Née le 31 décembre 1898 à Saint-Remèze (Ardèche), fusillée le 21 avril 1944 à Sanilhac (Ardèche) ; ouvrière brodeuse ; résistante, membre du mouvement Libération-Sud, agente de liaison des réseaux Sabot et Brick-Oudinot, homologuée Résistance intérieure française (RIF) et internée résistante (DIR).

Albertine Maurin
Albertine Maurin
Albertine, Marie, Françoise Maurin était l’aînée d’une famille de cinq enfants. Son père, François Fortuné Maurin, né le 31 décembre 1872 à Salavas (Ardèche), s’était installé dans le village de Saint-Remèze (Ardèche) où il exerçait la profession de tailleur. Il avait épousé en 1898 une native de la localité, Maria, Anne-Rose Augnas, aide-ménagère, née le 19 décembre 1879.
Entrée comme ouvrière-brodeuse à l’âge de quatorze ans dans une petite entreprise (la Broderie du Devès), Albertine fut victime d’un accident durant les années du premier conflit mondial : il lui en resta une légère claudication. Sa jeunesse fut marquée par la mort précoce de son père en 1921. Tout en contribuant à élever ses frère et sœurs, Albertine s’inscrivit à des cours par correspondance et obtint en 1922 un diplôme de sténographie, dactylographie, comptabilité et un certificat d’instruction sténographique. Elle s’installa dans les années qui suivirent à Bourg-Saint-Andéol (Ardèche), ville des bords du Rhône, et ouvrit une boutique de brodeuse-modiste, située au 6 rue Jeanne-d’Arc. L’une des sœurs d’Albertine, Berthe, épousa Joseph Pieri, fils aîné d’une famille d’origine italienne, connue pour son antifascisme et son militantisme socialiste. Le café Pieri, à Bourg-Saint-Andéol, dont le gérant était Pierre Pieri, frère de Joseph, était l’un des principaux lieux de rassemblement pour les militants du Front populaire dans les années qui précédèrent la guerre.
Dans ce café se tint, après la défaite française, en octobre 1940, une réunion autour des textes du général Cochet (à l’origine d’un réseau qui adhéra par la suite au mouvement Libération-Sud puis aux Mouvements unis de Résistance, MUR). Albertine Maurin s’impliqua pleinement dans l’action clandestine de ce mouvement. Pierre Bertrand, responsable des MUR à Aubenas, rapporta plus tard : « Je revois encore cet extraordinaire petit bout de femme qui m’apportait depuis Bourg-Saint-Andéol les journaux clandestins du mouvement. Elle transportait tout cela simplement dans son cabas de ménagère en moleskine. Sous une apparence naïve, quel aplomb ! » (Un fort tirage du journal Libération était alors diffusé à partir de Montélimar où il était imprimé clandestinement).
Un autre témoignage (celui de Jean Gelly, ancien maquisard au Gerbier-des-joncs) atteste du rôle de convoyeuse qu’Albertine Maurin joua en 1943 pour accompagner vers leur planque des réfractaires du Service du travail obligatoire (STO).
Selon l’enquête conduite par Louis-Frédéric Ducros, Albertine Maurin, sous le nom de code « Sarrazin », fut une agente de liaison très active pour le compte de Louis Govers, résistant belge réfugié en Ardèche, principal animateur des réseaux Sabot et Brick Oudinot. Elle se déplaçait en train dans la région pour se rendre à ses lieux de rendez-vous (Saint-Peray, Lyon, Valence, Grenoble).
Sur dénonciation, Albertine Maurin fut arrêtée à son domicile le 12 avril 1944 par des membres de la Sipo-SD et de la division Brandebourg dont un détachement s’était installé à l’hôtel Pottier de Viviers (Ardèche). Sévèrement torturée, elle ne parla pas, fut transférée à la prison-citadelle de Pont-Saint-Esprit (Gard). Extraite de sa cellule le 21 avril 1944, elle était la seule femme d’un convoi de onze otages (dont cinq cheminots du Teil, résistants raflés la veille sur dénonciation). Ils furent conduits à Sanilhac (Ardèche) et fusillés – à l’exception de l’un d’entre eux – sur les lieux où une colonne allemande avait eu plusieurs morts à la suite d’une embuscade tendue par le détachement Salomon (rattaché à la 7 102e compagnie FTP). Le visage tuméfié d’Albertine Maurin portait les marques du calvaire qu’elle avait enduré.
Elle obtint la mention « Morte pour la France » et fut homologuée résistante, membre de la Résistance intérieure française (RIF) et internée résistante (DIR).
Elle fut décorée de la Médaille de la Résistance à titre posthume par décret du 3 août 1946 paru au JO le 13 octobre 1946.
Le 21 juin 1952, Albertine Maurin fut décorée à titre posthume de la Médaille militaire et de la Croix de guerre avec palme. Au cours d’une cérémonie d’hommage, le préfet de l’Ardèche remit à sa nièce, Christiane Reynord, les deux décorations. Une plaque apposée sur la façade de son ancienne boutique à Bourg-Saint-Andéol rappelle le sacrifice d’Albertine Maurin.
Son nom figure sur le monument aux fusillés, à Sanilhac, sur le monument aux morts et le monuments aux victimes de la barbarie nazie, à Bourg-Saint-Andéol.


Voir : Sanilhac (21 avril 1944)
Sources

SOURCES : AVCC, Caen, AC 21 P 514 518 (Base déportés et internés morts, nc). — SHD, Vincennes, GR 16 P 405803 (nc). — Arch. Dép. Rhône et Métropole, Mémorial de l’oppression, 3808 W 223. — A. Demontès, L’Ardèche martyre, Largentière, 1946. – Louis-Frédéric Ducros, Montagnes ardéchoises dans la guerre, t. I, II, III, Valence, 1981. – ANACR, Mémorial de la Résistance en Ardèche, Liénhard, Aubenas, 3e édition, 1994. – La Résistance en Ardèche, CD-ROM AERI, coord. Raoul Galataud, Paris, 2004. – Albertine Maurin, une grande dame de la Résistance, plaquette de 18 pages réalisée par Christiane Reynord-Chalias, nièce d’Albertine Maurin, éditée par les Compagnons du Laoul, 2010. – Correspondance avec Christiane Chalias. — Mémorial GenWeb. — Mémoire des hommes. — État civil, acte de naissance n°25.

Pierre Bonnaud

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