Né le 6 novembre 1902 à Bisping (Lorraine annexée), guillotiné le 27 septembre 1943 à Halle (Allemagne) ; batelier du Rhin ; membre du groupe de renseignement des Bateliers du Rhin, condamné à mort à Berlin le 27 mai 1943 pour espionnage et aide à une puissance étrangère par le Reichskriegsgericht.

Fils d’un batelier d’Offendorf (Bas-Rhin), Lucien Jacob commença son apprentissage de batelier chez son père en 1915. Il déserta son unité durant son service militaire en Sarre et travailla en Allemagne de 1923 à 1928, date à laquelle il rentra en France et se présenta aux autorités militaires. Condamné à six mois de prison avec sursis par le tribunal militaire de Nancy (Meurthe-et-Moselle), il termina ses obligations militaires, puis occupa jusqu’en 1938 un poste de responsable sur un remorqueur de la compagnie de navigation suisse le Comptoir rhénan, qui effectuait régulièrement des trajets entre Bâle, Strasbourg et Anvers. Après l’armistice de 1940 et l’annexion de fait de l’Alsace, sa compagnie lui confia la responsabilité du bateau Mont Blanc III, autorisé par les autorités allemandes à effectuer, à partir de septembre 1941, des trajets sur le Rhin. Au cours de ces voyages, sa péniche pénétrait à quelques centaines de mètres en territoire suisse où il déchargeait sa cargaison pendant que son épouse faisait des courses à Bâle au grand magasin Rheinhafen (Au port du Rhin). En juillet 1942, la propriétaire de ce commerce, Mme Schneider, la pria de demander à son mari de passer au magasin pour récupérer une lettre de son cousin, Otto Fortran, lui aussi batelier, évadé d’Alsace en Zone sud où il travaillait pour des services de renseignement. Il y alla le soir même ; la dame lui demanda d’ouvrir les yeux et les oreilles sur ce qui se passait « de l’autre côté », c’est-à-dire en Allemagne et en Alsace, puis elle le mit en contact avec un agent anglais qu’il rencontra plusieurs fois. En août 1942, il recruta Émile Wendling, puis prit contact avec Joseph-Louis Metzger et, en octobre, avec Charles Lieby. Lucien Jacob fut arrêté le 28 ou le 29 octobre 1942 à Strasbourg en même temps que Lieby. Il fut détenu à la prison d’Offenburg (Bade, Allemagne) jusqu’au transfert du groupe à la prison d’Alt Moabit à Berlin où il arriva le 1er mars 1943. Comme ses camarades, il fut jugé pour espionnage à Berlin les 26 et 27 mai 1943 par le 4e sénat du RKG sous la présidence du juge Biron. Ils furent, tous quatre, condamnés à mort, à la déchéance à vie des droits de citoyen et au paiement d’une somme de 950 RM et 40 francs suisses pour le ou les dénonciateurs. Le jugement fut confirmé le 24 juin par l’amiral Bastian, président du RKG. Le recours en grâce auprès du Führer fut rejeté. Le 27 septembre 1943, les quatre prisonniers furent transférés à la prison de Halle où ils furent guillotinés en fin d’après-midi par le bourreau Ernst Reindel. Le corps de Lucien Jacob fut incinéré le 30 septembre. L’urne fut enterrée au cimetière Sainte-Gertrude le 6 octobre, mais elle disparut lors de bombardements ultérieurs.
Sources

SOURCES : Auguste Gerhards, Morts pour avoir dit non. 14 Alsaciens et Lorrains face à la justice militaire nazie, Strasbourg, 2007, p. 39-66 (avec sa dernière lettre adressée à son frère Paul et à sa sœur Berthe Schenck, qui avait été acquittée par le RKG, mais était internée au camp de Schirmeck). – Auguste Gerhards, Tribunal de Guerre du IIIe Reich, Paris, 2014, p. 317-320.

Léon Strauss

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