Né le 7 juillet 1922 à Dalem (Moselle), fusillé le 29 novembre 1943 à Belle-Beille (Angers, Maine-et-Loire) ; étudiant ; résistant, membre du Front national et du réseau Agir.

Jan Rolland, fils de Louis Rolland et de Renée Chupin, était né à la frontière sarroise et fut élevé dans un milieu où le sentiment patriotique était particulièrement vif. Selon son père, ancien instituteur à Coutures (Maine-et-Loire), c’était un jeune homme robuste, sérieux, affectueux, au regard franc et au cœur généreux. Par sa maîtrise parfaite de la langue de Goethe, il avait pu lire la presse allemande d’avant-guerre et apprendre les convoitises non dissimulées des nazis.
Le 12 octobre 1938, il fit sa rentrée scolaire au lycée David-d’Angers à Angers. En juin 1940, durant la « guerre éclair », alors que la famille Rolland écoutait à la radio l’annonce de l’avance foudroyante des armées hitlériennes sur la Loire et échangeait des propos navrés, Jan se leva brusquement et, d’une voix que la colère faisait trembler, s’écria : « Ce n’est pas avec des mots qu’on les arrêtera ! » Après avoir obtenu son baccalauréat, série B, il intégra l’Institut polytechnique de l’Ouest (IPO) à Nantes (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), en octobre 1941.
En 1942, il s’engagea dans la section du Front national de l’IPO. Ce groupe avait été fondé en novembre 1941 par Jean Laidet à la demande de Charles Aubert. Mais, en 1943, Charles Aubert fut arrêté, entraînant la disparition de la section. Les membres du groupe continuèrent leur travail clandestin sous la direction de Jack Monssion. Ce dernier était aussi membre d’un réseau ayant un lien avec les Alliés via la Suisse.
À une date inconnue, dans les rues de Nantes, Jan Rolland, alias Claude Renault, surprit une conversation entre deux officiers qui lui révéla l’emplacement d’un nouveau nid de sous-marins sur les côtes allemandes. Il en informa Jack Monssion, qui lui-même avertit les services de renseignements britanniques via la Suisse.
Jan Rolland se montrant un bon agent de renseignement, de plus bilingue, il lui fut demandé de s’investir entièrement pour la cause de la Résistance. Il quitta alors l’IPO et abandonna ses études. Il se consacra à la surveillance des troupes d’occupation. Ainsi, chaque jour, il visitait le port de Nantes et se rendit fréquemment à Saint-Nazaire pour observer les mouvements des navires de la Kriegsmarine. Il surveilla aussi le trafic ferroviaire.
Convoqué pour le Service du travail obligatoire (STO), il refusa catégoriquement de travailler pour l’ennemi et décida alors de se cacher dans une ferme aux environs d’Ancenis. Dans un premier temps, ses supérieurs lui assignèrent la fonction d’agent de liaison. À ce titre, il transporta des messages à d’autres résistants. Il allait souvent au Mans, à Paris, à Tours et à Laval et, semble-t-il, quelquefois en Savoie. Ensuite, il trouva un travail d’interprète technique dans les usines d’aviation Heinkel à Château-Bougon, près de Nantes. Il reprit son travail de renseignement. Il réussit à fournir des renseignements précieux sur la production des avions allemands et à dérober des dessins techniques dans les bureaux d’études. Il fit ainsi détruire l’usine Heinkel par la Royal Air Force (RAF). À cette période, son indicatif dans la Résistance était 7722, numéro constitué à partir de sa date de naissance (7/7/1922). La Résistance lui confia la responsabilité de la lutte contre l’envoi de travailleurs français en Allemagne. Sa tâche consistait à rédiger de faux papiers à l’usage des réfractaires, et à procurer aux patriotes traqués par la police un abri sûr dans le maquis grenoblois.
Au début du mois de juillet 1943, Jan Rolland retrouva un ancien étudiant de l’IPO, Marcel Juino, et lui proposa d’intégrer la Résistance et de lui procurer une fausse carte d’identité pour échapper au STO. Fort de cette proposition inespérée, Marcel Juino en référa à son chef, Frédéric, un agent de la Sipo-SD basée à Nantes. Ce dernier l’autorisa à infiltrer ce réseau et lui conseilla d’acheter une fausse carte d’identité. Marcel Juino en obtint rapidement une par Jan Rolland et devint Marcel Gérard. Dans le même temps, il fut engagé au Front national et reçut pour mission de se procurer des renseignements sur les mouvements des troupes allemandes dans le secteur de Nantes. En collaboration avec son chef, Marcel Juino fournit de fausses informations. Très rapidement, ayant obtenu la confiance de ses « camarades de Résistance », il apprit que Jan Rolland transmettait les renseignements collectés à un certain Monssion, chef du service des renseignements du Front national, installé dans les environs de La Roche-sur-Yon (Vendée). De son côté, Jan Rolland se sentit démasqué. Il en fit part à Jean Laidet, le 8 août 1943. Il fut alors décidé de lui faire traverser la frontière espagnole pour qu’il puisse rejoindre les Alliés.
Un rendez-vous fut fixé au 14 août pour que Jean Laidet puisse lui remettre de nouveaux faux papiers, de l’argent et des armes. Frédéric décida de procéder à l’arrestation des membres de la section Front national-IPO. Le 12 août 1944, Marcel Juino se présenta chez Jean Laidet pour lui dire que Jan Rolland voulait le voir d’urgence. Mais Jean Laidet, ne pouvant s’absenter, lui dit de le lui amener. Dix minutes plus tard, la police allemande vint arrêter Laidet et l’emmena à son siège, place Louis-XVI à Nantes. Il fut interrogé toute la nuit, en particulier au sujet des armes qu’il devait fournir à Jan Rolland. N’ayant pas pu faire arrêter Jean Laidet et Jan Rolland en même temps, ce qui aurait facilité le travail de la police et prouvé que ces deux hommes se connaissaient, Marcel Juino, à l’aide d’un autre Français travaillant pour les Allemands, Bidault, tendit un piège à Jan Rolland. Il le fit venir dans sa chambre et lui fit connaître son camarade Bidault. C’est à ce moment que des hommes de la Sipo-SD firent irruption et les appréhendèrent.
Au cours de son interrogatoire, Jan Rolland avoua connaître Jean Laidet. Quant à Marcel Juino, il toucha la somme de quatre mille francs pour la réussite de cette affaire dans laquelle il fit arrêter six résistants. Menottes aux poignets, Jan Rolland fut conduit au siège de la Sipo-SD, rue de la Préfecture à Angers. Là, il subit la brutalité des policiers. Incarcéré à la prison du Pré-Pigeon d’Angers pendant plus de trois mois, il fut condamné à mort le 22 novembre 1943 par le tribunal militaire allemand (FK 595) d’Angers pour « espionnage et activité communo-terroriste », sans que son avocat, choisi par sa famille pour assurer la défense, ait été avisé du jugement.
La veille de son exécution, Jan Rolland ne cessa de chanter des chants patriotiques en compagnie de ses cinq camarades promis en même temps que lui à la fusillade. Il refusa, avec la dernière énergie, la grâce qui lui fut ensuite offerte à la condition d’aller travailler dans une mine de sel allemande. Le 29 novembre 1943, à 8 h 20, la sentence fut exécutée à Belle-Beille. « Il paraît même, qu’attaché au poteau, il invectivait encore les soldats chargés de l’exécuter. Ceci est d’autant plus probant qu’un de ses juges a déclaré : ``Pas correct, Jan Rolland, mais il est mort en homme brave !’’ »
Le cercueil contenant le corps de Jan Rolland fut directement amené au cimetière d’Angers-Est pour être inhumé (carré 15, rang 9, fosse 1). Exhumé par la suite, son corps repose actuellement dans le carré militaire 1939-1945, no 48, dans le rang no 8, tombe no 11. La croix porte la mention « fusillé ». Malgré l’interdiction des autorités allemandes, ses parents vinrent souvent s’agenouiller sur sa tombe.
Après la Libération, Jan Rolland fut homologué au grade d’aspirant dans la Résistance. Il fut décoré de la Médaille de la Résistance française à titre posthume (décret du 20 novembre 1946, JO du 5 décembre 1946), ainsi que de la Médaille militaire (décret du 7 janvier 1952). L’école publique de Coutures porte désormais le nom « École Jan-Rolland ».
Son héroïsme est aussi commémoré par plusieurs plaques portant son nom : sur le monument des élèves du lycée David-d’Angers morts pour la France ; à l’IPO, à Nantes ; dans le bourg de Coutures (place Jan-Rolland, inaugurée le 9 décembre 1945).
Il fut reconnu Mort pour la France le 28 mai 1946.


Angers, champ de tir de Belle-Beille (Maine-et-Loire) 1944 –1944
Sources

SOURCES : DAVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). – Arch. Dép. Maine-et-Loire, 181 J 50, 197 J 4, 140 W 71, 303 W 291, 303 W 294. – Arch. mun., Angers, 4H10. – Arch. Dép. Loire-Atlantique, 305 J. — Registre des inhumations du cimetière d’Angers-Est. – Arch. Max Pelletier, ami d’enfance de Jan Rolland. – Arch. M. Bouin (neveu de Jack Monssion). – Arch. Yves Chevallier. – Association amicale des anciens élèves du lycée David-d’Angers, Bulletin d’honneur de la Guerre et de la Résistance 1939-1945, Angers, 1948. – Association amicale des anciens élèves du lycée David-d’Angers, Cérémonie commémorative du 23 octobre 1949. – Hommage aux morts et disparus de la Guerre et de la Résistance, 1939-1945, Angers, 1949. – Lycée David-d’Angers, En souvenir de nos martyrs, 1940-1944, Angers.

Bertrand Gogendeau, Claude Pennetier

Version imprimable