Locminé (Morbihan), 1944
Locminé, où en 1944 de nombreux résistants ont été détenus et torturés, et dont vingt-sept jeunes ont été fusillés ou exécutés sans jugement, est devenu un haut-lieu de la résistance bretonne dans le département du Morbihan.


« Le 4 août 1944 fut trouvé dans cette école, hâtivement recouvert par ses tortionnaires en fuite, le corps déchiqueté du Résistant Julien Guidard »

« La fascisme est passé par là... Passant souviens-toi ! »

« Locminé haut-lieu de la Résistance du Morbihan a élevé ce menhir à leur gloire »

Plaques commémoratives

Menhir de la Résistance

Place des martyrs de la Résistance et École Annick Pizigot

Liste des fusillés



Le transfert des cercueils des résistants de Locminé fusillés dans le Fort Penthièvre


Le monument des martyrs de la Résistancedans le cimetière de Locminé

Sur le mur de l’Imprimerie Lestic
SOURCE : Photos Jean-Pierre et Jocelyne Husson
Au printemps 1944, une antenne du SD et une unité de l’armée Vlassov — détachement militaire formé de volontaires russes armés par la Wehrmacht — s’installèrent dans l’école des filles de Locminé. Cette antenne était commandée par le lieutenant Goy qui parlait parfaitement le français et qui était assisté de miliciens bretons appartenant au Bezen Perrot. Les caves de l’école, qui avaient été aménagées en 1943 en chambres froides bétonnées, furent transformées en cellules de prison et en lieux d’interrogatoire. Plus de mille patriotes raflés, traqués, arrêtés y furent incarcérés et torturés, sévices qui ont fait l’objet à la Libération d’un rapport du docteur Devau publié en octobre 1944.
Cette école porte aujourd’hui le nom d’Annick Pizigot, une jeune résistante de Locminé déportée NN (Nacht-und-Nebel, Nuit-et-Brouillard) à Ravensbrück en août 1944. Libérée à Mauthausen par la Croix-rouge le 24 avril 1945, elle fut transportée dans un hôpital suisse, où elle est décédée le 26 novembre 1945.
Le 11 juillet 1944, devant l’avance des troupes américaines, le chef de la Gestapo de Vannes donna l’ordre au colonel Reese, officier de la Wehrmacht, d’exécuter cinquante-deux détenus de la prison surpeuplée de Vannes (Morbihan), située Place Nazareth. Le major Esser, chef de bataillon de la défense côtière, chargé d’exécuter cet ordre, fit transférer cinquante détenus, pour la plupart FFI et FTPF, de la prison de Vannes jusqu’au au Fort Penthièvre, commune de Saint-Pierre-Quiberon (Morbihan), où ils furent exécutés le 13 juillet 1944. Les détenus de la prison de Vannes, parmi lesquels se trouvaient vingt-cinq résistants de Locminé, ont été emmenés deux par deux devant les pelotons d’exécution de SS géorgiens appartenant à une « unité de l’Est » formée de volontaires armés par la Wehrmacht et placée sous le commandement du lieutenant Wassilenko.
À l’entrée le cimetière communal
Le 5 juin 1946, les vingt-cinq corps des résistants de Locminé fusillés au Fort Penthièvre ont été ramenés à Locminé, où se sont déroulées des obsèques solennelles au cours d’une messe en plein air qui a rassemblé près de 8 000 personnes. Ils ont été ensuite inhumés dans une fosse commune, en attendant la construction d’un mausolée à l’entrée du cimetière communal, qui a été inauguré le 12 juillet 1946.
Ce mausolée est constitué d’un imposant monument de pierre, érigé devant les sépultures des fusillés alignées sur deux rangs, sur lequel est sculptée une grande Croix de Lorraine encadrée par deux petites croix latines noires :
« 1944-1945 - Aux enfants de Locminé martyrs de la Résistance



























Place des martyrs de la Résistance
Le 13 janvier 1947, le conseil municipal de Locminé a donné le nom de « Place des martyrs de la Résistance » à la petite place située devant l’école publique des filles que les Allemands avaient réquisitionnée pour en faire un lieu d’interrogatoire et de torture.
Le 16 octobre 1966, a été inauguré sur cette place, le Monument du menhir de la Résistance, élevé « À la gloire des résistants incarcérés et torturés en 1943-1944 dans l’école ». Il s’agit d’une énorme pierre levée de 18 tonnes, au pied de laquelle sont déposées à même le sol trois plaques commémoratives :
L’inscription qui est gravée sur la plus grande de ces plaques est devenue illisible, mais elle peut être retranscrite grâce aux archives :
« Plus d’un millier de résistants furent incarcérés ici par les nazis en 1943-1944 pour y être torturés et souvent déportés vers les camps de la mort. Ils ont lutté et souffert pour l’honneur de la France et la liberté du monde. Locminé haut-lieu de la Résistance du Morbihan a levé ce menhir à leur gloire »
Sur la seconde plaque de marbre blanc est gravée en lettres dorées la mention :
« Le Fascisme est passé par là – Ici pendant la sombre occupation, par centaines d’ardents patriotes furent torturés par les bourreaux nazis. Les FFI et FTP du IVe Bataillon en hommage au sacrifice suprême de leurs frères d’armes le citent en exemple à la postérité - Passant souviens-toi ! »
La troisième plaque rappelle le souvenir de Julien Guidard qui a été arrêté le 14 juillet 1944 au cours des combats de Kervernen en Pluméliau (Morbihan), incarcéré et torturé à mort dans l’école de Locminé et dont le corps fut découvert par La Croix Rouge sur un terrain privé près de l’école, le crâne enfoncé et l’abdomen perforé :
« Le 4 août 1944 fut trouvé dans cette école hâtivement recouvert par les tortionnaires en fuite le corps déchiqueté du résistant Julien GUIDARD »
En face du Monument du menhir de la Résistance est apposée une plaque commémorative sur le mur de l’ancienne imprimerie Lestic, où ont été fabriqués des faux-papiers et où a été imprimé le premier numéro légal du journal clandestin des FTP France d’abord sorti de la clandestinité :
« Le premier numéro légal de " France d’abord ", journal de la Résistance fut édité ici à l’Imprimerie Lestic le 12 août 1944. Sous l’Occupation, de nombreux faux papiers sortirent des mêmes presses »
Chaque année au début du mois de juin, le dimanche le plus proche du 5 juin qui correspond à la date anniversaire du retour à Locminé des corps des fusillés du Fort Penthièvre, une cérémonie commémorative est organisée par la Ville place des martyrs de la Résistance et devant le mausolée du cimetière.
SOURCES : Arch. Dép. Morbihan, 2 W 15920, 1526 W 229, 41 J 9. — Signalétique de la crypte du fort de Penthièvre. — " Plus de 50 cadavres ont été découverts dans le charnier du fort de Penthièvre les poings liés derrière la tête par des fils de fer ", Le Télégramme de Brest et de l’Ouest, 17 mai 1945. — Ami entends-tu…, Bulletin de liaison et d’information de l’ANACR, numéros 6 (avril 1968), 13 (octobre-décembre 1970), 46 (avril 1980), 56 (1er semestre 1984) et 167 (2e trimestre 2015). — Docteur Devau, Jours d’épreuves dans le Morbihan, publication vendue au profit des familles du Morbihan victimes de la barbarie allemande, Vanves, octobre 1944. — Roger Leroux, Le Morbihan en guerre 1939-1945, Joseph Floch imprimeur-éditeur, Mayenne, 1978. — Joseph Jégo, 1939-1945 Rage Action Tourmente au Pays de Lanvaux , Imprimerie La Limitrophe, 1991. — Le Morbihan en guerre 1939-1945, Archives départementales du Morbihan, 2009. — Françoise Morvan, Miliciens contre maquisards-Enquête sur un épisode de la Résistance en Centre-Bretagne, Éditions Ouest-France, 2010. — Kristian Hamon, Le Bezen Perrot : 1944, des nationalistes bretons sous l’uniforme allemand, Yoran Embanner, 2005 et Agents du Reich en Bretagne, Morlaix, Skol Vreizh, 2011. — Jean-Étienne Picaut, Locminé, tome 3, La Maillette entre tourmente et espoir, Histoire et Images, Liv’Éditions, 2012. — " Lieux mémoriels en Morbihan-Locminé ", dossier en ligne sur le site Internet Les Amis de la Résistance du Morbihan, ANACR-56. — Site Internet officiel de la ville de Locminé . — État civil de Locminé.
Jean-Pierre Husson, Jocelyne Husson