Né le 8 mars 1922 à Rouen (Seine-Maritime), mort des suites de ses blessures le 8 juin 1944 à l’hôpital de Guéret (Creuse) ; militant communiste du département de la Seine ; résistant FTPF.

Il était le fils de Jules Carrard et de Germaine Dubois. Orphelin très jeune, il fut élevé par ses grands-parents à Villeneuve-la-Garenne (Seine, aujourd’hui Hauts-de-Seine), commune limitrophe de Saint-Denis. Il y était toujours domicilié en 1943, 22 rue Homère Robert. Il adhéra à Saint-Denis aux Jeunesses communistes (JC).
Réquisitionné pour le STO, il fut d’abord envoyé dans la région de Bordeaux (Gironde) sur les chantiers de l’organisation Todt, destinés au renforcement du mur de l’Atlantique et plus précisément à la protection de l’estuaire de la Gironde et du port de Bordeaux. Pour échapper au départ vers l’Allemagne, il s’enfuit avec un camarade de Saint-Denis et, sur recommandation du parti communiste clandestin rejoignit alors la région de la Souterraine en Creuse. En effet, en mai 1943, les dirigeants du Parti communiste clandestin régional, avaient décidé d’organiser un camp de réfractaires STO près de Saint Maurice la Souterraine (Creuse). Ce maquis FTPF fut établi à Montautre, à la limite des communes de Saint-Pierre-de-Fursac (Creuse) et de Fromental (Haute-Vienne). Le groupe compta rapidement une trentaine de membres ravitaillés par les militants communistes et en particulier les jeunesses communistes locales. Attaqué à Montautre le 19 août 1943 par les forces de maintien de l’ordre du gouvernement de Vichy puis traqué dans tout le secteur de la Souterraine par les mêmes forces constamment renforcées, le maquis dut à plusieurs reprises changer de lieu d’installation. Jean Carrard intégra à l’automne 1943 le camp de réfractaires appelé « maquis Prachet ». Il participa alors aux actions de sabotage contre la voie ferrée stratégique Paris – Toulouse.
Très rapidement il fut envoyé fin 1943 à l’école des cadres FTPF installée en Dordogne. A son retour en janvier 1944 il devint responsable aux effectifs du maquis de la Souterraine, constitué alors de trois camps à l’est de la ville (Bridiers, Saint-Priest-la-Feuille). Devenu lieutenant FTP de la 2101ème compagnie, il dirigea le 1er février 1944 le sabotage de l’usine Centre et Lorraine de La Souterraine (usine métallurgique travaillant pour la Luftwaffe). Le 20 mars 1944, suite à une dénonciation, une vaste opération policière fut menée dans la commune de Grand Bourg, par la 20ème brigade de police de sûreté du gouvernement de Vichy appuyée par des détachements du 5ème régiment de la Garde et du GMR Berry stationné à la Souterraine, contre un maquis FTP-MOI constitué de républicains espagnols évadés des GTE (groupements de travailleurs étrangers). Quatre maquisards espagnols furent arrêtés ainsi que deux agriculteurs qui les ravitaillaient. Le soir même Jean Carrard fit mener une expédition punitive, sur la commune de Noth, contre le délateur suspecté et sa famille. Vers 21 heures, il fit exécuter au lieu-dit La Terrade, une partie des sept membres de cette famille, Léon S., son fils Ernest et sa fille Léontine (un autre fils Roger, grièvement blessé, survécut, fut arrêté en septembre 1944 mais fut relaxé suite à une enquête de police, en décembre 1944, qui ne put établir contre lui la moindre preuve de délation - AD 87 1517 W 607 -). Le lendemain, sous son commandement se produisit l’attaque à la Souterraine par une centaine de FTP, des cantonnements des GMR pour tenter en vain de libérer les prisonniers. A la suite de ces évènements, le Comité militaire régional clandestin des FTP le déplaça (car il avait été reconnu), vers le secteur de Bourganeuf (Sardent, Lépinas, Saint-Pierre-Bellevue) où il fut chargé de renforcer la 2103ème compagnie FTPF.
Le 7 juin 1944, le lieutenant-colonel « François » (Albert Fossey), chef départemental des FFI de la Creuse et du Cher dirigea la première libération de Guéret à la tête des maquis de la Creuse. Guéret fut ainsi la première préfecture métropolitaine libérée de France. Il concentra pour cette opération plusieurs maquis creusois. La 2103ème compagnie FTP arriva à Guéret à l’aube du 7 juin 1944. Elle fut engagée dès le début de l’action, contre l’un des points de résistance allemand, l’hôtel Saint-François, place Bonnyaud, siège de la Kommandantur. L’historien de la résistance creusoise Marc Parrotin a fourni un récit de la mort de Jean Carrard (Le Temps du maquis op. cit.) : « Le lieutenant Armand avance sur la place Bonnyaud à la tête de ses francs-tireurs. Le voilà qui court d’arbre en arbre en direction de la fontaine monumentale derrière laquelle il pense sans doute se poster pour partir à l’assaut de la Kommandantur…Armand menacé, change de position derrière le tronc insuffisant à le couvrir, puis se relève encore pour répondre au feu de l’ennemi. On l’entend crier Attention ! Une autre rafale. Il chancelle. Wolf Glicenstein, son vieux camarade juif, va pour le secourir et s’affaisse, atteint de plusieurs balles ». Grièvement blessé, atteint de deux balles à la poitrine, il fut transporté à l’hôpital tout proche de Guéret, avenue de la Sénatorerie. Malgré l’intervention chirurgicale, il décéda le lendemain à 6 heures du matin des suites de ses blessures. Marc Parrotin qui fut aux côtés de Jean Carrard un des chefs FTP du secteur de la Souterraine, a laissé dans son ouvrage Le temps du maquis (op. cit. p. 368 – 369)), un long récit des dernières heures du lieutenant Armand.
Il obtint le 9 juillet 1945 la mention mort pour la France, et fut homologué lieutenant FFI. Son nom figure sur le monument aux morts de Villeneuve-la-Garenne. Il est également inscrit sur le mémorial de la résistance creusoise à Guéret.
Sources

SOURCES : Alain Guérin. Chronique de la Résistance. Éditions Omnibus 2010 — René Castille in La Creuse pendant la seconde guerre mondiale Le Puy Fraud Ed.2012 — Marc Parrotin Le temps du Maquis, Histoire de la Résistance en Creuse Ed. Verso 1984 et Mémorial de la Résistance creusoise Ed. Verso 2000 — Marc Parrotin Bref historique du maquis de la Souterraine — Renseignements et archives personnelles (affaire S.) Jacqueline Gontard — Mémoire des Hommes — mémorial genweb — État civil, mairie de Guéret, registre des décès 1944 acte n° 169 et 1945 acte n°101.

Michel Thébault

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