Né le 22 mars 1920 à Marseille (Bouches-du-Rhône), fusillé le 24 mars 1944 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; tourneur sur métaux ; militant communiste et résistant FTPF détachement Alsace-Lorraine puis chef-adjoint du Groupe spécial d’exécution (GSE) de la région parisienne.

Eugène Cas était le fils de Marius Bertin, chaudronnier à la Manufacture des Tabacs et Allumettes de Marseille, et de Germaine Emilie Touquet, ménagère. En 1936, il adhéra à seize ans aux Jeunesses communistes à Marseille.
En 1939, son père étant désigné par son entreprise pour rejoindre la succursale d’Aubervilliers, il s’installa avec sa famille 42 rue de Paris (actuelle rue de la Commune-de-Paris) à Aubervilliers (Seine, Seine-Saint-Denis), travailla à la maison Lavalette à Saint-Ouen puis trouva un emploi aux usines Breguet, 28 rue du Pilier à Aubervilliers, jusqu’à son arrestation par la police française en mars 1940. À cette époque il fit la connaissance de Renée Rihet sa future femme et reprit contact avec les Jeunesses communistes d’Aubervilliers.
Le 10 mars 1940, à la suite de distributions clandestines de tracts, il fut arrêté par les policiers d’Aubervilliers avec vingt-deux camarades des Jeunesses communistes, dont Renée Rihet et Suzanne Berland. Lors de l’exode, il fut interné à la prison de la Santé et transféré au camp de Gurs (Basses-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques) d’où il s’évada le 30 juin 1940 avec Maurice Langlois, Jean Montrerroux, Maurice Sacheton, Jacques Dugué. Il se cacha en zone libre à Aix-en-Provence où ses parents avaient l’habitude de se reposer l’été. En août 1940, il revint à Stains chez sa fiancée Renée, militante des Jeunes filles de France et cousine de Roland Bauce, FTP de Stains. Eugène Cas et Renée se marièrent le 9 novembre 1940. Il fut condamné par défaut par le tribunal militaire de Périgueux le 5 décembre 1940 à deux ans de prison et à 1 000 francs d’amende pour infraction au décret du 26 septembre 1939.
Surveillé, le couple fut contraint de quitter Stains pour Châtellerault (Vienne) où Eugène Cas travailla à la Manufacture d’armes. Arrêté en mars 1941 avec Renée, transférés à Périgueux (Dordogne), où ils comparurent devant le tribunal militaire, ils furent condamnés à huit mois de prison, et libérés en juillet 1941. De retour à Stains en novembre 1942 après l’ouverture de la ligne de démarcation, le couple s’installa à Aulnay-sous-Bois (Seine-et-Oise, Seine-Saint-Denis). En 1943, Eugène Cas travailla quelque temps à la SOMUA à Saint-Ouen. Désigné pour partir en Allemagne au titre du STO, il entra dans la clandestinité. Roger Debrais le mit en contact avec Roeckel.
Il devint, fin août 1943, responsable militaire régional des FTP de la 89, selon son interrogatoire. Il passa ensuite à la région 14, conservant les mêmes responsabilités. Il n’y resta que quinze jours, nommé ensuite à la région 36 avant d’entrer vers le 15 novembre dans le groupe spécial des FTP sous le pseudonyme de Maurice. Ce groupe, dirigé par Franz, René Roeckel dit Rajac, était composé de deux équipes groupant au total plus de quinze militants qui avaient pour tâches principales d’exécuter les « traîtres », traîtres au parti ou collaborateurs, et de mener des attaques à main armée pour récupérer de l’argent, des tickets d’alimentation, des automobiles. En firent partie, notamment André Durand*, Henri Haudelaine, Suzanne Mairesse, Renée Rihet...
Eugène Cas participa à de nombreuses actions, notamment, le 9 juillet 1943 incendie du garage Todt à Sceaux, le 30 juillet 1943 incendie de l’usine de pellicules photographique As de trèfle à Saint-Maur, fin juillet 1943 destruction de batteuses à Provins (Seine-et-Marne), en août 1943 vol de produits alimentaires à Antony, le 10 octobre 1943 cambriolage de la Mairie de Marolles-en-Hurepoix (Seine-et-Oise, Essonne), le 25 août 1943 incendie d’une scierie à Villejuif, le 21 novembre 1943 tentative d’attentat au domicile parisien de Joseph Bucard chef franciste.
Un ancien membre du Groupe spécial arrêté et torturé par des policiers de la BS2 parla. Le 16 novembre 1943, les FTP-MOI Joseph Epstein et Missak Manouchian furent interpellés à Évry-Petit-Bourg. D’autres filatures aboutirent au démantèlement du Groupe spécial à partir du 10 décembre 1943. Eugène Cas fut arrêté avec sa femme Renée le 11 décembre 1943. Ils étaient alors domiciliés avec leur fille Josette âgée de neuf mois, 111 boulevard Sénard à Saint-Cloud. Eugène Cas fut interrogé dans les locaux des Brigades spéciales, livré aux Allemands et interné à la prison de Fresnes. Il comparut le 16 mars 1944 avec ses compagnons devant le tribunal du Gross Paris qui siégeait rue Boissy-d’Anglas (VIIIe arr.). Condamné à mort pour « activités de franc-tireur », il fut passé par les armes le 24 mars 1944 au Mont-Valérien, le même jour que René Morin, Franz, René Roeckel, André Durand*, Henri Haudelaine et Paul Quillet.
Le secrétariat des Anciens Combattants accorda la mention « Mort pour la France » à Eugène Cas le 10 décembre 1945. Son nom fut donné à une rue de Stains et une plaque commémorative apposée au 8 rue de la République dans cette ville. Son nom fut également donné le 23 juillet 1945 à une rue du 4e arrondissement de Marseille et à l’école qui s’y trouvait. Eugène Cas fut nommé aspirant FFI à titre posthume.
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Dernière lettre
 
Fresnes, le 24 mars 1944
Mes chéries,
Je vous écris cette dernière lettre, pour vous dire un dernier adieu. Comme beaucoup, je tombe en soldat, pour mon pays, la France. Je n’ai rien à me reprocher. Mes chéries, vous qui allez tant souffrir, je vous, dis courage., ne me pleurez pas trop, car je ne suis pas à plaindre et vous l’êtes plus que moi. -
Ma petite mère chérie, trouve une consolation dans ma petite Josette, et fais d’elle une femme comme sa mère chérie qui, j’espère, vous sera bientôt rendue. Elle aussi, je vous demande de ne pas l’oublier, même si elle refaisait sa vie avec un homme digne d’elle. Cela serait mon désir, si elle le veut, car elle est jeune et il ne faut pas que sa vie soit brisée.
Ma petite sœur chérie, c’est sur toi que je compte le plus pour faire oublier leur peine à papa et à maman ; sois gentille avec eux, tu es leur seul soutien et si dans leurs vieux jours ils sont dans le besoin, fais comme j’aurais fait moi-même.
Mes chers parents, merci pour tout ce que vous avez fait pour moi, et pardon pour toute la peine que je vous fais. Je n’ai été averti que quelques minutes après vous avoir quittés, et cet après-midi je ne serai plus.
Je tombe pour la France. Par cette lettre, recevez mes dernières volontés et courage comme nous. En avant !
Vive la France, mon pays !
Vive le Parti Communiste !
Eugène Cas
 
Le 24 mars 1944
Ma petite femme chérie,
Je te dis un dernier adieu ; toi qui as été pour moi la femme parfaite, courage Pense a notre petite Josette, le fruit de notre amour ; pour elle tu seras deux, car je pars, mais mon cœur reste avec toi.
Quand ma petite Josette sera plus grande, tu lui diras que son papa est mort pour la France, notre pays. Chérie, quand tu reviendras dans notre foyer, tu referas si tu le veux ta vie, car tu-es, jeune et mon dernier vœu est que tu sois heureuse, tu l’as
mérité.
J’espère des jours meilleurs pour toute l’humanité.
Ma petite Josette chérie, tu n’auras pas connu ton papa chéri. Pour lui ; tu as été toute sa joie, ainsi que ta maman. Sois une femme digne de ton père et de ta maman. Sois sage et sois, pour ta maman, le reflet de ton papa ; qu’elle soit heureuse pour le reste de sa vie que je lui souhaite longue et heureuse.
Ma petite femme chérie, sois courageuse comme moi, et reçois mes dernières caresses.
Ton mari chéri.
Eugène
Vive la France, mon pays !
Sources

SOURCES : Arch. PPo., BS2 carton 14, carton 28, 1W 0094. – Arch. de Vincennes (dossier militaire). – DAVCC, Caen, Boîte 5/B VIII 5- Liste S 1744-182/44 (Notes Thomas Pouty). – Arch. mun. Châtellerault (Vienne). – Arch. mun. Marseille. – Arch. mun. Aubervilliers. – Arch. mun. Stains. – Résistantes et résistants en Seine-Saint-Denis, un nom, une rue, une histoire, AMRN 93, Éd. de l’Atelier, 2004. — Adrien Blès, Dictionnaire historique des rues de Marseille, Marseille, Éditions Jeanne Laffitte, 2002, p. 107. – Lettres de fusillés, Éditions France d’abord, 1946, p. 34-36. — Site Internet Mémoire des Hommes. — notes Jean-Marie Guillon.

Iconographie
PHOTOGRAPHIE : Arch. PPo. GB 174.

Jean-Pierre Besse, Gérard Larue

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