Né le 29 mars 1909 à Rive-de-Gier (Loire), fusillé par les Français (GMR) le 19 février 1944 au fort de la Duchère à Lyon (Rhône) après condamnation à mort par une cour martiale du régime de Vichy ; cheminot ; militant de la CGT ; militant du Parti communiste ; agent NAP-Fer et membre des Groupes francs du 5e bureau de l’Armée secrète (AS) à Lyon.

Fils de Jean, Régis, Élie Bouit, ébéniste, et de Marie, Julie, Léontine Masson, ménagère, Claudius Bouit naquit au domicile de ses parents, 50 rue du Grand-Terray. Il se maria le 7 octobre 1933 à Bourg-en-Bresse (Ain) avec Augustine, Marie Bard. Claudius Bouit était cheminot et demeurait 1 rue Nouvelle à Lyon (VIIe arr.). Il fut militant de la cellule PCF Petite-Guille dans le quartier des États-Unis-Montplaisir à Lyon et militant de la CGT.
Claudius Bouit (alias Dudu) était agent de la branche Fer du Noyautage des administrations publiques (NAP-Fer) et membre des Groupes francs du 5e bureau de l’Armée secrète à Lyon (Rhône). Fin 1943, il fit partie d’une équipe de GF qui récupéra du fromage destiné aux Allemands et entreposé rue Casimir-Périer (Lyon, IIe arr.). Ils remplirent un camion afin de se ravitailler et de venir en aide à des familles dont un proche avait été victime de la répression.
Suite à des opérations de la police et de la Milice contre les Groupes francs de Lyon, dix-sept résistants se replièrent entre le 14 et le 17 février dans deux maisons, l’une située dans le hameau de Vancia, à Miribel dans l’Ain (aujourd’hui à Rillieux-la-Pape dans le Rhône), l’autre à Écully (Rhône), chemin du Petit Bois. C’est dans cette dernière que Claudius Bouit se réfugia avec sept ou huit compagnons (Jean-Baptiste Mazurat, peut-être Jacques Granger et Jean-Claude Chevailler et cinq autres qui ne furent pas condamnés à mort ultérieurement).
Dans la nuit du 17 au 18 février 1944, suite à une dénonciation, des miliciens, des Allemands et des GMR attaquèrent le refuge de Vancia. Les résistants furent arrêtés au bout de neuf heures de combat. L’un d’eux, interrogé par Joseph Darnand (chef de la Milice et secrétaire général au Maintien de l’ordre), donna l’adresse du refuge d’Écully.
Dans la journée du 18 février, les miliciens arrivèrent à proximité de la maison d’Écully. L’un des résistants, partant pour un rendez-vous, fut appréhendé et contraint de demander à ses compagnons de se rendre. S’ensuivit un combat d’environ trois heures. Cernés par quatre-vingts miliciens et GMR et à court de munitions, Claudius Bouit et ses camarades durent se rendre. Ils furent menottés et mis torse nu.
Les résistants arrêtés à Vancia et Écully furent conduits à L’Alcazar, local de la Milice situé montée du Chemin-Neuf (Lyon, Ve arr.). Les miliciens les torturèrent. Des policiers français établirent des procès-verbaux officiels à partir des aveux obtenus sous la torture. Ces procès-verbaux furent transmis à Georges Marionnet (chef milicien et membre du cabinet de Darnand au SGMO) qui dirigeait les interrogatoires. Marionnet considéra que ces procès-verbaux étaient trop tempérés pour garantir la condamnation à mort des prisonniers. Il exigea qu’on y ajoute les réponses aux trois questions « étiez-vous présents lors de l’affaire de Vancia et Écully ? », « aviez-vous des armes à disposition ? » et « vous êtes-vous servis de ces armes ? ».
Après l’interrogatoire, deux résistantes, arrêtées également le 18, durent procéder à une toilette sommaire de leurs camarades dont les visages étaient tuméfiés et couverts de sang. Le 19 février, Claudius Bouit et ses compagnons furent conduits à la prison Saint-Paul (Lyon) où ils furent incarcérés. Ils comparurent devant la cour martiale du secrétariat général au Maintien de l’ordre (SGMO) dans la salle de l’anthropométrie de la prison Saint-Paul. La cour martiale fut composée de Georges Marionnet, président de la cour, Panebœuf (chef régional de la Milice) et Simide (chef milicien de Bourg-en-Bresse), assesseurs, tous désignés par Darnand. La cour ayant déjà statué sur le sort des accusés, l’audience se résuma à la lecture de la sentence (« jugement d’une demi-heure, tout au plus » d’après le témoignage de Roland Hételle). Ils furent condamnés à mort. Selon les règles de fonctionnement des cours martiales du SGMO, les condamnés n’eurent droit ni à l’assistance d’un avocat ni à aucun recours d’aucune sorte. Ensuite, le surveillant-chef remit une feuille aux condamnés afin qu’ils puissent faire leurs adieux à leurs familles. Cussonac, l’intendant de police de Lyon, détruisit les lettres des condamnés, soit en les déchirant devant leurs yeux, soit en les brûlant.
Le 19 février 1944, rapidement après le jugement, Claudius Bouit, Jean-Baptiste Mazurat, Jacques Granger, Jean-Claude Chevailler, Roland Boeglin, Louis Bonavent, Sergio Dal Pero, Aimé Lhopital, Marcel Tardy et Enzo Tucci furent conduits dans les fossés du fort de la Duchère (Lyon, IXe arr.). Ils marchèrent jusqu’aux poteaux en chantant « La Marseillaise » et « L’Internationale ». Beaucoup d’entre eux refusèrent d’avoir les yeux bandés. Le peloton d’exécution fut constitué de GMR. L’un d’eux, Roland Hételle, refusa de tirer et fut arrêté. Les autres ne purent ou ne voulurent tirer franchement sur leurs cibles, si bien que l’exécution fut un massacre. Les résistants furent grièvement blessés et il fallut les achever à coups de pistolet.
La propagande vichyste se fit l’écho de cette victoire des forces du Maintien de l’ordre notamment via le journal Le Nouvelliste du 21 février 1944, le journal Lyon républicain du 16 mars et l’éditorial de Philippe Henriot diffusé sur les ondes de Radio-Paris.
Le corps de Claudius Bouit est inhumé à la nécropole nationale de la Doua (Villeurbanne, Rhône), rang A 11, tombe 25.
Lyon, fort de la Duchère (19 février - 4 août 1944)
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Rhône, 90J29, 3678W19. – Virginie Sansico, La justice du pire, les cours martiales sous Vichy, 2002. – René Chevailler, Gaëlle Marignan, Bruno Permezel, René Perrin, Les groupes francs-Libération-sud, Ve bureau de l’Armée secrète, une résistance lyonnaise en armes, 2004. – Bulletin du Groupe d’histoire et archéologie d’Écully no 76, 1996. – Mémorial GenWeb. – État civil.

Jean-Sébastien Chorin

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