Le Stand de tir. Au devant, trois poteaux de chêne. Derrière, la butte recevant les balles est maintenant plantée d'arbres.
Le Stand de tir. Au devant, trois poteaux de chêne. Derrière, la butte recevant les balles est maintenant plantée d’arbres.
Statue du fusillé. Au fond, les plaques des 75 condamnés, alignées de gauche à droite par ordre chronologique.
Statue du fusillé. Au fond, les plaques des 75 condamnés, alignées de gauche à droite par ordre chronologique.
Situé rive gauche de la Seine, à trois kilomètres de la maison d’Arrêt de Rouen, le stand de tir du Madrillet se trouve sur la commune de Grand-Quevilly auprès de la route d’Elbeuf. Dans cet ancien champ de tir doté d’une butte de réception des balles, des civils s’exerçaient à ce sport "populaire" avant 1914 (une récente étude a déterminé que ce champ de tir répondait à l’aspiration patriotique de revanche consécutive à la défaite de 1870), il comportait un bâtiment en dur pour des tirs à l’abri, bâtiment aujourd’hui disparu.), puis ce terrain a accueilli un hôpital de campagne britannique pendant la Première Guerre mondiale.
À partir d’octobre 1941, le stand est utilisé pour fusiller les condamnés à mort par le conseil de guerre allemand FK 517, qui se réunit et délibère régulièrement durant l’Occupation à Rouen au No 96 de la rue Jeanne d’Arc.
Les quatre premiers fusillés du département de Seine-Inférieure l’ont été entre Juillet 1940 et mai 1941 dans un endroit différent situé sur la côte de Bonsecours aux limites de Rouen-est, au lieu dit la Maison Hantée : Gaston Lefebvre, Étienne Achavanne, Georges Lefebvre et Joseph Madec.
Le Havrais Léon Lioust sera le premier fusillé au stand du Madrillet, le 14 octobre 1941. A sa suite, la liste des fusillés est constituée des noms de soixante dix victimes du nazisme, la plupart issues du département de Seine- Inférieure mais aussi parfois du Calvados et de l’Eure.
Les suppliciés venaient de la prison de Bonne-Nouvelle ou de celle du Palais de Justice de Rouen et étaient transportés à bord de camions militaires. On découvre par les dates des exécutions que la plupart de celles-ci concernent une personne à la fois mais qu’existent également des exécutions groupées. Notamment en 1943, on note huit tués FTP du maquis de Barneville le 8 novembre ainsi que six patriotes du Calvados (groupe « les Lexoviens », habitants de Lisieux) le13 novembre 1943.
Le lieu dit Le Madrillet jouxte le cimetière monumental Saint-Sever où plusieurs milliers de soldats du Commonwealth reposent depuis la première guerre mondiale.
Les fusillés y furent enterrés aux débuts de l’Occupation dans des sépultures anonymes affectées d’un numéro. Ces numéros permirent d’identifier les corps après la Libération et de les restituer aux familles concernées. A partir de 1943, cette pratique cessa et les corps des derniers fusillés sont demeurés introuvables.
Le stand du Madrillet est devenu, dès la Libération, un lieu de Mémoire comportant 76 plaques individuelles portant chacune le nom du fusillé et sa date d’exécution. Ces plaques de marbre sont placées dans l’ordre chronologique de 1940 à 1944 et de gauche à droite. Seule la plaque du Havrais Ernest Derrien, fusillé le 8 novembre 1943 fait exception car elle a été placée en retard et figure à droite du mémorial auprès du dernier fusillé de 1944 : Césaire Levillain.
Au centre du mémorial, la statue d’un patriote aux mains liées, les poings serrés, fièrement adossé à son poteau d’exécution juste avant la salve. Oeuvre du sculpteur Duparc.
Le carré situé derrière cette statue centrale renferme depuis le 4 août 1960, vingt dépouilles de fusillés dont les corps n’ont, pour des raisons diverses, pas été demandées par leur famille jusqu’en 1960. On retrouve les quatre fusillés de la Maison Hantée auxquels s’ajoutent quinze fusillés exhumés du cimetière Saint Sever le jour du 4 août 1960. Ainsi, le stand du Madrillet, lieu de mémoire, n’a pris un caractère proprement funéraire que depuis les années soixante. Au fond de ce carré situé derrière la statue sont alignées côte à côte vingt plaques indiquant le nom du fusillé,sa date d’exécution et la mention Mort pour la France. La vingtième plaque de fusillé est celle d’Auguste Jean qui a été fusillé au Mont-Valérien. On peut donc douter du transfert de sa dépouille à Rouen et il est probable que cette plaque désignant un résistant de Seine-Inférieure a été posée pour mémoire.
Le nom des fusillés dont les corps reposent au Stand du Madrillet sont suivis, ci-dessous, de la mention STM. (STM : Stand de Tir du Madrillet)
LEFEBVRE Gaston 5 juillet 1940 STM
ACHAVANNE Etienne 6 juillet 1940 STM
LEFEBVRE Georges 29 octobre 1940 STM
MADEC Joseph 18 mai 1941 STM
LIOUST Léon 14 octobre 1941
DEPEAUX Edmond 4 novembre 1941
HURRIER Paul 17 décembre 1941
PORCHE Camille 17 décembre 1941 STM
LE GUENEDAL Joseph 17 décembre 1941 STM
HEURTEL Jean 24 décembre 1942
GONTIER Paul 2 janvier 1942 STM
EDDE Georges 2 janvier 1942 STM
DENOYELLE 16 janvier 1942
LECLABART Roland 23 janvier 1942
LONGE René 30 janvier 1942
BILLAUX Henri 30 janvier 1942
DUBUC Fernand 30 janvier 1942
TIERCE Charles 30 janvier 1942
DUFLO Raymond 30 janvier 1942
LOUTREL Bernard 4 février 1942 STM
LAVALLEE Roger 4 février 1942
BOURGAIS Robert 4 février 1942 STM
ROY Joseph 26 mars 1942 STM
PICHARD André 31 mars 1942 STM
CAUDEBEC Eugène13 avril 1942
MARCEAU Jean 9 mai 1942
SENECAL Joseph 9 mai 1942 STM
DONNET Henri 9 mai 1942
LARSON Pierre 29 mai 1942
COUTURE Roland 28 mai 1942
MERAS Joseph 6 juin 1942 STM
CARPENTIER Gaston 10 juin 1942 STM
MOTTET Emile 12 juin 1942
LECOMTE André 30 juin 1942
NICOL Henri 1er juillet 1942
VIGNE-SALADE Henri 1er juillet 1942
LUCAS Marcel 7 août 1942
CHAUVIN Robert 15 août 1942 STM
CLOAREC Robert 28 août 1942 STM
BECHEPAY René 30 août 1942
LEMAITRE Alfred 30 août 1942
CHEVRIER Robert 18 septembre1942
BACHELOT Maurice 24 novembre 1942
MALMAISON Raymond 10 mars 1943
WEISS Marcel 15 juillet 1943
HASCOET Jean 22 juillet 1943
AUBRUCHET Marcel 30 juillet 1943
CARPENTIER Paul 30 juillet 1943
CANTON René 30 juillet 1943
PAUTREMAT Marcel 30 juillet 1943 STM
BURETTE Clovis 23 septembre 1943
HEBERT Georges 23 septembre 1943
GUENOT Raymond 1er novembre 1943
BRILLET Gérard 8 novembre 1943
SEHY Jean 8 novembre 1943
SEHY André 8 novembre 1943
MAILLEAU Maurice 8 novembre 1943
LEGROS Robert 8 novembre 1943
LECHEVALLIER Marcel 8 novembre 1943
COMPAGNON Maurice 8 novembre 1943
DE MAISTRE Xavier 13 novembre 1943
MANUEL Albert 13 novembre 1943
FROMONT Maurice 13 novembre 1943
BESSON Paul 13 novembre 1943
MARTIN Robert 13 novembre 1943
CAPRON René 13 novembre 1943
BLOCH Roland 9 décembre 1943
DOBERT Henri 9 décembre 1943
GUEST Louis 23 décembre 1943
MUGNIER Georges 23 décembre 1943
CERTAIN Robert 4 février 1944
TOULOUZAN Marcel4 février 1944
DELAUNAY Jean 4 février 1944
CORROY Michel 4 mars 1944
LEVILLAIN Césaire 4 mars 1944
DERRIEN Ernest 8 novembre 1943
Sources

SOURCES : Mémorial GenWeb . – Hommage aux fusillés et aux massacrés de la Résistance en Seine Maritime 1940-1944. Edité par l’Association Départementale des familles de fusillés de la Résistance de Seine-Maritime en1992. – Enquête sur place et photos Jean-Paul Nicolas.

Jean-Paul Nicolas

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