Né le 10 décembre 1888 à Salonique (Empire ottoman, Grèce), de nationalité grecque, massacré le 21 avril 1944 au siège de la Gestapo à Lyon (Rhône), 14 avenue Berthelot (VIIe arr.) ; marchand forain ; victime civile.

Salomon, Avram Hasson était le fils d’Abraham et de Léa Beneveniste. Il naquit à Salonique, ville située à l’époque dans l’Empire ottoman et devenue grecque en 1912. Il s’établit à Üsküb (Empire ottoman) où il se maria avec Vida Saporta. Dans cette ville, devenue serbe en 1913 et rebaptisée Skopje, naquirent ses trois premiers enfants : Lucie en 1921, Julie (ou Juliette) le 10 novembre 1926 et Adrien (ou Adriel) le 19 avril 1928.
Les Hasson s’exilèrent en France en 1928 et s’installèrent à Lyon (Rhône). Ils demeurèrent 5 grande rue de la Guillotière (VIIe arr.), 8 rue Moncey (IIIe arr.) et 42 rue Montesquieu (VIIe arr.) à partir de 1936. Dès 1928, Salomon Hasson exerça la profession de marchand forain, essentiellement spécialisé dans le commerce des tissus. En 1933, Blanche, la quatrième et dernière enfant de Salomon et Vida Hasson naquit à Lyon.
Sous le régime de Vichy, Salomon Hasson, du fait de son statut de Juif étranger, fut extrêmement contrôlé et limité dans ses déplacements.
Le 30 janvier 1942, les époux Hasson, munis d’un certificat établi par un médecin, demandèrent l’autorisation de se rendre à Nice (Alpes-Maritimes). L’intendant de police de Lyon refusa de leur accorder le titre de circulation nécessaire, « le motif invoqué étant insuffisant. »
Le 18 septembre 1942, Salomon Hasson se rendit au commissariat de son quartier afin de faire proroger sa carte de circulation temporaire indispensable pour exercer son métier de forain dans le Rhône, la Drôme, l’Isère et l’Ain. Le commissaire transmit la demande à la préfecture. Il conclut sa note ainsi : « Conformément à vos instructions je vous signale que le demandeur est israélite. De bons renseignements sont recueillis sur son compte. » La réponse fut négative.
Le 27 octobre 1942, il tenta une requête différente. Il se rendit au commissariat et sollicita la délivrance d’un sauf-conduit pour se rendre à Villefranche-sur-Saône (Rhône) afin d’exercer sa profession. Le policier qui transmit la demande conclut à nouveau sa note en signalant qu’il était « israélite ». L’intendant de police de Lyon refusa de lui accorder le sauf-conduit.
Le 23 février 1943, il écrivit directement au préfet du Rhône afin d’obtenir un sauf-conduit pour Villefranche-sur-Saône (Rhône) valable chaque lundi, jour de marché : « J’exerce la profession de marchand ambulant, bonneterie, tissus, fourrures. - La validité territoriale de ma carte d’identité est : pour le Rhône et les départements limitrophes. Je me nomme Hasson Salomon, né le 10 décembre 1888 à Salonique (Grèce) [...] et demeure 42 rue Montesquieu. Je suis de race israélite. Depuis quinze ans, je fais le même travail, dans la même circonscription. J’ai quatre enfants et n’ai jamais encouru la moindre condamnation. J’habite le quartier depuis plus de quinze ans et tous renseignements peuvent être pris à mon égard. Ce sauf-conduit représente mon seul gagne-pain, pour moi et ma famille. [...] ». Le 30 avril 1943, la préfecture du Rhône lui accorda le droit d’obtenir un sauf-conduit valable trois mois.
En juillet 1943, les Hasson furent recensés en tant que Juifs. Ils demeuraient tous les cinq 42 rue Montesquieu. Adrien était apprenti fourreur et Julie, sténo-dactylo.
En janvier 1944, Salomon et Vida Hasson s’installèrent à Crépieux-la-Pape (Ain). Ils ne purent rester dans cette ville que quelques jours. Peu de temps après leur arrivée, ils furent verbalisés pour « défaut de visa à leurs cartes d’identité d’étranger ». Après cet événement, ils retournèrent dans leur logement, 42 rue Montesquieu. Le 3 février, ils furent condamnés pour cette infraction à 600 francs d’amende par le tribunal correctionnel de Trévoux (Ain). A la suite de l’intervention du secrétaire général au Maintien de l’ordre demandant un « sévère avertissement », l’intendant de police de Lyon écrivit le 18 avril 1944 au commissaire central : « J’ai l’honneur de vous faire connaître que le nommé Hasson Salomon […] ne fera pas actuellement l’objet d’une mesure d’expulsion, mais […] Je vous prie d’aviser cet étranger qu’à la première faute qu’il viendrait à commettre, il serait immédiatement expulsé de France. [...] »
Le 6 mars 1944, Salomon Hasson fut arrêté par la Gestapo au café du Mâconnais situé cours Gambetta (Lyon) avec plusieurs personnes juives. Sa femme, son fils Adrien et sa fille Julie furent arrêtés le même jour à leur domicile. Les policiers allemands vidèrent l’appartement, ne laissant que les meubles. Les quatre membres de la famille Hasson furent conduits à l’École du service de santé militaire, siège de la Gestapo, 14 avenue Berthelot (Lyon, VIIe arr.). Ils furent ensuite amenés à la prison de Montluc (Lyon). Adrien fut incarcéré dans la Baraque, Julie dans la cellule 3 et Salomon Hasson dans le Réfectoire semble-t-il. Vida, Adrien et Julie Hasson furent transférés au camp de Drancy le 21 ou 22 mars puis déportés à Auschwitz le 27 mars 1944 par le convoi numéro 70.
Le 21 avril 1944, vers 20 heures, Salomon Hasson fut exécuté avec Bernhard Kleimann par des policiers allemands dans la cour principale de l’École de santé militaire, avenue Berthelot. Prévenue vers 21h30 par les Allemands, la police française se présenta sur les lieux. Les policiers trouvèrent les deux corps dans la cour principale, à gauche de la porte d’entrée, couchés sur le dos, une flaque de sang sous la tête. Un policier allemand leur remit un passeport, un récépissé de déclaration, un permis de conduire et une carte d’acheteur de textile appartenant à Salomon Hasson, ainsi qu’un papier sur lequel était inscrit les identités des victimes. Les policiers français firent transporter les cadavres à l’Institut médico-légal et constatèrent que Salomon Hasson portait six blessures par balles, trois entrées par le cou, côté droit et sorties au sommet de la tête, côté opposé, et trois entrées au milieu du dos et sorties au bas de la poitrine. Le médecin légiste précisa que l’une des trois balles tirées dans le dos avait atteint le bras droit, fracturant l’humérus.
Le 22 avril, Maurice Eisner, employé de la synagogue, quai Tilsitt (Lyon), se présenta à l’Institut médico-légal et reconnut formellement Salomon Hasson. Son corps fut également identifié le lendemain par Anne Berohiel, sœur d’Albert Berohiel et belle-sœur de Lucie Hasson, la fille de Salomon. Le 26 avril 1944, Salomon Hasson fut inhumé au cimetière juif de Lyon - La Mouche (VIIe arr.).
Adrien et Julie Hasson furent rapatriés d’Allemagne en 1945. Le beau-père de Lucie Hasson, Samuel Berohiel, fut également arrêté le 6 mars 1944 et interné à Montluc (dans le Réfectoire semble-t-il. On trouve dans une liste du Réfectoire un certain « Berdhiel » à côté d’un certain « Hasson »). Il fut également déporté à Auschwitz par le convoi numéro 70.
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Rhône, 3808W972, 3335W22, 3335W8 (fiches et dossiers de Kleimann et Salomon Hasson), 3335W27, 3335W19 (fiche et dossier d’Adrien Hasson), 45W50, 6M724, 829W298, 4544W54 (archives du procès Barbie, copies de documents conservés sous les cotes 3335W8 et 3808W972).— Arch. Mun. Lyon, acte de décès 449 (VIIe arr.), 1899W015, 981WP377.— Paul Garcin, Interdit par la censure, 1942-1944, 1944.— Bruno Permezel, Montluc, antichambre de l’inconnu, 1942-1944, 1999.— Site Internet de Yad Vashem.— Site Internet du Mémorial de la Shoah.

Jean-Sébastien Chorin

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