Né le 26 février 1885 à Bailleau-le-Pin (Eure-et-Loir), fusillé le 30 mars 1944 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; cultivateur ; maire de Saint-Luperce (Eure-et-Loir) depuis 1929 ; membre du Parti radical et radical socialiste ; résistant dans les FTPF.

Fils de Paul Célestin Dumais, cultivateur, et de Laurence Meneray, institutrice, Maurice Dumais s’était marié le 9 juin 1913 à Argentan (Orne) avec Charlotte Fouchier, institutrice, fille d’un ingénieur, et était domicilié à Saint-Luperce, commune dont il fut élu conseiller municipal en 1919 puis maire en 1929. Il exerçait aussi des responsabilités dans des organismes agricoles. Agriculteur partisan d’une utilisation raisonnée des engrais - parallèlement à sa scolarité de premier cycle, il avait suivi au lycée Marceau de Chartres les cours d’agriculture du professeur Charles-Victor Garola, ingénieur agronome directeur des services agricoles à la préfecture d’Eure-et-Loir -, il était administrateur du Syndicat agricole d’Eure-et-Loir et participait activement aux divers organismes qui en sont issus. Meurtri par la Première Guerre mondiale, républicain, pacifiste, laïque et ami de l’école publique, il adhéra dans l’entre-deux-guerres au parti radical et radical-socialiste en y défendant la tendance de gauche et la tradition jacobine. Il participait à ses côtés aux travaux de la Ligue des Droits de l’Homme et devint administrateur de l’Indépendant d’Eure-et-Loir, dirigé par Maurice Viollette. Il sentit le péril monter contre la paix et menacer la France, en 1934 et 1938 notamment (il avait lu Mein Kampf). Il se fit le militant sans concession de la lutte contre l’oppression, la tyrannie, l’esclavage, pour la défense de son pays et de la démocratie.
En juin 1940, ami du préfet Jean Moulin, il adopte la même attitude digne face à l’occupant. Resté à son poste, il prodigua son aide à la population et aux réfugiés. Il délivra de faux papiers à des prisonniers algériens et à des Juifs, plus de 500 fausses cartes d’identité. En mars 1942, à l’instigation de Georges Léger alias « Paul », responsable départemental, il s’engagea dans les FTPF, organisation armée du Front national de lutte pour la liberté et l’indépendance de la France (FN), mouvement de résistance dirigé par le Parti communiste français (PCF), et prit contact avec le groupe de Courville (Eure-et-Loir). Son domicile de la ferme du Mousseau servit de lieu d’hébergement pour les réfractaires et les résistants. Menacé et un temps réfugié en Zone sud, il regagna Saint-Luperce en janvier 1944.
Or, en décembre 1943 et janvier 1944, les FTPF du secteur furent décimés par la répression de l’occupant et de Vichy (l’inspecteur Denuzières et Le Baube, préfet d’Eure-et-Loir). Maurice Dumais fut arrêté le 20 janvier par la Sipo-SD à la ferme de Mousseau avec deux autres personnes, parmi lesquelles Robert Bougrain, employé de bureau, FTPF, auteur de nombreux sabotages.
Maurice Dumais fut incarcéré à la prison de Chartres (Eure-et-Loir) jusqu’au 11 mars 1944. « Il est odieusement torturé pendant des jours, ses lunettes sont brisées et il ne voit presque plus étant atteint d’une forte myopie » (site Internet Saint-Luperce). Puis il fut transféré à la prison de Fresnes (Seine, Val-de-Marne). Il fut condamné à mort le 15 mai 1944 pour « activité de franc-tireur » par le tribunal militaire de la Feldkommandantur 544, Abt. B de Chartres qui a siégé à la prison de Fresnes. « Face à ses juges, dans une fière et vibrante déclaration, Maurice Dumais prend à sa charge toutes les responsabilités et demande que les jeunes soient épargnés » (site Internet Saint-Luperce). Le tribunal a siégé les 13, 14 et 15 dans une baraque Adrian installée au fond de la cour à Fresnes.
Maurice Dumais fut passé par les armes au fort du Mont-Valérien dans l’après-midi du 30 mars 1944 avec ses camarades FTPF d’Eure-et-Loir : Pierre Bouttier, Roger Calbris, Marcel Cartron, Maurice Cléret, Gilbert Damas, François Dargent, Jean Delorme, Paul Espéret, Albert Gautier, André Gillet, Joseph Girard, Spada Girard, Maurice Honoré, René Le Gall, Bernard Léger, Pierre Martin, Maurice Peltiez, René Rion, Marcel Roblot, Noé Sadorge, Omer Sadorge, Pierre Sadorge, Roger Saget, Jean Saliou, Louis Savouré, Pierre Sédillot, Edmond Signoret, Jules Varin et Clovis Vigny.
Doyen des 31 résistants d’Eure-et-Loir fusillés le 30 mars 1944, doyen des 850 fusillés inhumés au cimetière d’Ivry-sur-Seine (tombe 35, 44ème ligne), son corps fut exhumé et ramené à Chartres le 13 décembre 1944, puis exposé au siège du Syndicat agricole d’Eure-et-Loir, place des Halles. Une garde d’honneur fut assurée par les FFI et l’armée américaine, tandis que les employés du Syndicat agricole et ses amis participaient à la veillée funèbre. Le lendemain, au cours d’obsèques civiles, une foule silencieuse se rassembla pour saluer l’homme de cœur et de conviction, le républicain engagé dans le syndicalisme et la mutualité, l’agriculteur résistant de la première heure qui choisit la lutte active avec ses amis du Front National, l’homme courageux dont l’attitude força l’estime de ses juges allemands, qui menèrent cependant jusqu’au bout leur processus de liquidation. Il fut ainsi accompagné jusqu’au au cimetière Saint-Chéron de Chartres, qui portait encore trace des derniers combats pour la libération de la ville. Six personnalités prirent la parole pour honorer la mémoire de ce martyr de la Résistance. La cérémonie se termina avec l’allocution du commissaire régional de la République venu apporter l’hommage du gouvernement et le salut fraternel du général de Gaulle. Maurice Dumais fut inhumé dans le caveau familial.
Déclaré "Mort pour la France" par le secrétariat général aux Anciens Combattants le 10/04/1945. A servi dans les Forces Françaises de l’Intérieur au titre du secteur sud-ouest d’Eure-et-Loir du mouvement FTPF, homologué pour la période du 01/01/1943 au 30/03/1944 avec le grade de lieutenant, rang du 01/01/1944 (décision du 29/07/1947, arrêté du 28/10/1947, JO du 14/11/1947, page 11244, rectification de son année de naissance par décret du 13/02/1948, JO du 23/02/1948, page 1973). Titre de Combattant Volontaire de la Résistance délivré à titre posthume le 16/09/1954, carte n° 012.752. Titre d’interné résistant délivré le 26/10/1954 pour internement du 20/01/1944 au 30/03/1944, carte n° 1.201.17207. Chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume par décret du 07/11/1958 publié au JO du 03/12/1958. Médaille de la Résistance. Son nom est inscrit sur le monument commémoratif du Mont-Valérien, sur le monument aux Morts de Saint-Luperce et sur celui des anciens élèves du lycée Marceau de Chartres, square Noël-Ballay. Une rue de Saint-Luperce porte son nom. Une plaque commémorative aux Martyrs de la Résistance, située place des Fusillés de la Résistance à Courville-sur-Eure, associe le nom de Maurice Dumais à ceux de Marcel Carton, Raoul Esperet et Roger Saget exécutés le même jour.
Robert Bougrain fut déporté de Compiègne en avril 1944 à Mauthausen, puis à Melk et à Ebensee. Il fut libéré le 6 mai 1945 par les Américains et rentra le 24 mai.
Sources

SOURCES : AVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). — Site Internet Mémoire des Hommes. — Site Internet de l’ARMREL. — Site Internet Saint-Luperce. — Abel Le Boy, "Rapport sur l’affaire des fusillés du 30 mars 1944", publié comme supplément au Bulletin de la Société Archéologique d’Eure-et-Loir, n°85, juillet, août, septembre 2005, Mémoires XXXIV-I. — R. et S. Creuzot, "Souvenirs sur Maurice Dumais", La République du Centre, 28-29-30 mars 1964 PS (Roger Creuzot était l’instituteur-secrétaire de mairie nommé à Saint-Luperce (Eure-et-Loir) en 1938, qui a collaboré de 1938 à 1944 avec le maire Maurice Dumais dont il partageait les vues et est devenu l’ami). — État civil en ligne cote 3 E 021/012, vue 123. — SHD Caen, AVCC, dossier de décès AC 21 P 449949/176463. SHD Vincennes, dossier de résistant GR 16 P 199324. — Arch. Dép. d’Eure-et-Loir : journaux en ligne, L’Indépendant d’Eure-et-Loir des 20/10/1944, 18/11/1944, 8, 14, 18, 20, 21 et 23/12/1944 ; L’Écho républicain de la Beauce et du Perche des 18/11 et 16/12/1944 ; dossier de CVR, cote 1575 W 89. Base Léonore, dossier Légion d’honneur, cote 198000135/620/70335. — Notes importantes de Marie-Thérèse Grangé (dossier de Robert Bougrain, SHD Vincennes : GR 16 P 78561).

Dominique Tantin

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