Né le 14 avril 1918 à Villeurbanne (Rhône), fusillé sommairement le 12 juin 1944 à Neuville-sur-Saône (Rhône) ; agent d’assurance et aviateur ; officier d’état-major de l’Armée secrète (AS) de la région R1.

Maurice Picot était le fils de Louis Charles et Claudine Garin. Il naquit et vécut sa jeunesse dans la maison familiale située chemin de la Rize (aujourd’hui au 7 rue Louis Braille) à Villeurbanne (Rhône). Le père et l’oncle de Maurice Picot dirigeaient une usine de teinture et d’apprêt sur tissu située aux actuels numéros 11 et 13 de la rue Louis Braille. Le 24 avril 1937, Maurice Picot s’engagea dans l’armée de l’air. Il fut incorporé le 26 avril dans le bataillon de l’air 105 pour servir en qualité d’élève-pilote. Il intégra l’École civile de pilotage d’Aulnat (Puy-de-Dôme). Il fut nommé caporal le 16 novembre 1937 puis caporal-chef le 8 février 1938 et fut affecté à la Base aérienne du Maroc. Une photographie atteste que Maurice Picot était au « camp de Rabat » (Maroc) en avril 1939. Démobilisé après l’Armistice de 1940, il revint alors au 7 de la rue Louis Braille où il continua à vivre après son mariage avec Emilie Tranchard le 2 février 1942. Il exerça la profession d’agent d’assurance à la Compagnie « La Mondiale », avenue de Saxe à Lyon (Rhône). Son fils naquit le 7 janvier 1943.
Maurice Picot s’engagea dans l’AS en janvier 1943. Il fut agent de liaison dans un groupe sous les ordres du commandant Germain. Après la constitution de l’Armée secrète unifiée (ASU) en octobre 1943, Maurice Picot (alias Loustal) devint l’adjoint de « Solier », chef du 4e Bureau (matérel) de l’état-major régional de R1 sous les ordres du colonel Descours, chef d’état-major du colonel Chambonnet. Il prit ensuite la tête du 4e Bureau de l’état-major. Au début de l’année 1944, il hébergea l’état-major itinérant de Chambonnet au 7 rue Louis Braille. Certains documents attestent également qu’il fut membre du groupe AS de Chabert (René Bousquet). Son épouse, Emilie Picot, était également résistante.
Le 21 mars 1944, la Gestapo arrêta Maurice Picot et sa femme à leur domicile à Villeurbanne. D’après Madeleine Picot, la tante de Maurice : entre 8 et 9 heures du matin, quatre hommes en civil se présentèrent à la porte de l’immeuble, « c’est moi qui ai ouvert à leur appel de la sonnerie. Sans me dire quoi que ce soit ils ont pénétré dans la maison où ils ont rencontré mon neveu Maurice Picot, qu’ils ont mis en état d’arrestation. Après [avoir] fouillé son appartement, ils l’ont emmené ainsi que son épouse ». Le fils du couple Picot, âgé d’un an, fut confié aux tantes domiciliées à l’étage en dessous. Maurice et Émilie Picot furent incarcérés à la prison de Montluc (Lyon). Les soldats allemands retournèrent le jour même au 7 rue Louis Braille. Ils arrêtèrent Joseph Picot, le frère de Maurice, et l’emprisonnèrent à Montluc, Joseph Picot croisa Maurice Picot à deux reprises. La première fois, par hasard, dans les lavabos de Montluc. Il se retrouva face à un homme affaibli par la torture. La seconde fois, dans une cave de l’École de santé militaire, avenue Berthelot, où il fut conduit par erreur, victime de l’homonymie avec son frère. Maurice Picot était « dans un état pitoyable, affamé, le visage et le corps tuméfiés ». Emilie Picot fut transférée à Romainville le 19 mai et libérée le 3 juillet 1944. Joseph Picot fut relâché le 6 avril 1944. A Montluc, Maurice Picot fut emprisonné dans les cellules 128 et 75. Pendant son incarcération, il réussit à griffonner un message à l’intention de sa femme puis il le cacha dans l’encoignure d’une fenêtre. Plus tard, son épouse trouva de menus morceaux de papier finement déchirés et pliés dans une enveloppe glissée dans sa boîte aux lettres. Un message qu’elle conserva « au nom de l’amour, et aussi au nom de la reconnaissance vis-à-vis de l’homme, anonyme, qui avait pris de mortels risques pour transmettre le mot. »
Le 12 juin 1944, vers 18h, Maurice Picot et vingt-deux autres prisonniers furent extraits de la prison de Montluc. Sous prétexte de les échanger contre d’autres détenus, les Allemands les entassèrent dans une camionnette, menottés deux par deux. Quatre soldats armés prirent place à l’arrière du véhicule pour les surveiller. Des hommes en civil et en uniforme, dont un agent français de la Gestapo, montèrent dans trois voitures. On imposa le silence aux prisonniers. Le convoi sortit de Lyon et s’arrêta vers 18h45 à Neuville-sur-Saône (Rhône), devant une carrière située sur la route de Civrieux (Ain), à 3 km environ du centre. Onze détenus furent jetés hors de la camionnette à coups de pied et de poing. Ils furent détachés et menés à 200 mètres de distance, dans un lieu isolé situé Montée du Parc (nommée anciennement Montée de la Chaumière). Ils durent se coucher à plat ventre dans un sentier. Vers 19h40, le peloton d’exécution formé d’une dizaine d’hommes tira des rafales de mitraillettes. Puis, les victimes reçurent le coup de grâce. Vint ensuite le tour des douze autres prisonniers. Ils furent conduits dans un pré, à peu de distance, et furent exécutés selon les mêmes modalités. Deux hommes du premier groupe furent blessés. L’un d’eux décéda dans la nuit à l’hôpital de Neuville-sur-Saône, l’autre, seul rescapé, se réfugia dans une ferme. Les corps furent découverts le soir même par les autorités locales. Le 13 juin, les vingt-deux victimes furent numérotées, photographiées et inhumées dans le cimetière de Neuville-sur-Saône. Maurice Picot fut inhumé dans la tombe n°10.
Les membres de sa famille identifièrent son corps le 29 septembre 1944. Il fut ensuite inhumé à Lyon Guillotière (VIIe arr.).
La mention de « Mort pour la France » fut transcrite sur son acte de décès en 1946. Il reçut la Croix de guerre avec une citation à l’ordre de l’armée et une citation à l’ordre de la division : « A été cité l’officier Picot Maurice Groupe Chabert – Rhône […] Officier d’état-major de l’AS a fait preuve de courage et d’abnégation. Malgré les tortures infligées n’a pas failli à sa mission. Exemple de sang-froid. Est mort fusillé par l’ennemi le 12 juin 1944 ». Il fut homologué lieutenant FFI. En hommage à Maurice Picot, une plaque commémorative, située au 7 rue Louis Braille, fut inaugurée le 2 novembre 1947 par Edouard Herriot, maire de Lyon, et Lazare Goujon, maire de Villeurbanne. Les autorités remirent à son fils la Médaille de la Résistance qui lui était destinée. Le titre d’interné résistant lui fut attribué en 1955. Il fut nommé chevalier de la Légion d’Honneur en 1958. Le 21 avril 1995, son nom fut donné à une promotion de l’École de l’Air de Salon de Provence.
Sources

SOURCES : DAVCC, Caen, dossier de Maurice Jean Picot.— Arch. Dép. Rhône, 3335W22, 3335W8, 1RP3114, 3460W3, 3808W1078, 3335W27, 3335W13.— CHRD, Lyon, art. 1606, ar. 1816 (dossier de René Louis Delorieux).— Base Léonore.— Marcel Ruby, Résistance et Contre-Résistance à Lyon et en Rhône-Alpes, 1995.— Marielle Larriaga, Le Veilleur de pierre, une enfance lyonnaise sous l’occupation, 2004.

Jean-Sébastien Chorin

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