Né le 16 juin 1921 à Paris (XVe arr.), mort sous la torture le 2 juillet 1942 à Paris (IVe arr.) dans les locaux de la préfecture de police ; tourneur ; résistant communiste OS.

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Jacques Bachter, en 1941-1942.
Cliché fourni par André Noël, beau-frère de J. Bachter.
Jacques Bachter.
Jacques Bachter.
Le père de Jacques Bachter était facteur aux PTT et sa mère concierge. Il habita constamment à Paris dans le XVIe arrondissement, 90 bis avenue de Versailles, avec ses parents. Il fréquenta l’école de garçons de la rue Boileau où il passa le certificat d’études primaires. Sous l’influence d’un camarade de classe, Georges Lafont (mort le 25 août 1944 lors de la libération de Paris), il adhéra aux Jeunesses communistes. Il continua des études durant plusieurs années au lycée technique de Puteaux où il obtint un certificat d’aptitude professionnelle de tourneur et un brevet élémentaire de dessinateur industriel.
Il travailla en qualité de tourneur aux Avions Caudron du groupe Caudron-Renault et ce jusqu’à l’exode en juin 1940. Dès son retour d’exode en septembre 1940, il chercha du travail et se fit engager à la Précision Moderne, 162 rue Saint-Charles (Paris, XVe arr.) en qualité de tourneur. Il reprit contact avec tous ses camarades et se retrouva rapidement engagé dans la Résistance. Il était membre de l’Organisation spéciale (OS), chargé du recrutement. Il aurait été l’un des adjoints d’Albert Gueusquin dit Bob.
Filé depuis plusieurs jours, à la suite de deux arrestations de résistants, Jacques Bachter fut arrêté le jeudi 2 juillet 1942 dans la matinée, par quatre inspecteurs de la Brigade spéciale no 2, dans son usine la Précision moderne, 53 rue des Bergers dans le XVe arrondissement de Paris. Vers 17 heures, les inspecteurs se présentèrent au domicile de ses parents. Seule sa mère était là ; ils lui annoncèrent l’arrestation de son fils, lui disant que si ce dernier acceptait de donner les noms de ses camarades, il serait libéré. Quant à la perquisition, elle s’avéra infructueuse. Dans la journée du lundi 6, étant sans nouvelle et rongés par l’inquiétude, les parents se présentèrent à la préfecture de police pour demander si leur fils Jacques avait besoin de quelque chose. La réponse fut négative. Dans la soirée, deux inspecteurs du commissariat d’Auteuil leur annonçaient que le corps était à l’Institut médico-légal. Le lendemain, les parents et Jacqueline, la sœur de Jacques Bachter, allèrent à l’Institut médico-légal ; il leur fut refusé de voir le corps, ils eurent une information, une autopsie ayant été pratiquée. L’un des oncles se rendit au palais de justice pour chercher les résultats ; il lui fut répondu qu’il était mort des coups reçus « traumatisme violent ». Un inspecteur de la brigade spéciale déclara à la famille : « Nous n’usons pas de procédés pareils. C’est lui-même qui s’est donné la mort volontairement. Nous ne sommes pour rien dans cette affaire. » Jacques Bachter aurait demandé un verre d’eau et il serait mort quelques instants plus tard, en s’empoisonnant. L’empoisonnement était d’autant moins avéré que les viscères n’avaient pas été analysées. Une autre version fut présentée : il s’était tué en « faisant une chute volontaire dans les escaliers ». En réalité le corps de Jacques Bachter avait été apporté à l’Institut médico-légal le 2 juillet vers 23 heures. Eugène Bachter déposa plainte le 4 décembre 1944, et déclara que l’autopsie pratiquée par le docteur Paul concluait : « traumatisme violent, coups à la base du crâne, coups sur la face postérieure du corps, notamment aux fesses et aux mollets ». Le pantalon que son père avait récupéré était taché de sang. Il témoigna des mensonges successifs des policiers : son fils était mort le 2 juillet vers 20 heures. L’un des quatre inspecteurs de la BS2 qui avait procédé à l’arrestation témoigna à la Libération, le rapport de mise à disposition était falsifié. Jacques Bachter n’avait pas tenté de se sauver dans les escaliers, « Cette mise en scène a été inventée de toutes pièces. Il ne fait pas de doute que Jacques Bachter est mort à la suite des coups reçus. Il gisait au sol sans connaissance. » Les faux rapports rédigés le furent avec l’accord du commissaire divisionnaire René Hénoque, chef de la BS2. Le 16 janvier 1945, Jacqueline Bachter affronta avec courage les propos d’un des deux inspecteurs matraqueur devant la commission d’épuration de la police. Un gardien de la paix confirma : il avait assisté à une séance de matraquage où il y avait trois inspecteurs. Jacques Bachter était allongé sur une table, un inspecteur le tenait par la tête. Un autre le frappait à coups de nerf de bœuf. Le supplicié mordait la table, mais il n’a jamais voulu parler, il a perdu connaissance. Jacqueline Bachter déposa plainte le 3 février 1945.
Jacques Bachter fut homologué adjudant FFI en 1949.
Sources

SOURCES : Arch. PPo, KB 7, KB 18, KB 56, GB 171 (photo). – DAVCC, Caen. – Jean-Marc Berlière, F. Liaigre, Le Sang des communistes, les Bataillons de la jeunesse dans la lutte armée, automne 1941, Fayard, 2004. – Jean-Marc Berlière, Franck Laigre, Liquider les traîtres, la face cachée du PCF 1941-1943, Paris, R. Laffont, 2007. – Souvenirs de Jacqueline Bachter, épouse Noel, sœur de Jacques Bachter.

Iconographie
PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo. GB 171.

Jean-Pierre Besse, Daniel Grason

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