Né le 23 octobre 1912 à Plainpalais (Genève, Suisse), fusillé le 19 février 1944 au fort de la Duchère (Lyon, Rhône) ; ouvrier du bâtiment ou commissionnaire ; membre des Groupes francs, bureau de l’Armée secrète (AS) à Lyon.

Fils de Jean et Catherine Rinet, naturalisé français, Aimé Lhopital était ouvrier du bâtiment ou commissionnaire. Il demeurait 77 avenue Alexandre Leclerc à Lyon (VIIe arr.). Il fut l’objet d’un arrêté préfectoral d’internement administratif au printemps 1940. Il était alors manœuvre à Roanne (Loire). Évacué devant l’avance allemande, il aboutit au centre de séjour surveillé de Chibron (commune de Signes, Var) à son ouverture, le 20 juin 1940. À la fermeture de ce camp, il fut transféré à Fort-Barraux (Isère), le 14 février 1941.
Il devint membre des Groupes francs du 5e bureau de l’AS à Lyon (Rhône) sous le pseudonyme de Gaston. En novembre 1943, Aimé Lhopital fit partie d’une équipe qui transporta des armes de Lyon à Paris pour équiper des résistants. Son groupe prit le train, muni de valises pleines de grenades, mitraillettes et munitions.
Suite à des opérations de la police et de la Milice contre les Groupes francs de Lyon, dix-sept résistants se replièrent dans deux maisons hors de la ville. L’une était située dans le hameau de Vancia, à Miribel dans l’Ain (aujourd’hui à Rillieux-la-Pape dans le Rhône), l’autre à Écully (Rhône). C’est à Vancia, dans la maison de l’ancienne cure de l’église, qu’Aimé Lhopital se réfugia le 14 février 1944, avec huit compagnons, en vue d’un regroupement pour de nouvelles opérations.
Dans la nuit du 17 au 18 février 1944, suite à une dénonciation, des miliciens, des Allemands et des GMR attaquèrent le refuge de Vancia. Le chef de l’équipe réussit à s’échapper. Un milicien fut tué. Débordés par le nombre, les résistants se rendirent au bout de neuf heures de combat. L’un d’eux, interrogé par Joseph Darnand (chef de la Milice et secrétaire général au Maintien de l’ordre), donna l’adresse du refuge d’Écully. Dans la journée du 18 février, les miliciens et GMR attaquèrent les hommes cachés à Écully. Cernés et à court de munitions, ils furent également contraints de se rendre.
Aimé Lhopital et ses compagnons arrêtés à Vancia et Écully furent conduits à L’Alcazar, local de la Milice situé montée du Chemin-Neuf (Lyon, Ve arr.). Les miliciens les torturèrent. Des policiers français établirent des procès-verbaux officiels à partir des aveux obtenus sous la torture. Ces procès-verbaux furent transmis à Georges Marionnet (chef milicien et membre du cabinet de Darnand au SGMO) qui dirigeait les interrogatoires. Marionnet considéra que ces procès-verbaux étaient trop tempérés pour garantir la condamnation à mort des prisonniers. Il exigea qu’on y ajoute les réponses aux trois questions : « Étiez-vous présents lors de l’affaire de Vancia et Écully ? », « Aviez-vous des armes à disposition ? » et « Vous êtes-vous servis de ces armes ? »
Après l’interrogatoire, deux résistantes, arrêtées également le 18, durent procéder à une toilette sommaire de leurs camarades dont les visages étaient tuméfiés et couverts de sang.
Le 19 février, Aimé Lhopital et ses compagnons furent conduits à la prison Saint-Paul (Lyon) où ils furent incarcérés. Ils comparurent devant la cour martiale du secrétariat général au Maintien de l’ordre (SGMO) dans la salle de l’anthropométrie de la prison Saint-Paul. La cour martiale fut composée de Georges Marionnet, président de la cour, Panebœuf (chef régional de la Milice) et Simide (chef milicien de Bourg-en-Bresse), assesseurs, tous désignés par Darnand (secrétaire général au Maintien de l’ordre). La cour ayant déjà statué sur le sort des accusés, l’audience se résuma à la lecture de la sentence (« jugement d’une demi-heure, tout au plus » d’après le témoignage de Roland Hételle). Ils furent condamnés à mort. Selon les règles de fonctionnement des cours martiales du SGMO, les condamnés n’eurent droit ni à l’assistance d’un avocat ni à aucun recours d’aucune sorte. Ensuite, le surveillant-chef remit une feuille aux condamnés afin qu’ils puissent faire leurs adieux à leurs familles. Cussonac, l’intendant de police de Lyon, détruisit les lettres des condamnés, soit en les déchirant devant leurs yeux, soit en les brûlant.
Le 19 février 1944, rapidement après le jugement, Aimé Lhopital, Jean-Baptiste Mazurat, Jacques Granger, Jean-Claude Chevailler, Claudius Bouit, Roland Boeglin, Louis Bonavent, Sergio Dal Pero, Marcel Tardy et Enzo Tucci furent conduits dans les fossés du fort de la Duchère (Lyon, IXe arr.). Ils marchèrent jusqu’aux poteaux en chantant « La Marseillaise » et « L’Internationale ». Beaucoup d’entre eux refusèrent d’avoir les yeux bandés. Le peloton d’exécution fut constitué de GMR. L’un d’eux, Roland Hételle, refusa de tirer et fut arrêté. Les autres ne purent ou ne voulurent tirer franchement sur leurs cibles, si bien que l’exécution fut un massacre. Les résistants furent grièvement blessés et il fallut les achever à coups de pistolet.
La propagande vichyste se fit l’écho de cette victoire des forces du Maintien de l’ordre, notamment via le journal Le Nouvelliste du 21 février, le journal Lyon Républicain du 16 mars et l’éditorial de Philippe Henriot diffusé sur les ondes de Radio-Paris.
Le corps d’Aimé Lhopital est inhumé à la nécropole nationale de la Doua (Villeurbanne, Rhône), rang A 11, tombe 24.
Son fils, Marcel Lhopital (surnommé Ouistiti), séjourna à l’Ermitage, pension d’enfant de victimes, à Villeneuve-Loubet.
Lyon, fort de la Duchère (19 février - 4 août 1944)
Sources

SOURCES :Arch. Dép. Rhône, 90J29, 3678W19. — Arch. Dép. Var, 4 M 291. — site Mémoire des hommes SHD Vincennes GR 16 P 371560 et Caen SHD/ AC 21 P 564224 (nc). – Virginie Sansico, La justice du pire, les cours martiales sous Vichy, 2002. – René Chevailler, Gaëlle Marignan, Bruno Permezel, René Perrin, Les groupes francs-Libération-Sud, Ve bureau de l’Armée secrète, une résistance lyonnaise en armes, 2004. – Bruno Permezel, Résistants à Lyon, Villeurbanne et aux alentours, 2824 engagements, 2003. – Jacques Delperrié de Bayac, Histoire de la Milice, 1918-1945, 1969. – Mémorial GenWeb. ⎯ notes Jean-Marie Guillon.

Jean-Sébastien Chorin

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