Né le 26 décembre 1890 à Paris Xe arr., fusillé le 15 mars 1944 au fort de Bondues (Nord) ; architecte ; résistant, membre du réseau Kléber, puis de l’Organisation civile et militaire (OCM).

Marcel Douphy dans son bureau en 1938
Marcel Douphy dans son bureau en 1938
Marcel Douphy dans une revue à Pompadour (Corrèze), le 27 juin 1940, en présence du général Weygand.
Son père Amand Douphy, artisan, possédait une petite entreprise de miroiterie et dorure sur bois, sise 61 Faubourg Saint Denis à Paris Xe arr. ; sa mère Louise Chaumette dirigeait un atelier de confection chic pour dames, rue Beaurepaire. Le couple était ostensiblement athée, ils avaient choisi tous deux la crémation. Marcel Douphy fit ses études à l’École centrale.
Ancien engagé volontaire dans l’armée française au 32e R.A.C. en octobre 1912, Marcel Douphy fut sous-lieutenant dans l’artillerie. Durant la Première Guerre mondiale, nommé lieutenant en août 1916, il combattit dans le Nord et fut décoré de la Croix de guerre, décoration à laquelle s’ajouta, en 1920, le grade de chevalier à l’ordre de la Légion d’honneur.
Résident de Nœux-les-Mines (Pas-de-Calais) au sud de Béthune, il avait rencontré Paule Prin, qui devint son épouse en 1919. Le couple eut trois enfants.
À Nœux-les-Mines, Marcel Douphy fonda un cabinet d’architecte, il était officiellement architecte de la ville, ainsi que des communes voisines de Sains-en-Gohelle, , Hersin-Coupigny et Barlin. À Noeux-les-Mines, il travailla, entre autres, aux plans d’une rue qui devint, en 1945, le Boulevard du Commandant-Douphy.
En septembre 1939, il fut appelé à servir au sein de l’armée.Il participa aux combats qui se déroulèrent du 10 mai au 25 juin 1940 à Anvers, Amiens, Le Quesnel. Le 1er septembre 1940, il fut nommé chef d’escadron commandant le 1er groupe du 101e régiment d’artillerie et resta mobilisé en Zone sud. Il ne revint à Nœux-les-Mines qu’à la fin de l’année, amer et plein de lucidité sur la défaite due, selon lui, à un commandement incompétent et un matériel insuffisant. Au mois de décembre, il devint officier de la Légion d’honneur.
Ancien chef d’escadron de réserve en 1939, qui s’était distingué en 1914-1918 comme officier de transmission régimentaire et dans la campagne de 1940 en commandant un groupe d’artillerie au 101e RAL, Marcel Douphy était convaincu de l’importance du renseignement. D’emblée, il prit part aux activités de Résistance, aidé notamment par les contacts qu’il avait pu nouer en zone libre. Sa riche correspondance témoigne de nombreux échanges avec d’autres officiers sur l’ensemble du territoire. Afin de ne pas éveiller les soupçons, il installa dans son bureau un portrait du maréchal Pétain.
En 1941, il devint membre du réseau Kléber. Nommé agent P2 comme lieutenant-colonel, il reçut régulièrement les membres du 2e bureau qui, pour lui rendre visite, utilisaient la couverture de représentants en pharmacie. Son travail, remarqué par le Bureau des opérations aériennes (BOA), lui valut la confiance de celui-ci. Aussi Marcel Douphy réceptionna-t-il des armes parachutées par le BOA, qu’il dissimula pour partie à son domicile afin d’en enseigner le maniement aux jeunes membres de son groupe.
En juillet 1942, il devint membre de l’Organisation civile et militaire (OCM), et en fut nommé responsable pour le secteur de Lens (Pas-de-Calais). Il fut à l’origine d’évasions, de l’hébergement d’aviateurs britanniques, ainsi que de confection et mise en circulation de faux papiers. Dans le cadre de ses activités de renseignement, il fit le relevé des plans de l’aérodrome de Brias (Pas-de-Calais), détruit ultérieurement par la Royal Air Force grâce aux informations relevées. Plus tard, le colonel Dassonville confirma son rôle dans cette opération. Fort de ses succès, son groupe fut ainsi désigné dans le cadre de l’opération Tortue, de première importance, qui consistait à ralentir le déplacement des Allemands et à récupérer des armes après que les forces alliées eurent débarqué.
Suite à de probables dénonciations, Marcel Douphy fut arrêté le 2 mars 1944 par la GFP d’Arras, la police militaire de « l’ange gardien des V1 », pour « espionnage, trafic d’armes et d’essence, et résistance ». Il fut incarcéré à Béthune, puis à Arras où il fut confronté à l’hôtel du Commerce avec les autres membres de l’OCM arrêtés. Le 14 mars, au terme de l’instruction de son affaire, il fut transféré à la prison de Loos-lès-Lille avec ses deux camarades, Louis Dhenin et Émile Beaucourt, pour leur jugement. On sait, grâce au témoignage d’André Velut, que le lendemain ces hommes ont comparu devant le tribunal du 65e corps d’armée allemand réuni boulevard de la Liberté à Lille. Condamnés à mort, alors que le procès de Velut était repoussé, Marcel Douphy et ses deux compagnons furent exécutés le jour même dans le plus grand secret dans les fossés du fort de Bondues.
Marcel Douphy a reçu, à titre posthume, la Médaille de la Résistance en février 1945 et la Croix de guerre avec palme en 1958. Le président américain Eisenhower lui a décerné un certificat de reconnaissance pour services rendus aux Alliés.
Le nom de Marcel Douphy figure sur le monument commémoratif du fort Lobau, à Bondues, sur le monument commémoratif du mémorial des Services spéciaux à Ramatuelle (Var), ainsi que sur le monument aux morts de Nœux-les-Mines.
Sources

SOURCES : DAVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). – Fonds « André Velut » (La Coupole). – Musée de la Résistance de Bondues, Ils étaient 68, 2010. – Laurent Thiery, La répression allemande dans le Nord de la France (1940-1944), Lille, Presses du Septentrion, 2013, p. 239-256. – Mémorial GenWeb . — Témoignage de sa fille Hélène Dussart-Douphy, 2018.

Julien Lucchini, Laurent Thiery

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