contre l’agitation fasciste de la Ligne des contribuables et du comité de salut économique par la mise au pas des factieux et des gréviculteurs de l’impôt".
Cela pourrait expliquer pourquoi, dès le début de l’occupation, il divergea très fortement d’un des principaux militants de la fédération postale, René Belin qui, comme lui, était membre du syndicat des agents, et qui, lui, sombra dans la collaboration en devenant ministre de Pétain. A l’opposé, Paul Gateaud entra très vite dans la résistance dès 1940, et se livra à une intense activité de propagande notamment par tracts.
Nommé receveur principal à Valence (Drôme), il y dirigea le réseau Résistance PTT et joua un rôle très important dans la lutte contre l’occupant ; du contrôle des centres nerveux des transmissions des Allemands au stockage d’armes et de munitions dans les locaux mêmes de la recette principale en passant par la formation d’équipe de sabotage, rien ne lui n’échappait, y compris de nombreuses dénonciations le plus souvent anonymes. Avec Paul Gateaud, France Bastiat*, Émile Blachon*, et le facteur chef Combe*, la Résistance connaissait exactement le plan des câbles souterrains à grande distance et les endroits où elle pouvait les sectionner. Tous les coups de main étaient couverts par Bastiat qui coupait le téléphone dans les secteurs où opérait la Résistance.
Paul Gateaud était l’adjoint de Blachon au NAP (Noyautage des administrations publiques) des PTT de la Drôme. Il organisa aussi la section de Transport et de Chiffres de la Mission Interalliée Union. Il cacha chez lui des radios venant de Londres et d’Alger.
Le 20 mai 1944, victime d’une dénonciation, les Allemands firent une descente chez lui. Confondu par un papier carbone resté sur la machine à écrire, il fut arrêté et transporté à Montluc (Lyon, Rhône). Il ne trahit aucun secret malgré la torture par la Gestapo, torturé, et fut fusillé sommairement le 9 juin 1944 à Communay (Isère), commune rattachée au département du Rhône en 1967.
La ville de Macon donna le nom de Paul Gateaud à une de ses rues.
La mémoire de Paul Gateaud fut honorée par un timbre-poste de 20 centimes de franc, émis le 24 avril 1961 à 3,3 millions d’exemplaires. Une carte 1er jour de la Poste commémorant son exécution fut éditée le 22 avril 1961 à Ozolles. Ce timbre faisait partie de la cinquième série des Héros de la Résistance, dont, au total, la série comporta 23 timbres. Le timbre représentant Paul Gateaud est dû au dessinateur André Spitz et au graveur Jean Pheulpin.
Sources

SOURCES : Journal Le Populaire, 17 mai 1923, 2 février 1928, 26 mai 1928, 29 octobre 1928, etc. — Le Peuple, 24 avril 1921, 22 avril 1922, 24 avril 1922, 25 avril 1922Histoire de la Fédération CGT des PTT, Georges Frischmann, 1969. - Revue La Révolution prolétarienne, n° 177, du 25 juin 1934. — Journal officiel du 22 novembre 1936. — Journal l’Humanité, 27 avril 1919 — Le Matin, 18 mai 1923. — La voix du Peuple, N°91, de mars 1928. — Musée de la Résistance en Ligne, plaque en l’honneur de Jean Thérond, voir "le contexte historique" — Site Internet de la Bnf : Gallica.fr. — Patrick Martin, La Résistance dans le département de la Drôme, 1940-1944, thèse Université Paris IV Sorbonne, 2001, base de données noms. — Journal la Drôme (ex Le Pontias, Nyons), du 03/12/1944. — Organe du M.L.N. Gal de Lassus Saint-Geniès. P. de Saint-Prix, Combats pour le Vercors et pour la liberté, Peuple Libre 1982, p. 31, 136, 174. — Gerland, La Résistance en Drôme Centrale, op. cit., 35, 38. — Joseph La Picirella, Témoignages sur le Vercors, 14e édition, 1991, p. 126. — Bulletin des CVR Drôme, n°6, 2e trimestre 1991. — témoignage Marty. Arch. Dép. Drôme, 132 J 1. — Cdt Pons, De la Résistance à la Libération, rééd. 1987, p. 81, 279. — Monument aux morts de Valence, et plaque de la Poste de Valence. — Notes de Robert Serre.

Gilles Pichavant

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