Berné (Morbihan), La Croix des Nations-Kergaër, le Bois de Landordu, La Villeneuve-Zinsec (juin-juillet 1944)
La Croix des Nations-Kergaër, le Bois de Landordu et La Villeneuve-Zinsec en Berné, où vingt résistants furent exécutés en juin-juillet 1944, font partie des nombreux lieux d’exécutions et de mémoire qui jalonnent le département du Morbihan.
À Kergaër en Berné
Dans le bois de Landordu en Berné
À La Villeneuve-Zinsec
Le monument des fusillés de Berné à Landordu
SOURCE : Photos Jean-Pierre et Jocelyne Husson
Commémoration du 11 juillet 2021 à Landordu
René Le Guénic chante la Mélopée pour les martyrs
Serge Kervarec, frère de Louis Kervarec,et René Le Guénic devant stèle de La Villeneuve-Zinsec
SOURCE : Photos Jean-Paul Sylvestre et René Le Guénic
Le 7 juin 1944, surpris par une patrouille allemande qui effectuait un contrôle dans le village de Kergaër en Berné, Jules Le Sauce fit usage de son révolver en tirant sur les soldats allemands pour tenter de se dégager, mais succomba sous le nombre et fut abattu à La Croix des Nations.
Une stèle érigée dans le village de Kergaër porte l’inscription :
« LE SAUCE Jules
7-6-1944 »
Le Bois de Landordu
Au début du mois de juin 1944, le 2e Régiment de chasseurs parachutistes (RCP) ou 4e SAS (Special air service) des Forces françaises libres (FFL) fut largué dans le secteur de Plumelec-Sérent-Saint-Marcel-Malestroit (Morbihan). Sa mission était de fixer les troupes allemandes stationnées dans le Morbihan, afin d’empêcher ou au moins de retarder l’arrivée des renforts allemands sur le front de Normandie. Plusieurs milliers de résistants appartenant aux Forces françaises de l’intérieur (FFI) et aux Francs-tireurs et partisans français (FTPF) furent regroupés et armés dans le camp de Saint-Marcel qui recevait chaque nuit des parachutages d’hommes, d’armes, de munitions et de Jeep. Le commandant Pierre Bourgoin, chef du 4e SAS et le colonel Morice, chef des FFI du Morbihan, établirent leur quartier général à la ferme de La Nouette située sur le territoire de la commune de Sérent. Dans la nuit du 17 au 18 juin 1944, considérant que cette concentration devenait très dangereuse et qu’il fallait plutôt privilégier la guérilla, le commandement interallié donna, mais trop tard, l’ordre de dispersion.
Le 18 juin 1944, le camp de Saint-Marcel où étaient stationnés un peu plus de deux mille FFI encadrés par deux cents SAS, fut attaqué en force par la Wehrmacht. Après avoir livré combat durant toute la journée en infligeant de lourdes pertes aux troupes allemandes, parachutistes SAS et FFI se replièrent en bon ordre et se dispersèrent.
Après cette dispersion, la Feldgendarmerie, la Wehrmacht appuyée par de nombreux détachements de soldats russes, géorgiens et ukrainiens rassemblés dans les « unités de l’Est », les agents de l’Abwher (service de renseignements de la Wehrmacht) et du SD (Sicherheitsdienst), service de sûreté et de renseignements de la Gestapo, ainsi que leurs auxiliaires français, les miliciens du Bezen Perrot et du Parti national breton, se lancèrent dans une traque implacable des parachutistes SAS, des FFI-FTPF, de leurs dépôts d’armes, et de tous ceux qui les hébergeaient et les ravitaillaient. Rafles, arrestations, tortures, et exécutions sans jugement de SAS et de résistants, incendies de fermes, pillages et massacres de civils se multiplièrent dans tout le département du Morbihan.
De nombreux résistants furent arrêtés et conduits dans l’école Sainte-Barbe du Faouët (Morbihan) réquisitionnée par les Allemands qui y avaient installé une prison et une cour martiale.
Le 6 juillet 1944 à l’aube, seize résistants détenus, torturés et condamnés à mort par la cour martiale du Faouët, parmi lesquels se trouvaient de jeunes FTPF pris les armes à la main, furent conduits en camion jusqu’au bois de Landordu, situé sur le territoire de la commune de Berné (Morbihan), où ils furent fusillés et jetés dans une fosse recouverte de mottes de terre, d’ajoncs et de fougères.
Lors de la découverte du charnier, quatre d’entre eux n’ont pu être identifiés.
Au lendemain de la 2e guerre mondiale, une plaque commémorative portant l’inscription « Ici furent fusillés le 6 juillet 1944 16 patriotes » et surmontée d’une croix de pierre a été élevée par la commune de Berné sur le lieu même de leur exécution, aménagé en clairière et délimité par des plots de granit enterrés et reliés par une chaîne.
La Villeneuve-Zinsec
Le 18 juillet 1944, trois résistants condamnés à mort par la cour martiale du Faouët, ont été condamnés à mort et emmenés à La Villeneuve-Zinsec où ils ont été exécutés.
Leurs noms sont inscrits sur une stèle qui se dresse sur le lieu de leur exécution et qui porte l’inscription :
« Ici tombèrent 3 Patriotes
Robert GRENET
Louis KERVAREC
Louis ROBIC »
Le monument des fusillés de Berné
En 1947, un monument a été érigé sur le territoire de la commune de Berné sur le bord de la RD 782 qui va du Faouët à Guéméné-sur-Scorff. Les travaux ont été effectués par Malo Le Beller et Louis Hamonic de Locmalo, salariés de l’entreprise Gustave Lucas.
Le monument est constitué de trois blocs de granit.
Au centre, se dresse un obélisque sur lequel sont gravés de haut en bas, une croix blanche, l’inscription « À la mémoire des patriotes morts pour la France - Juillet 1944 », et un V tracé devant une Croix de Lorraine.
De chaque côté de cet obélisque, deux stèles surmontées chacune de deux drapeaux entrecroisés gravés dans la pierre, honorent la mémoire des seize patriotes exécutés le 6 juillet 1944 dans le Bois de Landordu :
FAUCHEUR Yves
GARNIER Roger
HERVIOU Yves
LE BOURGÈS Joseph
LE CORRE Joseph
LE GUYADER François
LE ROUX François
MARCHICA Antoine
MOSTADE Francis
NICOLAS François
PALARIC Joseph
POHER Jean
INCONNU 1
INCONNU 2
INCONNU 3
INCONNU 4
Ont été ajoutés à cette liste quatre noms :
LE SAUCE Jules abattu le 7 juin 1944 à La Croix des Nations
GRENET Robert
KERVAREC Louis
et ROBIC Louis
exécutés le 18 juillet 1944 à La Villeneuve-Zinsec.
Une petite plaque, scellée sur la stèle de droite du monument, porte la mention « Passant, souviens-toi ».
Chaque année, le 6 juillet si cette date tombe un dimanche ou le dimanche suivant, une cérémonie patriotique et religieuse honore la mémoire des fusillés de Berné.
En hommage aux fusillés de Landordu, René Le Guénic chante la Mélopée pour les martyrs dont il a composé la musique et le paroles :
« Au petit matin
Ils sont arrivés
Un dernier chemin
Vers l’éternité
Sur ce sentier sans le moindre espoir de retour
Laissant derrière eux jeunesse, parents et leurs belles amours [...] »
SOURCES : Arch. Dép. Morbihan, 41 J 46 et 47. — " À Berné, le 14 juillet sur les lieux du supplice ", Ami entends-tu… Journal de la Résistance bretonne, ANACR-56, numéros 32 (1er semestre 1976) et 55 (2e semestre 1983). — " Le 6 juillet 1944, seize résistants étaient fusillés à Landordu ", Ouest-France, 6 juillet 2013. — Roger Leroux, Le Morbihan en guerre 1939-1945, Joseph Floch imprimeur-éditeur, Mayenne, 1978. — Joseph Jégo, 1939-1945 Rage Action Tourmente au Pays de Lanvaux, Imprimerie La Limitrophe, 1991/ — Le Morbihan en guerre 1939-1945, Archives départementales du Morbihan, 2009. — Kristian Hamon, Le Bezen Perrot : 1944, des nationalistes bretons sous l’uniforme allemand, Yoran Embanner, 2005 et Agents du Reich en Bretagne, Morlaix, Skol Vreizh, 2011. — René Le Guénic, Les Maquisards chez nous en 1944. Gourin-Le Faouët-Guéméné et Morbihan-Mémorial de la Résistance, Imprimerie Basse-Bretagne-Quéven-Morbihan, 2013 ; Poèmes et Chansons et souvenirs, Imprimerie Basse-Bretagne, 2017. — " Lieux mémoriels en Morbihan-Berné " et " 6 juillet 1944, Landordu ", dossiers en ligne sur le site Internet Les Amis de la Résistance du Morbihan, ANACR-56. — État civil, Berné (actes de décès)
Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson