Né le 21 juillet 1904 à Bizerte (Tunisie), mort en action le 27 mars 1944 à Naves-Parmelan (Haute-Savoie) ; officier d’active ; résistant, commandant du maquis des Glières en mars 1944.

Maurice Anjot grandit dans une famille qui conservait très vives les traditions religieuses et nationales.
Sorti de Saint-Cyr en 1925, il y revint en 1929 comme instructeur pour six ans.
Ses chefs notèrent toujours en lui " un rare ensemble de qualités morales, intellectuelles et physiques " Il apparaissait comme un " chef à la fois énergique et pondéré", faisant preuve d’un " jugement très sûr, de sens pratique, de coup-d’oeil et de tact ". Capitaine depuis 1935, il participa aux combats sur l’Aisne et sur la Marne en 1940. Après l’Armistice il fut affecté au 27e BCA (Bataillon des chasseurs alpins) d’Annecy avec le grade de capitaine.
Dès le printemps 1941, il se mit au service de la Résistance. Des rapports de police le signalaient pour « menées antigouvernementales ». Il multiplia les contacts avec les officiers de réserve pour constituer dans la région des bataillons secrets. « Au printemps 1941, dit un des témoins interrogés lors de l’enquête qui fut menée en automne 1942, j’ai reçu la visite du capitaine Danjot ou Anjot, adjudant-major du 27e chasseurs. Il était en civil et était venu en voiture. Il se présenta à moi, puis fit un tour d’horizon sur la situation de la France. Après leur défaite, en 1918, les Allemands avaient monté une organisation occulte pour refaire une armée. Il était normal que la France fît de même, me dit-il... Voici quelle était l’organisation du mouvement : il s’agissait de constituer dans chaque arrondissement, avec des éléments de réserve, un bataillon semblable aux bataillons de chasseurs, comprenant environ un millier d’hommes à mobiliser par convocation individuelle."
L’invasion de la « zone libre », en novembre 1942, fit tout échouer. Il fallut trouver d’autres méthodes ; mais le but restait le même : reconstituer des bataillons « pour le jour où, comme disait Anjot d’après un autre rapport de police, il faudrait nettoyer le pays ». Alors naquit l’Armée secrète. Le capitaine Anjot en fut l’un des principaux artisans en Haute-Savoie, sous les ordres du colonel Vallette d’Osia.
Après l’arrestation de son chef, il se laissa pousser la moustache et les favoris ; il devient un autre homme, avec une autre identité. Il trouva un gîte chez des amis, puis chez un prêtre, puis dans une ferme. Il assura lui-même les liaisons importantes ; il centralisa les renseignements ; il s’assura des complicités et des concours dont il fut le seul à connaître l’ampleur et la fécondité. Au moment de Glières, il n’hésita pas à se présenter à l’intendant de police, le colonel Lelong, pour parlementer. " Ma vie importe peu, dit-il à ceux qui veulent lui épargner les risques d’une pareille démarche, si je peux sauver celle des autres. "
Quelques jours après, Tom fut tué dans l’engagement d’Entremont. Il fallait un officier qui se dévouât pour continuer l’entreprise. Anjot se proposa. Il écrivit alors à sa femme " Tu sais combien les événements ont marché depuis ton départ. La disparition brutale de notre camarade Morel a nécessité son remplacement. Si j’ai pris cette charge, c’est parce que j’ai jugé que mon devoir était là. Ne crois pas qu’il ne m’en a pas coûté de le faire, toi absente ; mais peut-être que cette absence même m’a permis de surmonter plus librement le côté familial de la question. Nombreux sont ceux qui, par des sentiments plus ou moins lâches et faux, se laissent détourner actuellement du devoir national. En tant qu’officier, je ne puis le faire. Que cette décision soit acceptée par vous deux, Claude et toi, très crânement."
A ce testament spirituel, il ajouta un petit mot pour son fils : " Je te recommande surtout d’être toujours très gentil avec ta maman. Sois très obéissant et toujours le bon petit élève que j’avais plaisir à faire travailler. Je rentrerai à la maison dès que je le pourrai et nous reprendrons notre vie d’avant. N’oublie pas ton papa dans tes prières. "
Il monta à Glières le 18 mars. Il apporta le drapeau de la compagnie qu’il avait commandée au Pont de Kehl, afin de le faire flotter symboliquement à Glières. Il emmenait aussi avec lui sa vareuse de chasseur alpin : " Si je dois mourir, disait-il, je veux mourir Anjot " ; c’est pourquoi, dès son arrivée moustache et favoris disparurent.
Pendant les huit jours où le Plateau put résister encore, il n’eut que le temps de s’installer dans son nouveau commandement et de renforcer hâtivement la défense. Il voulait avant tout sauvegarder l’honneur en épargnant le plus possible la vie des hommes. Après avoir tenté de traiter avec les miliciens, il mit en œuvre tous les moyens disponibles pour soutenir l’attaque imminente. Le soir du 26 mars, quand les défenses furent irrémédiablement percées, il lança l’ordre d’évacuation, en donnant à chaque chef des instructions détaillées pour son repli. Il partit avec la nombreuse colonne qui s’engagea dans la gorge d’Ablon. Il était déjà parvenu au village de Nâves, en compagnie du lieutenant Lambert Dancet et de Vitipon, lorsqu’un barrage allemand ouvrit le feu sur leur petit groupe et sur les Espagnols qui suivaient. Ils ripostèrent, mais ils ne tardèrent pas à tomber. Anjot avait été atteint par une rafale de mitraillette.
Le capitaine Maurice Anjot figure « camoufleur » et « maquisard » sur la liste des membres du CDM (camouflage du matériel de l’armée) fusillés ou morts au combat.
Mort pour la France, il a été inhumé dans la nécropole nationale des Glières à Thônes, rang 5, tombe 67.
Sources

SOURCES : Site du ministère de la défense et des anciens combattants, chemins de la mémoire. — Jourdan-Joubert L., Helgot J., Golliet P., Glières, Haute-Savoie : première bataille de la Résistance 31 janvier-26 mars 1944, Annecy, Association des rescapés des Glières, 1994.— Michel Germain, Hommage aux 450 fusillés ou massacrés de la Résistance en Haute-Savoie, 2018, CRD74.

Jean-Pierre Besse

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