Né le 12 août 1896 à Dukla (Pologne), massacré le 1er avril 1944 à Azerat (Dordogne) ; victime civile d’origine juive.

Nathan Schenkel fut l’une des nombreuses victimes de la division Brehmer en Dordogne.
Du 26 mars au 2 avril 1944, la division Brehmer, ou division B de l’initiale du patronyme de son chef, le général Brehmer, accompagnée par des éléments de la Sipo-SD et de la Brigade nord-africaine et bénéficiant de renseignements collectés par des délateurs, collaborationnistes ou non, et par l’administration de Vichy, traversa le département de la Dordogne, traquant les maquisards et massacrant des civils en représailles dans le cadre d’opérations de répression, mais aussi en conduisant une politique génocidaire à l’encontre des nombreux Juifs réfugiés dans le département ; les hommes furent abattus parce que Juifs tandis qu’à de nombreuses reprises, les femmes et les enfants furent arrêtés, transférés à Drancy puis déportés vers les centres de mise à mort, Auschwitz-Birkenau principalement.
En zone dite libre puis zone sud, les Juifs avaient été recensés en application d’une loi de Vichy du 2 juin 1941, le jour même de la promulgation du second statut des Juifs ; un recensement spécifique des Juifs étrangers intervint en janvier 1942 ; enfin, une loi de Vichy du 11 décembre 1942 imposa en zone sud la mention « juif » sur la carte d’alimentation et sur la carte d’identité des Juifs français et étrangers.
Le 30 mars au matin, un détachement composé de 300 à 400 hommes fut envoyé à La Bachellerie. Il était en possession de listes établies en concertation avec la Milice : communistes ou supposés tels, ressortissants anglais, personnes soupçonnées d’aider le Maquis, et, enfin, les Juifs. A l’issue des opérations de police et de la sélection qui en résultèrent, seize hommes, dont dix Juifs, furent arrêtés et fusillés les 30 mars et 1er avril au lieu-dit La Genèbre. Leurs noms figurent sur la stèle érigée en ce lieu. Tandis que les hommes, et même deux enfants de quatorze et quinze ans, ont été fusillés, les autres membres des familles juives, c’est-à-dire les femmes, les vieillards et les enfants, furent transférés au 35e Régiment d’infanterie de Périgueux. Mis à l’écart des autres détenus, ils ont été mal nourris, maltraités, et les femmes furent contraintes à des taches humiliantes. Après quelques jours, ces 33 personnes ont été transférées à Drancy, puis au camp d’Auschwitz, par le convoi n° 71 du 13 avril 1944. La plus jeune des victimes, Liliane Gerst, avait deux ans, mais 16 autres enfants l’accompagnaient. La plupart d’entre elles ont été dirigées vers les chambres à gaz et les fours crématoires. C’est donc quarante-trois Juifs de La Bachellerie qui furent ce jour-là fusillés ou déportés. Cinq seulement des déportés purent revenir.
Nathan Schenkel fut naturalisé français le 2 août 1930. Il avait épousé Esther Silbermann, née le 14 juin 1898 à Radomysl et, elle aussi naturalisée française, le 2 septembre 1930. Repliés de Strasbourg, ils trouvèrent refuge à La Bachellerie. Ils avaient cinq enfants, tous nés à Strasbourg : Alfred, né le 4 juin 1937, Cécile, née le 28 septembre 1930, Isaac, né le 1er janvier 1932, Jacques, né le 25 janvier 1933, Maurice, né le 12 juin 1935.
Le 30 mars, Nathan Schenkel fut arrêté. Son épouse, Esther, ainsi que leurs cinq enfants furent également arrêtés, transférés au 35e RAD de Périgueux puis à Drancy, où ils arrivèrent le 6 avril 1944 pour être déportés à Auschwitz par le convoi n° 71. Nathan Schenkel fut abattu le 1er avril 1944 au cimetière d’Azerat par un détachement de la division Brehmer. Cinq autres Juifs y furent exécutés entre le 31 mars et le 2 avril : Joseph Cohen et Tobias Grunbaum (arrêtés à Grange-d’Ans), Napthali Grun (aussi arrêté à La Bachellerie), Pierre Khantine (arrêté à Rouffignac), René Kahn (arrêté à Hautefort).
Leurs noms sont inscrits sur une plaque commémorative apposée sur le mur du cimetière d’Azerat. Le nom de Schenkel apparaît sur le Monument aux morts de la commune de La Bachellerie ainsi que sur le monument commémoratif dédié aux fusillés de la commune (stèle de La Genèbre). Les noms de la famille Schenkel sont inscrits sur le monument commémoratif inauguré dans la commune le 18 mai 2008.
Voir : Lieu de massacre : La Bachellerie et ses environs (Dordogne), 30-31 mars 1944
Sources

SOURCES : Registre d’état civil de La Bachellerie. — Arch. dép. Dordogne, 60 W 14 - lettre et signature ; 1573 W 6 ; 1 W 1809. — CDJC, DCXXVI-12. Esther : CDJC - carnet de fouilles de Drancy n° 172. — Alfred, Cécile, Isaac, Maurice, Jacques : Klarsfeld, Mémorial des enfants, p. 349, photo p. 1039. — Bernard Reviriego, Les Juifs en Dordogne, 1939-1944, Périgueux, Éditions Fanlac-Archives départementales de la Dordogne, 2003, pp. 243-245, 465-466. — Guy Penaud, Les crimes de la division Brehmer, La traque des résistants et des juifs en Dordogne, Corrèze, Haute-Vienne (mars-avril 1944), Périgueux, Éditions La Lauze, 2004, p. 406. — Paul Mons, La folie meurtrière de la division Brehmer, mars-avril 1944, Dordogne-Corrèze, Haute-Vienne, Brive-la-Gaillarde, Éditions Les Monédières, 2016, pp. 71-73. — Martial Faucon, Les enfants martyrs de la Bachellerie ou l’un des plus odieux crimes nazis en Périgord, Memoria-Edition, 2009. — Jean-Paul Bedoin-Anacr Dordogne, Chemins de la mémoire… Dordogne. Volume 1, Conseil général de la Dordogne, 2011, p. 43-48. — Jean-Marc Parisis, Les inoubliables, récit, Paris, Flammarion, 2014.

Bernard Reviriego, Dominique Tantin

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