Né le 15 octobre 1901 à Paris (XIe arr.), exécuté sommairement le 17 ou le 18 août 1944 à Bron (Rhône), ingénieur civil des Mines ; résistant au sein du réseau Gallia à Lyon (Rhône).

Henri Israël était le fils de Félix Edgar Israël, représentant de commerce, et de Florette Lucie Baehr. Il naquit chez ses parents, 124 avenue Parmentier à Paris (XIe arr.). Il entra à l’École des mines de Paris en 1920. Il obtint son diplôme le 9 août 1923 et devint ingénieur civil des Mines. Le 16 juillet 1930, il épousa Hélène Eugénie Georgette Goerens à Paris (XIIe arr.). A l’époque, il demeurait 36 rue de la Fontaine au Roi (Paris, XIe arr.) avec ses parents. Henri et Hélène Israël eurent deux fils, Philippe Félix, né en 1933, et François Émile, né en 1935. Son père, Félix Edgar, décéda le 8 mai 1933 à Paris.
Pendant la campagne 1939-1940, le capitaine Henri Israël commanda la 6e batterie du 372e régiment d’artillerie lourde sur voie ferrée. A ce titre, il fut décoré en 1941 de la Croix de guerre 1939-1940 avec étoile de bronze.
Henri Israël se réfugia dans le Rhône avec sa famille. Ils demeurèrent à Lyon, à Saint-Didier-au-Mont-d’Or et en dernier lieu à Charly. Henri Israël s’engagea dans la Résistance. Il fut membre du mouvement Combat. Il participa à la réalisation des exemplaires du journal clandestin Combat à Saint-Didier-au-Mont-d’Or. En mars 1943 (entre février et avril selon les sources), il intégra le réseau Gallia comme agent P2. Il fut immatriculé au Bureau central de renseignements et d’action (BCRA) 451 puis 12 200. Il prit le pseudonyme de Janin. Il fut chargé de mission de 1ère classe jusqu’au 30 mai. A partir du 1er juin, il devint chef de mission de 2e classe. Henri Israël, dit « commandant Janin » était responsable de la région lyonnaise. Il était l’adjoint de Paul Lanoyerie, responsable de la région Sud-Est du réseau. Sa femme, Hélène Israël, fut également incorporée au réseau Gallia en mars 1943. Elle avait une fonction de secrétaire.
Le 3 août 1944, Henri Israël fut arrêté par des agents de la Gestapo à Lyon, dans le bureau du réseau Gallia. Il fut conduit au siège de la Gestapo à Bellecour pour interrogatoire. Ce même jour, après le départ d’Henri Israël pour Lyon, quatre hommes arrêtèrent sa femme Hélène à son domicile, à Charly. Elle fut également conduite à Bellecour où elle put échanger quelques mots avec son mari. Ils furent ensuite internés tous les deux à la prison de Montluc (Lyon). Henri Israël fut emprisonné dans la cellule 111. Après-guerre, Hélène Israël décrivit dans une longue lettre les conséquences de leurs arrestations : « le 3 août, nous habitions la banlieue lyonnaise, à Charly, avec nos deux fils âgés de neuf ans et onze ans, ma mère, ma belle-mère et une arrière grand’mère de 90 ans. Notre domicile a été pillé de tout ce qui nous appartenait ; nos fils et leurs grands’mères n’ont vécu, pendant ma détention, que grâce au dévouement de nos voisins et de la municipalité de Charly. Tout ce que nous possédions restait rangé dans nos valises, en vue d’un départ précipité hélas toujours possible et les Allemands n’ont eu qu’à s’emparer de nos bagages. Le dommage, valeur 1944, a été évalué à 400.000 fr. ». Il s’agissait principalement d’argent, de titres ou de valeurs.
Pendant son internement à Montluc, Henri Israël fut transporté à Bellecour, sans doute plus d’une fois, pour être interrogé par des agents de la Gestapo. La résistante Alice Vanstenberghe (réseau Gallia RPA) fit un jour le trajet de retour Bellecour-Montluc avec lui : « Je le revois dans la voiture cellulaire qui était la fameuse camionnette qui nous ramenait de Bellecour les soirs d’interrogatoire. Ce jour-là il était enchaîné par les menottes avec un israélite aussi petit que lui-même était grand. Il était pâle et émacié. […] il y avait aussi dans la camionnette entre autres Marcellin. Avant de quitter la prison mes camarades de cellule se souvenant de la disette déprimante qui était le lot des interrogés, m’avaient glissé au départ ma ration de pain et mon minuscule morceau de fromage quotidiens. Merci à vous, mes prévoyantes camarades […]. En effet, dans la camionnette de retour je revenais avec mon pain : les traitements subis m’avaient un peu coupé l’appétit… mais je vis tout à coup Marcellin […] regarder ce pain avec une telle angoisse dans le regard que je compris qu’il avait faim. J’ai su depuis qu’il n’avait pas mangé depuis huit jours… Et Janin lui aussi regardait le pain. Alors j’ai partagé l’ignoble quignon noir et je leur ai passé tout doucement en surveillant les regards de Witmayer qui ne nous laissait faire ni un geste ni dire un mot. Il avait déjà, cette brute, au moment de la montée en camionnette, envoyé à Janin de sa mitraillette tenue à bout de bras, un coup sur la tête sous le prétexte faux d’ailleurs que Janin avait parlé avec son compagnon de chaîne. »
Le 14 août 1944, eurent lieu des bombardements sur la base aérienne de Bron (Rhône). Devant l’ampleur des dégâts, les Allemands décidèrent de faire travailler sur le camp d’aviation des détenus juifs de la prison de Montluc.
Le 17 août, à 9 heures du matin, 50 prisonniers furent extraits « sans bagage » de la « baraque aux Juifs ». Le gardien Wittmayer fit l’appel et, à la dernière minute, les Allemands remplacèrent deux catholiques par des Juifs. Ils furent embarqués sur trois camions gardés par des soldats allemands armés de mitraillettes, puis amenés sur le champ d’aviation de Bron. A Bron, les prisonniers furent répartis par groupes de trois et contraints de rechercher, d’extraire et de désamorcer des bombes non éclatées. Vers midi, ils furent dirigés près d’un hangar pour déjeuner. L’un des détenus, Jacques Silbermann, profita de cette occasion pour s’évader. Après des menaces de représailles et de vaines recherches, les soldats allemands conduisirent les 49 détenus sur le chantier pour reprendre le travail. A 18h30, alors que les prisonniers remontaient sur un camion pour regagner Montluc, un major allemand donna l’ordre de les amener sur un autre chantier. Les 49 détenus furent conduits près de trois trous d’obus au-dessus desquels ils furent exécutés par balles. Leurs corps furent ensuite recouverts de terre et de gravats.
Le matin du 18 août, 23 détenus juifs de Montluc, dont au moins 20 de la « baraque aux Juifs », furent extraits « sans bagage » de la prison et conduits dans des camions au camp d’aviation de Bron. Surveillés par des soldats allemands, ils durent reboucher les trous d’obus et déterrer et désamorcer des bombes non éclatées toute la journée. A midi, on leur donna une portion de soupe claire. A 18h, l’adjudant-chef Brau demanda à 20 soldats de se porter volontaires pour accompagner les détenus. A 18h30, ils chargèrent les prisonniers sur un camion en les battant à coups de cravaches et de crosses de fusils. Les prisonniers furent conduits près d’un grand trou de bombe. On les fit mettre en cercle autour de la fosse qu’ils commencèrent à reboucher. Les soldats portaient des bouts de tuyau en fer entourés de caoutchouc. Les détenus furent vraisemblablement battus (assommés peut-être ?) et ils reçurent chacun une balle dans la tête ou dans le corps. Le lendemain, l’adjudant-chef Brau fit recouvrir de terre et de blocs de maçonnerie la fosse dans laquelle gisaient pêle-mêle les corps des victimes.
Le 19 août, le chef de la « baraque aux Juifs », Wladimir Korvin-Piotrowsky, dû remettre « en tas » les bagages des 70 prisonniers juifs de la baraque aux autorités allemandes.
En septembre 1944, cinq charniers furent découverts sur le terrain d’aviation de Bron. Le corps d’Henri Israël fut retrouvé le 21 septembre dans le charnier C, situé au nord du hangar numéro 13 et contenant 25 cadavres. Nous pouvons déduire grâce à différents témoignages que la fosse C contenait vraisemblablement les cadavres de 22 victimes du 18 août, les cadavres de 2 victimes du 17 août et le corps d’une femme exécutée probablement le 21 août. Il est donc difficile de déterminer à quel moment Henri Israël fut exécuté. Le rapport du médecin légiste indique qu’il fut tué d’une balle dans la tête. Son corps fut décrit comme suit : 1m85, « cheveux rares et châtains », « chemise tissée gris et blanc, complet drap gris foncé et fils verts bleus et rouges […], chaussettes coton avec support élastique, souliers bas en cuir noir à semelles cuir, pointure environ 46, ceinture en cuir brun avec boucle métal blanc, 3 mouchoirs blancs avec initiale H, une pochette rayée bleue, une pochette à grands carreaux bordeaux bleu clair et bleu foncé ». On retrouva sur son corps une alliance avec l’inscription « H.G. à H. J. 16.7.1930 ». Il portait un ruban métallique à la boutonnière de sa veste. Il fut d’abord enregistré sous le numéro 41 puis identifié le 18 avril 1945 par sa femme, assistée de Marcel Paul Roche, adjoint du commandant Janin dans la Résistance. Henri Israël fut inhumé à Saint-Didier-au-Mont-d’Or.
Henri Israël fut homologué commandant FFC. Il obtint la mention Mort pour la France en 1945 et le titre d’interné résistant en 1955. En 1946, il fut décoré de la Légion d’honneur avec le grade de chevalier et de la médaille de la Résistance avec rosette. Il semble qu’il reçut également la « Montgomery card », certificat signé par le maréchal Montgomery qui l’honora en tant que volontaire des Nations unies. Le nom d’Henri Israël apparaît sur le monument aux morts de Saint-Didier-au-Mont-d’Or, sur la plaque commémorative située à l’École des Mines (Paris) et sur le monument commémoratif de Bron rendant hommage au prisonniers de Montluc fusillés au mois d’août 1944. Une rue de Saint-Didier-au-Mont-d’Or porte le nom du Commandant Israël.
Hélène Israël fut libérée de Montluc le 24 août 1944. Après-guerre, une personne fut jugée pour avoir dénoncé Henri Israël à la Gestapo. Elle fut acquittée.
Sources

SOURCES : AVCC, Caen, dossier d’Henri Israël.— Arch. Dép. Rhône, 3335W22, 3335W14, 3335W26, 3335W16, 3335W30, 3335W11, 3460W4, 3808W866, 31J66.— SHD, Vincennes, inventaire de la sous-série 16P (dossiers administratifs de résistants).— Bulletin de l’Association des Rescapés de Montluc, N°18, mai 1946.— Bulletin de l’Association des Rescapés de Montluc, N°23, octobre 1946.— Pierre Mazel, Mémorial de l’oppression, fasc. 1, Région Rhône-Alpes, 1945.— Bruno Permezel, Résistants à Lyon, Villeurbanne et aux alentours, 2824 engagements, 2003.— Site Internet de Yad Vashem.— Mémorial Genweb.— Site Internet annales.org (les annales des Mines).— État civil.

Jean-Sébastien Chorin

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