Né le 14 janvier 1924 à Maury (Pyrénées-Orientales), fusillé sommaire (ou explosé ?) le 19 août 1944 à Roullens (Aude) ; réfractaire au STO ; domicilié à Saint-Hippolyte (Pyrénées-Orientales) ; résistant des Pyrénées-Orientales (maquisard FTPF).

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André Torrent, fils de Pierre, Jean, Michel et Carmen, Thérèse, Vincente Solana naquit à Maury. Pierre Torrent, ouvrier agricole était né 29 juin 1891 à Sant Feliu de Guixols (province de Gérone, Catalogne, Espagne), un port de la Costa Brava. Carmen Solana était née le 8 février 1896 à Estamariu (province de Lérida, Catalogne, Espagne), un village pyrénéen du haut Urgell, à proximité de l’Andorre. La famille d’André Torrent s’installa en Salanque, à Saint-Hippolyte, son dernier domicile connu avant son arrestation le 2 août 1944. Il était célibataire. C’était un résistant des Pyrénées-Orientales.
Requis pour le STO, André Torrent quitta son domicile à Saint-Hippolyte pour le maquis. D’après les témoignages connus dans son dossier de la DAVCC, il semble qu’il ait intégré d’abord le maquis de Saint-Marsal (Pyrénées-Orientales) dont certains membres gagnèrent ensuite les environs du col de Jau (commune de Mosset, Pyrénées-Orientales). À Saint-Marsal s’étaient regroupés des maquisards d’obédiences diverses (AS, FTPF, AGE). Une "feuille d’examen" destinée à la commission décidant du statut des déportés et internés indique qu’il faisait partie de la 4103e compagnie de FTPF des Pyrénées-Orientales. Celle-ci groupait à la fois des "légaux" et des maquisards du Conflent. Fernand Cortale, cadre des FTPF, qui n’a pu connaître André Torrent puisque, entre juin et août 1944 il se trouvait à Toulouse (Haute-Garonne), attesta le 7 mars 1949 qu’il était chef de groupe du maquis (AS) de Saint-Marsal qu’il aurait intégré le 27 juin 1944. Cortale fait aussi allusion au grade de caporal auquel il aurait accédé pendant son service militaire à Albi (Tarn). Mais Torrent était bien trop jeune pour avoir été appelé sous les drapeaux en 1940. Le 1er avril 1949, Jean Rostand FTPF des Pyrénées-Orientales, attesta qu’il avait été au maquis de Saint-Marsal. Cortale et Rostand s’accordent pour dire que le 2 août 1944 il s’était rendu à Perpignan afin d’effectuer une mission pour le maquis. C’est également ce que déclara le 6 août 1949 le père d’André Torrent aux gendarmes Joseph Moli et Fernand Estela de la brigade de Saint-Laurent-de-la-Salanque. Pierre Torrent, le père d’André expliqua dans cette même déposition que requis par la STO, son fils avait rejoint le maquis à Mosset. Il ajouta aussi — il avait dû l’apprendre par ailleurs — que son fils après avoir été détenu à la citadelle de Perpignan était parti pour Carcassonne "dans un camion" et qu’il a été fusillé ou brûlé dans les environs de Carcassonne. De ce point de vue, sa déclaration coïncide en tout point avec le témoignage d’André Biaud, de Maureillas (Pyrénées-Orientales), codétenu d’André Torrent, à la citadelle de Perpignan puis à la maison d’arrêt de Carcassonne. Deux habitants de Saint-Hippolyte, Gauthier et Margueritte Conill, nés respectivement le 10 mai et le 25 août 1912, rencontrèrent Torrent près du café Magenta de Perpignan alors qu’il descendait de l’autobus en provenance de Saint-Hippolyte où il s’était rendu afin de rendre visite à ses parents. Des Allemands descendirent d’une automobile et se saisirent d’André Torrent avant de se diriger vers la citadelle (Voir : Citadelle de Perpignan).
André Torrent fut le treizième des dix-neuf fusillés sommaires (les restes de quatorze d’entre eux furent retrouvés) du dépôt de munitions de l’armée allemande d’occupation installé dans le parc du château de Baudrigues (commune de Roullens). Voir : Bringer Jean, Ramond Aimé, Sévajols Maurice. Arrêté à Perpignan le 2 août, il fut emprisonné par les Allemands à la citadelle. Le 17 août 1944, il fut transféré à la maison d’arrêt de Carcassonne (Aude) sous le contrôle de la police allemande. Le voyage s’effectua avec un petit autobus réquisitionné. Parmi les prisonniers de la citadelle de Perpignan qui firent le voyage, nous savons, par le témoignage écrit d’André Biaud (domicilié à Maureillas, Pyrénées-Orientales) qu’il y avait, avec Torrent : André et Dolorès Biaud, Simon Batlle, Maurice Sévajols, Jacques Bronson, René Avignon. Torrent effectua le voyage aux côtés de Jacques Bronson. Le 19 août au matin, des prisonniers, parmi lesquels Torrent, furent amenés en fourgon cellulaire au dépôt de munitions du château de Baudrigues, à six kilomètres au sud de Carcassonne. Ils y furent exécutés à la veille du départ des forces allemandes de Carcassonne. Des témoins ont affirmé que Torrent était blessé lorsqu’il fut transporté de la maison d’arrêt de Carcassonne au dépôt de munitions de Baudrigues. Peut-être s’agissait-t-il de séquelles de tortures subies à Carcassonne évoquées par André Biaud ? En effet, celui-ci, dans son récit de la détention à la citadelle de Perpignan et du transfert par autobus à Carcassonne n’indique pas qu’il ait blessé avant le 19 août 1944.
D’après un témoignage tardif recueilli dans les années 1990 et rapporté par Roger Lair, Claude Rivals et André Roou, (op. cit., 1995, pp. 107-108) d’André Biaud, agent d’un réseau de passages vers l’Espagne résidant à Maureillas (Pyrénées-Orientales) et emprisonné à Carcassonne, Torrent fut l’un des compagnons de cellule d’Aimé Ramond avant d’être mis à mort avec lui. André Biaud écrivit trois lettres au ministre des Anciens combattants et victimes de guerre (16 janvier, 4 avril et 23 avril 1996) afin de faire reconnaître que Torrent avait été exécuté à Baudrigues. On lui répondit qu’un jugement avait établi qu’il avait été déporté en Allemagne où il était mort. Un bordereau annexé à une lettre indique que l’ONAC de Carcassonne, contacté, allait s’adresser à Julien Allaux (correspondant départemental du comité d’Histoire de la seconde Guerre mondiale), l’historien le mieux informé des exécutions de Baudrigues.
André Torrent dont le corps avait été déchiqueté par l’explosion de stocks considérables de munitions, fut donc identifié grâce aux travaux de Julien Allaux bien après la Libération de Carcassonne et des communes voisines (20 août 1944).
Après la guerre, un acte de disparition du 5 octobre 1949 indiqua qu’il fut interné à la citadelle de Perpignan avant d’être déporté. Un jugement du tribunal de grande instance de Perpignan du 8 juin 1950 déclara qu’André Torrent était mort en Allemagne, sans indication précise de lieu, le 1er septembre 1944. Le maire de la commune l’inscrivit donc dans le registre de l’état civil communal avec la mention "mort pour la France". Son nom figure, avec cette date de décès, dans le tome II b du livre de Ramon Gual et Jean Larrieu (op. cit., 1998, p. 1053) sur la liste qu’ils ont publiée de résistants déportés des Pyrénées-Orientales morts en déportation. Il fut déclaré déporté résistant le 9 juin 1955 (interné à la citadelle de Perpignan du 2 au 14 août 1944 et déporté du 15 août au 1er septembre 1944., ces deux dates non vérifiées étant bien entendu fictives. Son nom n’apparait pas sur le site de la FMD.
De fait, André Torrent fut exécuté à Baudrigues comme l’ont montré les derniers travaux non publiés de Julien Allaux (1994). Le 6 février 2002, sans tenir compte de ces travaux, et de ce que montrent les divers documents d’archives (Voir Sources), la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la Défense notifia au maire de Saint-Hippolyte la décision d’inscrire en marge de son acte de décès la mention de "mort en déportation". La notification du jugement délibératif du tribunal de grande instance de Perpignan du 8 juin 1950 est mentionné également en marge de l’acte de naissance d’André Torrent sur le registre de l’état civil de Maury. André Torrent fut homologué sergent des FFI. Le nom d’André Torrent figure sur le monument aux morts de Saint-Hippolyte.
Voir Lieu d’exécution de Roullens (Aude), château et dépôt de munitions de Baudrigues.
Sources

SOURCE : DAVCC, Caen, dossier André Torrent. — Arch. dép. Aude, 107 W 633. — Arch. dép. Aude, 3 J 2871, fonds Jacques Bronson, témoignage manuscrit d’André Biaud (de Maureillas), s. d., 8 p. (de Perpignan à Carcassonne, 15-19 août 1944). — Arch. com. de Saint-Hippolyte, état civil transcription de l’acte de décès d’André Torrent et mentions marginales. — Arch. com. de Maury, état civil, acte de naissance d’André Torrent et mentions marginales. — Jean-Louis H Bonnet, "La Libération de Carcassonne d’après les témoins (19 et 20 août 1944), Mémoires de l’Académie des Arts et sciences de Carcassonne, années 2012-2015, 6e série, tome IV, volume 55, pp. 139-177. — Roger Lair, Claude Rivals, André Roou, Aimé Ramond. De Montgeard à Carcassonne, itinéraire d’un policier résistant, préface de Julien Allaux, Montgeard, Amicale culturelle, cercle d’histoire Aimé Ramond, 1995, 137 p. [en particulier, les pp. 108 et 119-121]. — Jean Larrieu, et Ramon Gual, Vichy, l’occupation nazie et la Résistance catalane, II b, De la Résistance à la Libération, Prades, Terra Nostra, 1994, p.1053. — « Baudrigues, vision d’horreur », 14 août 2013, Musique et patrimoine de Carcassonne, http://musiqueetpatrimoine.blogs.lindependant.com/archive/2013/08/14/20-aout-1944-baudrigues-vision-d-horreur-176357.html, blog d’informations sur la culture, l’histoire et le patrimoine de Carcassonne, consulté le 6 mars 2014.

André Balent

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