Né le 27 novembre 1922 à la Tour-du-Pin (Isère), exécuté sommairement le 17 août 1944 à Sainte-Radegonde (Aveyron) ; ouvrier de la chaussure ; réfractaire du STO ; résistant de l’Aveyron (AS) ; responsable de groupes francs du Sud-Aveyron ; a été membre du maquis AS Paul-Clé

Archives d’Hervé Mollard, neveu d’Albert Thévenon "> Albert Thévenon lorsqu'il était membre de "Jeunesse et montagne"
Albert Thévenon lorsqu’il était membre de "Jeunesse et montagne"
Archives d’Hervé Mollard, neveu d’Albert Thévenon
Albert Thévenon au Bouscalous (Aveyron), avril 1944, avec des membres de son groupe franc
Albert Thévenon au Bouscalous (Aveyron), avril 1944, avec des membres de son groupe franc
Cliché pris par des villageois aveyronnais avec l’appareil photographique d’Albert Thévenon. Archives d’Hervé Mollard, neveu d’Albert Thévenon ;
De gauche à droite : René Delaire*,Max Gagnoud, Jean Ferrand, Albert Thévenon, François Mauron*
Fils de Jean Pierre Thévenon, employé de soieries, et de Rosalie Béjuy, tisseuse, Albert Thévenon, ouvrier de la chaussure à l’usine Clerget avait accédé aux fonctions de contremaître.
Réfractaire au STO il se replia dans l’Aveyron après avoir quitté La Tour-du-Pin le 9 mars 1943. Il se réfugia avec d’autres réfractaires au STO comme lui — avec Jean Ferrand et Max Gagnoud, ouvriers de la chaussure de La Tour-du-Pin — d’abord à Tendigues près de Roquefort-sur-Soulzon (Aveyron), puis à La Couvertoirade (Aveyron), sur le plateau du Larzac, à la limite de l’Hérault. Par la suite, à partir du 12 juin 1943, ils trouvèrent un abri dans une cabane du plateau du Guilhaumard (Aveyron), près du Caylar (Hérault), dans la partie méridionale du causse du Larzac. Ils gagnèrent ensuite Salmanac, (commune de Vabres-l’Abbaye, près de Saint-Affrique, Aveyron), Saint-Beaulize (Aveyron) et Poulguières, sur les hauteurs dominant la retenue du barrage de Pinet (commune de Viala-du-Tarn, Aveyron), sur la rive droite du Tarn. En contact avec l’AS du Sud-Aveyron, Thévenon intégra le petit maquis d’accueil et d’orientation du Monna créé près de Millau (Aveyron) en novembre 1942. Il obtint la confiance du chef départemental de l’AS de l’Aveyron, Léon Freychet (né à Nîmes, Gard, en 1893), directeur des caves de Roquefort.
Thévenon devint le responsable de groupes francs actifs dans le Sud-Aveyron. Lui-même était à la tête d’un commando qui menait des opérations contre la Milice et se livrait à des sabotages.
Informé par le NAP de Rodez, son commando enleva, le 28 janvier 1944, un ingénieur électricien de Saint-Affrique, dénonciateur de la résistance auprès du SD ruthénois. Après un "conseil de guerre" présidé par Léon Freychet, il fut condamné à mort et exécuté dans une grotte par le commando de Thévenon près de Saint-Beaulize. (Aveyron). Avec son commando de six hommes, Thévenon abattit, le 10 mars 1944, à la mitraillette, dans son officine, un pharmacien, Laurens, chef de la Milice de Saint-Affrique. Thévenon et Delaire s’étaient introduits dans la pharmacie, les quatre autres membres du commando assurant la couverture. Entre le 10 et le 14 mars, le commando de Thévenon sabota six pylones à haute tension dans la vallée du Tarn, entre le Truel et Saint-Victor-et-Melvieu. Albert Thévenon et ses hommes échappèrent une première fois à la répression près du Soucaillou, en mars 1944 : l’intendant régional de police de Montpellier, Pierre Marty accompagné de vingt-quatre GMR, de cinq inspecteurs et de Karl Mahren, du SD de Montpellier, investirent le 21 mars 1944 la maison de Pinet occupée par des éléments de l’AS. Avant son arrestation l’ingénieur Pierre Subsol put prévenir Thévenon et ses hommes qui s’échappèrent.
Le groupe franc, un commando dont l’effectif s’était accru de trois nouveaux membres (neuf hommes, donc) menacé par la répression, décida de se cacher provisoirement dans un maquis. Par Broquiès, ils arrivèrent à Mounes-Prohencoux. Ce maquis AS commandé par Thévenon s’implanta donc à partir de la nuit du 31 mars au 1er avril 1944 au Bouscalous (commune de Mounes-Prohencoux).
Le 6 mai 1944 le maquis du Bouscalous dont la localisation approximative avait fini par être connue des autorités de Vichy fut attaqué par par une compagnie de cent-quarante hommes de la compagnie GMR "Bitterois". Celle-ci arrivée dans la commune voisine de Belmont-sur-Rance fut informée de son emplacement exact. N’ayant pu être alerté, les maquisards (au nombre de sept ce jour-là sur les neuf du groupe — Max Gagnoud, de la Tour-du-Pin comme Thévenon, était allé chercher du lait au mas d’Albespy et Delaire malade était aussi au mas d’Albespy — étant absents ce jour-là) furent surpris.
François Mauron, ajusteur à Montpellier, blessé aux bras et aux jambes par balle explosive fut fait prisonnier par les GMR. Il mourut le lendemain, faute de soins, à l’hôpital de Béziers. Cinq autres furent internés à Béziers puis à l’intendance régionale de police de Montpellier (Hérault) et à la prison Saint-Michel de Toulouse (Haute-Garonne). Ils furent déportés à Buchenwald (Jean Ferrand, Ricardo Frangi, Barnabé Ortega, Marcel Jouffray, Roger Soulier, un étudiant de la Haute-Loire) : trois (Frangi ; Ferrand et Ortega) y moururent ; Jouffray et Soulier purent revenir ; Jouffray mourut en 1963 des séquelles de sa déportation.Thévenon put s’enfuir.
Thévenon a écrit des carnets (1943-1944). Le 6 mai au soir, il relata l’attaque de la matinée dans ces termes : "Journée bien triste. le matin à huit heures trente nous avons été attaqués par plus de cent salauds boches, miliciens, GMR — armés d’une façon formidable et si , à l’heure actuelle, j’ai le bonheur d’écrire ces lignes, je le dois à la grâce de Dieu ! Je suis le seul rescapé de cette ignoble action. Il y a quatre prisonniers. Qui exactement ? On ne le sait pas, car il y a un disparu et un blessé, le pauvre François Mauron touché à dix mètres de moi par les balles dum-sum (...). Pourquoi ne suis-je pas touché ? Je m’attends à m’écrouler d’une seconde à l’autre (...) Après une marche exténuante, j’arrive au sommet de la crête et, je le crois, je tiens mon salut. Je me replie dans une ferme, et de là, avec de braves gens nous nous remettons en route pour connaître le désastre".
Quelques jours plus tard, Thévenon, Gagnoud et Delaire, rescapés du Bouscalous se retrouvèrent avec quinze autres fugitifs à la Sabaterie (commune de Saint-Affrique, Aveyron). Après avoir échappé à une attaque de la gendarmerie, le 20 mai, ces rescapés décidèrent, avec l’AS, de former un grand maquis, le maquis Paul-Claie (ou Paul-Clé) qui regrouperait les petits maquis du Sud-Aveyron. Il se déploya autour de trois fermes au nord de Saint-Affrique et se déplaça plus tard près de Sylvanès (Aveyron)
Thévenon fut arrêté avec Delaire le 15 juin à l’hôtel Montrozier de Saint-Victor-et-Melvieu localité du Sud-Aveyron, lors d’une importante réunion des chefs de l’AS (Armée secrète). Jean Birebent, instituteur chef départemental de l’AS de l’Aveyron (qui avait remplacé Freychet, arrêté et déporté), Delaire et Thévenon furent également arrêtés par les Allemands qui, informés, avaient encerclé l’hôtel. Le Montpelliérain Raymond Chauliac, chef de l’état major régional également présent à la réunion, put s’enfuir à temps. Thévenon et Delaire furent transférés à la caserne Burloup, prison de la Sipo-SD. Il en furent extraits le 17 août et furent exécutés avec vingt-huit autres prisonniers au champ de tir de Sainte-Radegonde (Aveyron). Au moment de leur exécution, les fusillés de Sainte-Radegonde étaient liés par deux par des fils électriques. Thévenon et Delaire étaient alors attachés ensemble.
Le commandant des GMR qui attaqua le maquis le 6 mai 1944 fut reconnu par le sergent Norman du maquis AS aveyronnais Paul-Claie. Jugé par la cour de justice de Montpellier (Hérault) les 8 et 9 mai 1946, il fut condamné à vingt ans de travaux forcés et libéré après trois ans.
À la Tour-du-Pin, un groupe scolaire et une rue portent les noms d’Albert Thévenon et de Jean Ferrand. Le nom d’Albert Thévenon figure sur le monument aux morts de la Tour-du-Pin et sur le monument mémorial de Sainte-Radegonde. Il a été déclaré mort pour la France.
Voir : Lieu d’exécution de Sainte-Radegonde (Aveyron) champ de tir
Sources

SOURCES : AVCC, 21 P 273798 (dossier d’Interné résistant et de mort pour la France). — Arch. ANACR Aveyron, carnets 1943-1944 d’Albert Thévenon. — Gérard Bouladou, Les maquis du Massif Central méridional 1943-1944 (Ardèche, Aude, Aveyron, Gard, Hérault, Lozère, Tarn), Nîmes, Lacour, 2006, 617 p. [pp. 449-451 ;pp..453]. — Christian Font, Henri Moizet, L’Aveyron et les Aveyronnais dans la 2e guerre mondiale, Rodez et Toulouse, CDDP Rodez, DDIHP Aveyron, CRDP Midi Pyrénées, 1995, 226 p. [pp. 191-192]. — Christian Font, Henri Moizet, Maquis et combats en Aveyron. Opinion publique et Résistance. Chronologie 1936-1945, Rodez & Toulouse, ONAC Aveyron, ANACR Aveyron, CRDP Midi-Pyrénées, 2e édition, 2001, 412 p. [pp. 187-188, p. 270, pp. 240-241]. — Christian Font, Henri Moizet, Construire l’histoire de la Résistance. Aveyron 1944, Rodez & Toulouse, CDDP Rodez, CDHIP Rodez, CRDP Midi-Pyrénées, 1997, 343 p. [p. 73, 77, pp. 115-119, p. 208, p. 229]. — Sites Aveyron résistance et MemorialGenWeb consultés (André Balent) le 26 février 2016. — Renseignements communiqués (à Claude Pennetier) par son cousin Hervé Mollard. — Notes de Claude Pennetier. — Courriels d’Hervé Molllard (à André Balent), 12 et 25 avril 2016, 29 mai 2016. — Entretien téléphonique entre Hervé Mollard et André Balent, 23 avril 2016. — État civil de Rodez, acte de décès.

André Balent

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