Né le 18 juin 1905 à Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), fusillé après condamnation à mort le 21 août 1944 à Heilbronn (Bade-Wurtemberg) ; officier supérieur des transmissions ; résistant « pluri-appartenant » : Super-Nap PTT, réseau SR Alliance.

Gabriel Romon
Gabriel Romon
Gabriel Romon capitaine au 38e Régiment du Génie (Sapeurs-télégraphistes) à Montargis en 1938,
Cliché fourni par François Romon, son fils.
Plaque à la mémoire de Gabriel Romon au 86 route de Thiers à SaintYorre
Plaque à la mémoire de Gabriel Romon au 86 route de Thiers à SaintYorre
Archives privées de la famille Romon.
Livre de son fils, François Romon
Gabriel Romon était le fils de Louis Joseph Prisca Romon, instituteur, âgé de 24 ans et de Gabrielle Irma Constance Lemaitre, sans profession, âgée de 24 ans également. Ils se maria le 5 août 1930 à Nancy (Meurthe-et-Moselle), avec Denise Sivot dont il eut 3 fils.
Il perdit son père à l’âge de 11 ans et obtint de ce fait une bourse pour effectuer ses études au lycée Faidherbe, à Lille. Il entra ensuite à l’École Polytechnique en 1925 puis en octobre 1927 à l’École supérieure et d’application du Génie à Versailles. Il fut nommé lieutenant au 18ème Régiment du Génie à Nancy en 1929 puis au 19e Régiment du Génie, à Hussein Dey (Algérie) en 1931. Il entra à l’École supérieure d’électricité (section Radio), à Paris en septembre 1932 tout en appartenant à l’Établissement central du matériel de la radiotélégraphie militaire (ECMR). Promu capitaine en 1933, Gabriel Romon fut nommé en juillet 1935 à l’État-major des armées (EMA) puis exerça un commandement au 38e Régiment du Génie à Montargis (Loiret).
A la déclaration de guerre, le 3 septembre 1939 le capitaine Romon fut mobilisé à l’état-major du général George, commandant en chef du Front Nord-est.
Lorsque l’armistice fut signé, Gabriel Romon fit immédiatement le choix de résister, comme en témoignent les courriers à son épouse. Le 28 juin 1940, il fut nommé commandant du Groupement des unités d’écoute et de radiogoniométrie (GUER) et le 10 août 1940 directeur technique du Groupement de contrôles radioélectriques (GCR) et en même temps de son principal centre d’écoutes, au château des Cours, à Hauterive (Allier), sous les ordres du commandant Paul Labat. Le GCR travaillait en réalité pour le 2ème Bureau français et le MI 6, le "Secret Intelligence Service" (SIS) britannique, auxquels il transmettait ainsi des informations importantes. En décembre 1940, le ministère de la Défense créait le CSTTE (Cadre spécial temporaire des transmissions de l’État) destiné à accueillir les officiers des transmissions pour les soustraire de l’armée d’armistice. C’est ainsi qu’en avril 1941, six officiers des Transmissions dont Gabriel Romon et Paul Labat furent mutés ingénieurs civils des PTT, et rattachés au Secrétariat d’État aux Communications, afin de masquer leur activité et de les faire échapper au contrôle de la Commission d’armistice.
Gabriel Romon fut promu chef de bataillon le 25 septembre 1942 et nommé commandant des transmissions de l’Armée Secrète (AS) en mars 1943. Il devint également agent du réseau Super-NAP en tant que responsable du secteur radio. En même temps il créa un groupe clandestin d’opérateurs radio, le Service des transmissions nationales (STN) qu’il mit à disposition du réseau "Alliance", dont il devint le responsable radio sous le pseudonyme de "Cygne". Il participa au recrutement et à la formation d’agents émetteurs radio pour le réseau et à la constitution de dépôts clandestins de matériel militaire.
Depuis l’invasion de la zone libre le 11 novembre 1942, la situation était devenue de plus en plus risquée et en juillet 1943 à la suite de l’arrestation par la Gestapo de plusieurs collègues, Gabriel Romon et Paul Labat furent mutés à Paris pour les écarter du danger : Gabriel Romon devint directeur des Services techniques de la TSF des PTT. Il s’engagea encore davantage dans la Résistance et fut activement recherché par la Gestapo. Revenu passer quelques jours en famille, il fut arrêté par cette dernière à son domicile à Saint-Yorre (Allier), le 12 décembre 1943.
Le commandant Romon fut interné à la prison de Vichy où il fut interrogé par le SD local et le 18 janvier 1944 à "La Mal Coiffée", prison militaire allemande de Moulins (Allier) puis transféré le 1er février 1944 à celle de Fresnes (Seine, Val-de-Marne). Interrogé par le SD de la rue des Saussaies et par l’Abwehrstelle (AST), le Service de renseignements de l’armée allemande, du 82 avenue Foch, soupçonné d’appartenir au réseau Alliance, il fut conduit le 15 février à la prison de Strasbourg et interrogé par l’AST de Strasbourg, spécialisée dans la répression du réseau Alliance4. Le 1er mars1944 il fut transféré à la prison de Kehl (Bade-Wurtemberg). Le 7 mars 1944 le dossier d’accusation d’espionnage fut instruit par la Gestapo de Strasbourg dans le cadre des affaires n°97 concernant Gabriel Romon, F. Rodney, Jean Portenart, Jacques Bonnetain, Jean-Marie Caprais, Lucien Julia et Adrien Le Moine et transmis au Tribunal de guerre du Reich qui y apposa les tampons « Geheim » (secret) et « Haftsache » (affaire concernant des détenus) ainsi que la mention « NN » ("Nacht und Nebel"-"Nuit et Brouillard"). Gabriel Romon fut incarcéré le 27 avril 1944 à la prison de Freiburg-im-Brisgau (Bade-Wurtemberg) dans l’attente du jugement.
Le 15 juin 1944, il comparut ainsi que Jean-Marie Caprais, Lucien Julia et Adrien Le Moine, devant le 3e Senat du Tribunal de Guerre de Freiburg-im-Brisgau, présidé par le juge Karl Schmauser, qui les condamna à mort pour espionnage au profit d’une puissance ennemie. Le 27 juin ils furent transférés à la prison de Schwäbbisch Hall (Bade-Wurtemberg). Ce n’est que le 20 août qu’ils furent informés du verdict, à savoir : « condamnation à mort par fusillade ».
Le lendemain 21 août, Gabriel Romon et ses compagnons furent conduits à la caserne Schlieffen, à Heilbronn (Bade-Wurtemberg). Ils furent fusillés par groupes de huit au champ de tir d’Heilbronn après avoir reçu l’assistance d’un prêtre, mais en refusant d’avoir les yeux bandés. Ils moururent courageusement en criant "Vive la France". Le dernier vœu des 24 condamnés « d’être enterrés en France » fut exaucé par le réseau "Alliance" qui rapatriera les corps en juin 1947, à Strasbourg.
Les obsèques de Gabriel Romon eurent lieu le 27 décembre 1947 en l’Église Saint-Louis des Invalides, à Paris. Il repose aujourd’hui dans le caveau familial du cimetière communal d’Aubervilliers.
Gabriel Romon obtint la mention "Mort pour la France" le 18 avril 1946 et "Mort en déportation" par arrêté du 1er avril 1998. Il fut promu lieutenant-colonel à titre posthume, décoré de la Médaille de la Résistance et fait chevalier de la Légion d’honneur.
Une rue de Saint-Yorre (Allier) porte son nom depuis le 12 mai 1946 et une avenue de Montargis (Loiret) celui des colonels Mesnier et Romon depuis le 25 juin 1946.
A Paris, son nom figure sur le monument commémoratif de l’École Polytechnique et sur la plaque mémorielle des 56 martyrs de a Résistance des transmissions à l’Hôtel des Invalides. A Rennes, le nouveau centre des transmissions de la Direction interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information de la Défense nationale DIRISI, inauguré le 22 mai 2014, porte le nom de "Lieutenant colonel Gabriel Romon".
En Allemagne,en août 2010 la municipalité d’Heilbronn fit installer vingt-quatre Stolpersteine (pavés) à même le sol du champ de tir de la Köpfer Tal portant les noms des 24 membres d’Alliance fusillés le 21 août 1944 dont six des transmissions GCR ou STN.Pour le 70e anniversaire, elle organisa une cérémonie en présence des familles et demanda leur pardon. Le 19 août 2016, elle inaugura la pose d’une plaque explicative installée en surplomb des pavés.
Sources

SOURCES : Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation de l’Allier (AFMD). — Biographie du commandant Romon par le colonel M. Leschi dans La Revue des Transmissions N° 5 octobre 1946. — Biographie de Gabriel Romon par son fils François Romon. — Marie-Madeleine Fourcade L’Arche de ¨Noé éd. Plon, Paris 1989. — Auguste Gerhards Tribunal du IIIe Reich, éd. Le cherche midi, Paris 2014. — Livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation éd. Tirésias 2004. — Mémorial de l’Alliance, 1948. — Archives Départementales de l’Allier, Archives Municipales de Saint-Yorre, Archives familiales. — Mémorial GenWeb. — Wikipédia Réseau Alliance et biographie du colonel Romon. —François Romon, Les écoutes radio dans le Résistance française 1940-1945 nouveau monde éditions, 2017 . — État civil.

Jean-Louis Ponnavoy, François Romon

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