Né le 22 novembre 1913 à Carhaix (Finistère), fusillé par condamnation le 24 juillet 1942 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; facteur, employé de la SNCF ; résistant gaulliste.

Joseph Borgne
Joseph Borgne
Joseph Borgne dit Le Borgne
Joseph Borgne dit Le Borgne
Fils de Joseph, Yves, Marie Borgne, mécanicien, chef de dépôt à la gare de Carhaix, et de Louise, Marie Coatsaliou, ménagère, Joseph Borgne commença sa vie professionnelle dans un entrepôt de vêtements. La rue dans laquelle celui-ci se situait porte aujourd’hui son nom.
Depuis 1932-1933, il était membre de l’Action française avec le docteur Andrieux qu’il suivra dans la Résistance. Guichetier puis facteur à la SNCF, Joseph Borgne vivait à Carhaix. Il était marié à Marie Pastor et n’avait pas d’enfant. Le couple avait élu domicile rue Brizeux au dessus du café que tenait sa belle-soeur.
Il fut mobilisé en août 1939 et blessé lors des cours de l’Aisne.
Résistant, il était membre du réseau Johnny, dont il fut agent P1 à compter d’octobre 1940, puis P2 à partir de septembre 1941. Il fit recruter Jean Lamandé comme opérateur radio et accueilli à son domicile un émetteur à partir du 3 août. Les services allemands de détection radiogoniométrique les repérèrent. Le 9 septembre 1941, il fut arrêté par les autorités allemandes à son domicile, au-dessus du café familial dont les locaux servaient à plusieurs résistants, pour « complicité d’espionnage » et « gaullisme », puis incarcéré à la prison d’Angers (Maine-et-Loire) et torturé. Transféré le 20 décembre à la prison de Fresnes (Seine, Val-de-Marne), Joseph Borgne comparut devant le tribunal militaire du Gross Paris rue Boissy-d’Anglas (VIIIe arr.) qui, le 16 juillet 1942, prononça une condamnation à mort à son encontre pour « espionnage ». Joseph Borgne déposa un recours en grâce qui n’aboutit pas.
Joseph Borgne a été fusillé le 24 juillet 1942 au Mont-Valérien par les autorités allemandes, après avoir refusé qu’on lui bande les yeux. Dans une dernière lettre, adressée à ses parents et frères et sœurs, il avait écrit ces derniers mots : « Au revoir tous mes très chers. Je pars sans un regret sans une larme en bon Français et en bon Chrétien ».
Il fut inhumé au cimetière d’Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne), carré des corps restitués du cimetière communal, division 39, rang 3, tombe 9. Joseph Borgne fut reconnu « Mort pour la France » par le secrétariat général aux Anciens Combattants le 6 décembre 1945. Homologué au grade de sous-lieutenant, il reçut à titre posthume la Légion d’honneur, la Médaille militaire et la Croix de guerre. Une rue de Carhaix porte son nom ainsi qu’à Brest. Son nom figure sur le monument aux morts de la ville de Quimper (Finistère) et sur le monument commémoratif du Mont-Valérien.
Dernière lettre
Prison de Fresnes le 24 Juillet 1942
Mes très Chers Papa et Maman à Quimperlé
Je suis très heureux d’avoir eu la visite de Papa et Gabriel avec mon oncle François qui a été d’une infinie bonté pour moi, malheureusement il ne me sera pas possible de lui prouver ma reconnaissance sur terre, excusez-moi chers Papa et maman de la peine et du grand chagrin que je vous donne mais ne pleurez pas surtout, soyez très forts, mon recours en la grâce est rejeté, plusieurs officiers allemands viennent de me rendre visite et m’informer que le général à décider que je serai exécuté aujourd’hui à midi, c’est une bonne chose que de connaitre son heure, le Bon Dieu en a décidé ainsi, mais je ne vous cache pas que j’ai repéré quand même jusqu’à la dernière minute, mardi j’ai encore reçu un très bon colis de mon cher François, (il est 9h15).
Mais je suis très fort et j’espère que je le serai jusqu’à la dernière minute, j’ai encore à manger et un paquet de cigarettes, je mange et je fume tout en écrivant mes très chers Papa et Maman, votre fils Joseph vous aime et vous adore, j’ai toujours été très heureux avec vous, vous avez fait pour moi comme pour tous vos enfants d’ailleurs tout ce que vous pouviez pour nous rendre heureux dans le droit chemin, je pars donc heureux et tranquille, j’ai prié pour vous, priez donc pour moi, car j’ai été un grand pêcheur et un égoïste, je vous demande pardon, chers Papa et Maman, quant à mes frères et sœur et mon petit José j’espère qu’ils s’arrangeront. Il le faut, c’est si beau une grande famille dans l’amour, embrassez-vous et pleurez à moi, je veillerai sur vous, vous serez très heureux ainsi. Mais il ne faut pas être trop égoïste, vous avez tout ce qu’il faut pour cela, écoutez les conseils de Papa et Maman et soyez tous gentils les uns avec les autres c’est comme cela que vous serez heureux. L’heure tourne je viens de commencer, il est 10h ½ je quitterai Fresnes à 11h.
Au revoir chers Parents. Recevez mes Bons Baisers et tout le cœur de votre fils
au Revoir chers Frères et sœur, José et amie.(Mar..) que je ne connais pas
Bon Baiser Papa Bon Baiser Maman
Bon Baiser Gaston et sa femme
Bon Baiser
Bon Baiser Gabriel et sa femme
Au Revoir tous
Mes très chers, je pars sans un regret sans une larme
En bon Français et en bon Chrétien
Joseph
 
Prison de Fresnes, le 24 juillet 1942,
Mes très chères Tante, Oncle, Cousin,
Cher Jacques, je regrette de ne pas pouvoir prouver ma reconnaissance à tes chers Papa et Maman, car, vois-tu, le sort en est jeté, mon recours en grâce vient d’être repoussé. Des officiers allemands sortent à l’instant de ma cellule ; il est 9 heures environ : je serai exécuté à midi (je fume comme un dragon grâce à mon oncle, c’est mon dernier paquet). Vous serez peut-être à table. Je penserai à vous soyez-en sûrs. Je suis très fort. J’ose espérer que je serai ainsi jusqu’à la dernière minute. Il me reste encore à manger : je pense donc pouvoir faire un bon casse-croûte avant le grand voyage tantôt je serai près du Bon Dieu qui, j’espère, me pardonnera mes péchés. Priez tous pour moi car j’ai beaucoup péché. Depuis que je suis en prison, j’ai beaucoup réfléchis. J’ai été égoïste comme tous les humains. Je viens de communier. Au revoir mes très chers Oncle, Tante et Neveu. Il faudra venir à la prison prendre mes affaires. Mon portefeuille sera pour Jacques ainsi que mes grandes chaussettes rouges et ma chemise blanche. Vous garderez en plus tout ce que vous voudrez.
 
Au revoir à tous trois et recevez mes mille baisers.
 
Votre neveu Joseph qui vous adore.
 
Merci mille fois pour
votre infinie bonté.
Joseph
Sources

SOURCES : AVCC, Caen, B VIII 3 (Notes Thomas Pouty). – SHD, Gr 40 LN 1661 (BCRA)Ouest-France, 23 juillet 2014, entretien avec Dominique Mesgouez. – Mémorial GenWeb. – Site du mémorial du Mont-Valérien. – État civil, son nom officiel est bien Borgne et non Le Borgne. — Mémorial de cheminots, op. cit., notice Le Borgne Joseph, p. 880-881, par Stéphane Robine et Hervé Barthélémy. — Dictionnaire des réseaux de la France combattante, SHD, p. 606. —
Lettre : archives de la famille, Françoise Musy-Le-Borgne, nièce de Joseph.

Julien Lucchini, Annie Pennetier, Claude Pennetier

Version imprimable