Né le 20 décembre 1904 à Belfort (Territoire-de-Belfort), fusillé après condamnation le 26 février 1944 à la citadelle de Besançon (Doubs) ; caporal au corps des sapeurs-pompiers de Belfort ; résistant membre du groupe Lorraine.

Fils de Frédéric Martin et de Caroline Ruegg, sans profession, le père d’Aloïs Martin se trouvait en Amérique au moment de sa naissance. Marié le 5 décembre 1925 à Belfort avec Coline Suzanne Mangue, il était en 1944 père de trois enfants (Marie-Louise née à Belfort le 8 mars 1926, Armand né à Belfort le 6 août 1930 et André né à Belfort le 29 novembre 1935). Entré au corps des sapeurs-pompiers de Belfort le 6 mars 1928, il fut nommé 1re classe le 6 mars 1932, puis caporal le 15 décembre 1938.
Pendant la guerre, il occupa la fonction de chef du poste du quartier des Forges. En novembre 1940, un petit groupe se forma à Belfort. Le caporal Aloïs Martin en fit partie selon le témoignage écrit de R. Hennin : « En novembre 1940, formation d’un groupe, d’une équipe de sabotage, peut-être la première, avec Pierrepaque, Martin, Schwimmer, Boilletot, Guiguon, Spahn et Vebrel. À l’arrivée d’un chef de la Gestapo, organisateur du réseau de mouchards dans le territoire, j’ai été chargé de surveiller ses activités. Me sentant surveillé de près, j’ai remis mon équipe entre les mains d’un autre groupe... » En fait, il mit ses camarades en relation avec le capitaine Maurice Ferrand.
Le « Groupe Ferrand » appartint au groupe Lorraine (MLN, Mouvement de libération nationale). Grâce aux dérogations dont bénéficiaient les pompiers, et en particulier les cartes de circulation de nuit, des actions leur furent rapidement confiées : une des premières fut la distribution de tracts et de journaux clandestins : Défense de la France et Lorraine, journaux reçus de Paris, Montbéliard ou Nancy. Ces journaux distribués dans les postes (de Pompiers) étaient diffusés de nuit dans les boîtes aux lettres. Le groupe « Lorraine » se servit aussi des pompiers comme agents de liaison entre les différents responsables du mouvement, puis entre les membres de l’état-major des Forces françaises de l’intérieur (FFI) qui fut organisé fin 1943-début 1944.
Lorsque le capitaine Ferrand fut arrêté le 9 septembre 1943, c’est Charles Masson* qui prit la direction du groupe et lui donna une grande dynamique. Il venait de l’Organisation civile et militaire (OCM) et rejoignit le groupe Ferrand en mars 1943. C’est probablement fin mai début juin de cette même année que le contact se fit avec le réseau Buckmaster du Special Operations Executive (SOE) implanté sur le pays de Montbéliard par Harry REE et que le groupe Ferrand fut alors considéré comme affilié au réseau Buckmaster. C’est vraisemblablement la raison pour laquelle certaines sources signalent Aloïs Martin membre du réseau César Buckmaster depuis le mois de mars 1943. Aloïs Martin participa à des actions de résistance : les plus importantes furent l’incendie de la menuiserie Dupont et d’un dépôt des usines Renault le 18 décembre 1943. La manière dont furent conduites les attaques de feu par le corps des sapeurs-pompiers eut pour résultat la destruction totale de ces deux établissements travaillant pour Allemagne. Tous ces groupes (OCM, mouvement Lorraine) s’unissaient également pour des opérations ponctuelles d’entraides ou lorsqu’ils opéraient pour le réseau SOE Buckmaster : libérer un agent de liaison (affaire de « l’hôpital de Belfort » le 13 janvier 1944, libération par la force d’un résistant et exécution d’un collaborateur, action à laquelle participe Aloïs Martin) ; ils assurèrent également ensemble la réception d’un parachutage pour le compte du SOE « réseau Buckmaster » qui se déroula dans la nuit du 20 au 21 décembre 1943 vers Lachapelle-sous-Chaux (Territoire-de-Belfort).
Les sources divergent sur la date et le lieu de son arrestation par la Sipo-SD et la Feldgendarmerie : soit le 22 janvier 1944 à Sochaux lors d’une réunion de responsables de la Résistance au café Grangier à Sochaux (Doubs) soit le 21 janvier 1944 alors qu’il était en mission de liaison « Ferrand-Buckmaster » avec son ami Marcel Schwimmer, à Montbéliard (Doubs) suite à la mise en place d’une souricière par les Allemands dans un café servant de lieu de rendez-vous.
Il fut emprisonné à la caserne Friedrich de Belfort puis à la prison de la Butte à Besançon (Doubs) sous les motifs : « terrorisme et exécution d’un individu réputé comme collaborateur ».
Il fut jugé par le tribunal militaire allemand FK 560 de Besançon le 15 février 1944 et fut condamné à mort.
Il a été fusillé le 26 février 1944 à 7 h 30 du matin en même temps que Marcel Schwimmer, par les autorités allemandes dans l’enceinte de la citadelle de Besançon.
Il figure à ce titre sur le monument commémoratif « Aux Martyrs de la Résistance » établi dans la citadelle.
Le 29 février 1944 à 7 h 30, une messe fut célébrée en l’église Saint-Joseph de Belfort à la mémoire des fusillés, messe à laquelle participèrent aux dires du commissaire de police dans son rapport au préfet environ 2 500 personnes dont un millier de l’usine Alsthom. il fut inhumé au cimetière de Brasse à Belfort. Il fut décoré de la Médaille de la Résistance à titre posthume et obtint la mention « Mort pour la France » en décembre 1945. Son nom figure sur le monument aux morts de Belfort, sur le monument commémoratif des sapeurs-pompiers de Belfort et sur une plaque commémorative à l’Hôtel de ville de Belfort.
« Ma chère femme bien-aimée,
C’est aujourd’hui que je t’écris ma dernière lettre, car je dois mourir ce matin à 7 heures, après avoir tant espéré ; mais avant de mourir, je ne t’oublie pas, et surtout ton homme qui t’as toujours aimé, qui t’a toujours été fidèle, pense souvent à celui qui a été ton soutien dans petite vie. Cependant, j’aurais voulu avant de mourir te serrer dans mes bras et t’embrasser une dernière fois ainsi que mes enfants que j’ai tant aimés ; embrasse bien Marie-Louise, Armand, André, qui ne verront plus leur Papa.
Adieu à vous tous mes chéris, celui qui pense une dernière fois à vous. Aloïs. »
Sources

SOURCES : DAVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). – Sites Internet : Mémorial GenWeb. – La répression de la Résistance par les autorités d’occupation et le régime de Vichy en Franche-Comté (ensemble documentaire rassemblé par les services éducatifs des archives départementales de Franche-Comté, fiche no 50) (3). — État civil. — Note de Jean-Pierre Ravery.

Michel Thébault

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