Né le 26 septembre 1904 à Krautergersheim (Bas-Rhin), massacré le 17 août 1944 à Bron (Rhône) ; boucher, marchand de tissus ; victime civile.

BLOCH Virgile
BLOCH Virgile
Arch. Dép. Rhône, 540W35
Virgile Bloch était le fils d’Abraham et de Pauline Kirch (Kirsch). Avant-guerre, il demeurait à Schirroffen (Bas-Rhin). Il était boucher.
Virgile Bloch fut mobilisé en 1939. Fait prisonnier en 1940, il fut interné dans le stalag VIIIC jusqu’en 1941. Libéré ou évadé, il se réfugia à Villeurbanne (Rhône) où il demeura 3 avenue de l’Hôtel de Ville. Le 26 mars 1942, il se maria avec Jeanne Metzger à Lyon (VIe arr., Rhône). Le même jour, Il se fit délivrer un carnet d’identité de forain par la préfecture du Rhône afin d’exercer le métier de marchand ambulant de tissus. Virgile et Jeanne Bloch s’installèrent 12 chemin du Gabugy (Villeurbanne). Leur fils Robert naquit le 2 octobre 1943 à Villeurbanne.
Le 12 août 1944, Virgile Bloch fut arrêté à son domicile par la Gestapo. Il fut conduit à la prison de Montluc et incarcéré dans la « baraque aux Juifs ». En 1983, Jeanne Bloch fit le récit des circonstances de son arrestation : « […] nous résidions à Villeurbanne, 11 chemin du Gabugy, dans une petite maison avec jardin dont nous étions locataires. […] Le 12 août 1944, je me trouvais à l’intérieur de la maison et mon mari était dehors, lorsque j’ai entendu parler allemand. Étant alsacienne je comprends la langue allemande et j’ai entendu les gens qui interrogeaient mon mari lui demander après sa femme et son enfant. Lui leur a dit que je n’étais pas là. En entendant cela d’ailleurs j’avais donné un tour de clé à la porte et j’ai fui par l’arrière de la maison. Une voisine [...] m’a cachée chez elle avec mon enfant, pendant une demie heure environ. Ensuite elle m’a expliqué que je ne pouvais rester là, car si on me découvrait chez elle, non seulement je serais arrêtée mais elle aussi. Elle est allée dans la rue regarder s’il se passait encore quelque chose et quand cela a été calme je suis partie avec mon enfant de 10 mois dans les bras par le tramway pour me rendre chez mes parents qui habitaient Vénissieux, place Moulin à Vent. D’après ce que l’on m’a dit, c’est la Gestapo qui a arrêté mon mari car elle faisait une rafle dans le quartier. Ils l’ont emmené de l’autre côté de la rue chez la concierge des immeubles […] et là ils l’ont battu jusqu’au sang, en demandant " où est ta femme, où est ton gosse ? " J’ai appris qu’un polonais avait été arrêté en même temps que mon mari dans la même rue. Je me suis demandé et je me demande toujours si ce n’est pas cet homme qui a dénoncé mon mari, car, s’il n’avait pas été dénoncé la Gestapo n’aurait pas pu savoir qu’il avait une femme et un enfant. Après cette arrestation je ne pouvais rien faire pour avoir des nouvelles de mon mari car cela était beaucoup trop dangereux. Je ne pouvais plus non plus retourner à la maison où nous habitions. J’ai constaté à la Libération en septembre, lorsque nous avons pu circuler à nouveau, que tout le stock de tissu de mon mari qui était commerçant en tissu avait été pris. Je pense qu’il a été pris par les Allemands. Peut-être trois ou quatre jours après l’arrestation de mon mari, quelqu’un m’a dit qu’il avait été vu à Bron dans une équipe de personnes détenues au Fort Montluc et qui étaient extraites chaque jour pour le ramassage des bombes. [...] ».
Le 14 août 1944, eurent lieu des bombardements sur la base aérienne de Bron (Rhône). Devant l’ampleur des dégâts, les Allemands décidèrent de faire travailler sur le camp d’aviation des détenus juifs de la prison de Montluc.
Le 17 août, à 9 heures du matin, 50 prisonniers furent extraits « sans bagage » de la « baraque aux Juifs ». Le gardien Wittmayer fit l’appel et, à la dernière minute, les Allemands remplacèrent deux catholiques par des Juifs. Ils furent embarqués sur trois camions gardés par des soldats allemands armés de mitraillettes, puis amenés sur le champ d’aviation de Bron. A Bron, les prisonniers furent répartis par groupes de trois et contraints de rechercher, d’extraire et de désamorcer des bombes non éclatées. Vers midi, ils furent dirigés près d’un hangar pour déjeuner. L’un des détenus, Jacques Silbermann, profita de cette occasion pour s’évader. Après des menaces de représailles et de vaines recherches, les soldats allemands conduisirent les 49 détenus sur le chantier pour reprendre le travail. A 18h30, alors que les prisonniers remontaient sur un camion pour regagner Montluc, un major allemand donna l’ordre de les amener sur un autre chantier. Les 49 détenus furent conduits près de trois trous d’obus au-dessus desquels ils furent exécutés par balles. Leurs corps furent ensuite recouverts de terre et de gravats.
Le lendemain, 18 août, 23 détenus juifs de Montluc, dont au moins 20 de la « baraque aux Juifs », furent également conduits sur le terrain d’aviation de Bron. Ils subirent le même sort que les prisonniers de la veille. Ils furent exécutés au-dessus d’un trou d’obus après avoir recherché, extrait et désamorcé des bombes non éclatées toute la journée.
Le 19 août, le chef de la « baraque aux Juifs », Wladimir Korvin-Piotrowsky, dû remettre « en tas » les bagages des 70 prisonniers aux autorités allemandes.
En septembre 1944, cinq charniers furent découverts sur le terrain d’aviation de Bron. Le corps de Virgile Bloch fut retrouvé dans le charnier D, situé entre les hangars 75 et 80 et contenant 21 cadavres. D’après le rapport du médecin légiste, il avait été tué d’une balle dans la tête. Grâce au témoignage du seul rescapé de l’exécution du 17 août, Jacques Silbermann, nous pouvons déduire que la fosse D contenait 20 victimes du 17 août et 1 victime du 18 août (Charles Schwartz). Virgile Bloch fit donc vraisemblablement partie du groupe des 49 exécutés du 17 août 1944.
Le corps de Virgile Bloch fut décrit ainsi : « chevelure disposée en couronne, grisonnante », 1m70 (en réalité, d’après sa notice individuelle de forain, Virgile Bloch mesurait 1m61). Il fut d’abord enregistré sous le numéro 74 puis identifié le 27 septembre 1944, soit par son frère Fernand Bloch, demeurant 3 avenue de l’Hôtel de Ville (Villeurbanne), soit par son beau-frère Marcel Metzger.
La mention Mort pour la France fut transcrite sur son acte de décès en 1945.
En 1983, Jeanne Metzger et Robert Bloch portèrent plainte avec constitution de partie civile contre Klaus Barbie.
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Rhône, 3335W22, 3335W10, 3460W1, 3808W866, 31J66, 540W35, 4544W29.— Bulletin de l’Association des Rescapés de Montluc, N°18, mai 1946.— Bulletin de l’Association des Rescapés de Montluc, N°23, octobre 1946.— Pierre Mazel, Mémorial de l’oppression, fasc. 1, Région Rhône-Alpes, 1945.— Site Internet de Yad Vashem.— État civil (partiellement traduit).

Jean-Sébastien Chorin

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