Né le 14 juillet 1899 à Flix (province de Tarragone, Catalogne, Espagne), exécuté sommairement en juillet 1944 à Servas (Gard) ou mort à Alès (Gard) de la suite des tortures qu’il subit ; résistant de l’AGE (Agrupación de guerrilleros españoles), agent de liaison de la 21e brigade de l’AGE (Gard) et de la 3e division de cette formation (Ardèche, Gard, Lozère), affecté au Maquis Bir Hakeim (AS)

Manuel Zurita était né à Flix, dans la basse vallée de l’Èbre, près du delta de ce fleuve.
Sans doute, entré en France en février 1939, lors de la Retirada qui marqua la défaite des armées de la République espagnole en Catalogne, Zurita, vraisemblablement après avoir été interné dans un camp de la côte roussillonnaise, se retrouva à La Grand-Combe, dans le bassin minier d’Alès (Gard) où beaucoup d’Espagnols, membres de Groupements de travailleurs étrangers (GTE), étaient employés à l’extraction de la houille. Il était sans doute membre du Parti communiste d’Espagne. Mais la documentation ne fait pas état de son affiliation partisane.
Il intégra à une date indéterminée la 21e brigade de l’AGE (Gard) qui elle-même formait la 3e division de l’AGE avec les brigades de la Lozère (la 15e) et de l’Ardèche (la 19e). La 3e division était commandée depuis Alès par Cristino Garcia Grandas. Manuel Zurita devint l’un des agents de liaison de Garcia Grandas.
À ce titre, il fut envoyé par ce dernier au mont Aigoual où le maquis Bir Hakeim (AS) avait établi son cantonnement au grand hôtel du Fangas (Voir Capel Jean). Pour des motifs que l’on ignore, Cristino Garcia Grandas avait mis à la disposition du maquis Bir Hakeim un contingent de guérilleros issus des brigades du Gard et de la Lozère. Ces combattants de l’AGE se trouvaient au Fangas. L’un d’eux, Casimiro Camblor fut grièvement blessé en manipulant son arme, après avoir peut-être échappé au massacre de La Parade, le 28 mai. Le 29 mai 1944, Zurita se rendit depuis Alès à bicyclette au mont Aigoual afin de récupérer Camblor. Le blessé prit place sur le porte-bagage du vélo piloté par Zurita. Ils se rendirent d’bord à La Grand-Combe où Cristino Garcia Grandas décida de son transfert à Larnac (Gard) chez Emilio Ruiz, médecin espagnol réfugié en 1939 et employé comme mineur de charbon au 805e GTE (Il était le médecin de l’AGE). Toujours à vélo, Zurita, accompagné d’un autre guérillero, Angel Suarez alias « Polencho », entreprit de transporter Camblor chez le médecin. Tous trois furent interceptés au Martinet près du château de la Plaine par des Waffen SS français de la 8e compagnie de la division Brandenburg (unité 15727 placée sous l’autorité du lieutenant SS allemand Ernst Striefler. Ces derniers appartenant à la « bande à Harry » étaient déguisés en maquisards. Casimiro Camblor fut exécuté sur place et Suarez réussit à s’enfuir (il put faire le récit de l’événement). Zurita fut capturé vivant et conduit au quartier général de la « bande à Harry », l’hôtel du Luxembourg à Alès. Les membres de la « bande à Harry » l’amenèrent avec eux, le 30 mai 1944, dans leur automobile lorsqu’ils tendirent un piège à des résistants à la ferme du Magistavol (Cassagnas, Lozère) qui permit l’exécution du résistant communiste allemand Hans Mosch et la capture de son compatriote Christian Robens. Ce ne fut que le début de l’utilisation de Zurita par les Waffen SS comme leurre afin de démanteler la résistance, en particulier les GE. En sa compagnie, ils parcoururent les routes autour de la Grand-Combe et d’Alès afin de l’inciter à dénoncer ses camarades de combat. Torturé, Zurita fut exécuté en juillet 1944 à une date indéterminée. Son corps, mutilé, fut précipité dans le puits de la mine désaffectée de lignite de Célas à Servas (Gard). Nous ignorons s’il mourut à la suite des tortures qu’il subit ou s’il fut abattu par ses bourreaux.
Le 12 septembre 1944, 31 corps déchiquetés dont celui de Manuel Zurita furent retrouvés dans le fond du puits de mine de Celas, à Servas (Gard), baignant dans l’eau. Le 18 septembre 1944, 25000 personnes participèrent à Alès aux obsèques solennelles rendues aux martyrs du puits de Célas. Le corps de Manuel Zurita ne fut pas immédiatement identifié. On crut d’abord qu’il s’agissait de celui de Christian Robens, un communiste allemand ancien des Brigades internationales qui avait lutté dans les rangs du maquis Bir Hakeim puis des FTPF-MOI avant d’être fait prisonnier par les Waffen SS français de la division Brandenburg qui sévissaient depuis Alès. L’identification de Zurita n’a pas permis de connaître le lieu d’exécution de Robens dont on a pas retrouvé le cadavre et dont l’épouse, Hedwige Rahmel-Robens, elle aussi victime des « Brandebourgeois », fut également précipitée dans le puits de Célas.
Le nom de Manuel Zurita figure sur plusieurs monuments du Gard. D’abord sur le monument commémoratif du puits de Célas, à Servas. Ensuite sur la stèle commémorative des combattants sans uniforme de la Seconde Guerre mondiale originaires et/ou résidents du canton de La Grand-Combe (limites de 1945) ; celle-ci qui se trouve au cimetière de l’Arboux, à La Grand-Combe (Gard) porte l’inscription suivante : "À nos glorieux héros sans uniforme du canton de La Grand Combe, tombés pour la libération de la France" (32 noms). Enfin sur le monument sur le monument commémoratif des morts issus de la 3e division de l’AGE (guérilleros espagnols),érigé en 2004 près du cimetière, au hameau de L’Affenadou (commune de Portes, Gard), sur la D 59 en direction du Martinet sur lequel sont inscrits 40 noms (14 du Gard, 9 de l’Ardèche, 17 de la Lozère). Sur cette première plaque figure aussi l’inscription suivante : « Aux résistants espagnols tombés en combattant l’Allemagne nazie sur le sol français. Passant souvient toi. La Liberté d’Espagne en France on l’a conquise, on l’a défendue. À tous ceux et celles dont l’Histoire a égaré le Nom. Aux 600 guérilleros espagnols de la 3e Division qui ont combattu aux cotés de leurs compagnons Français pour la Liberté de tous dans le Gard, l’Ardèche et la Lozère de 1941 à 1944. Une seconde plaque honore plus particulièrement le chef de la 3e division, Cristino Garcia Grandas : « À Cristino Garcia Chef de la 3e Division des Guérilleros Espagnols, fusillé par les franquistes à Barcelone le 21 février 1946. Le monument a été érigé à l’initiative des anciens guérilleros espagnols F.F.I. et leurs amis en juin 2004. Conçu et réalisé par Yann Liebard, sculpteur ».
Voir Servas, Puits de Célas (9, 10, 27 juin 1944 ; 11, 12 juillet 1944)
Sources

SOURCES : Éveline & Yvan Brès, Un maquis d’antifascistes allemands en France (1942-1944), Montpellier, les Presses du Languedoc/Max Chaleil éditeur, 1987, 348 p. [pp. 226, 258, 259, 314]. — Hervé Mauran, Espagnols rouges. Un maquis de républicains espagnols en Cévennes (1939-1946), Nîmes, Lacour, 1995, 255 p. [pp. 121-122]. — Hervé Mauran, « Des guérilleros espagnols dans les maquis cévenols (1943-1944) » in : Claude Émerique, Laurent Pichon, Fabrice Sugier, Monique Vézilier, La Résistance dans le Gard, Paris, Association pour des Études sur la Résistance intérieure (AERI), 2009, CDROM avec un livret de présentation, 36 p. — Aimé Vielzeuf, Terreur en Cévenne, Nîmes, Lacour Rediviva, 171 p. [en particulier, p. 156, témoignage de Ricardo Samitier]. — Mémorial GenWeb consulté le 15 novembre 2017.

André Balent

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