La nuit du 22 au 23 Août 1944 des résistants auvergnats montèrent une expédition contre un garage allemand rempli de matériel, situé proche de la mairie de Chamalières (Puy-de-Dôme). Une partie de la mission fut réussie, mais lors de leur convoyage 5 résistants furent interceptés par des soldats allemands, faits prisonniers et exécutés dans le potager du Couvent des Missions Africaines. Il fallut 4 ans pour retrouver les corps qui avaient été déplacés et enterrés ailleurs.

Le matin du 23 août 1944, vers 6 heures, un groupe de FFI venant la veille du château de Cordès, près d’Orcival (Puy-de-Dôme), vient charger du matériel à Chamalières pour le ramener à Murol, sur ordre du colonel Vidal. Ce convoi provenait de la Société des Transports automobiles de l’Administration Centrale (STAAC), 50 avenue des Thermes à Chamalières. Ce garage était semble-t-il celui du Ministère de l’Air, installé ici.
Le convoi se composait de cinq véhicules dont un camion, une camionnette et deux voitures légères, sous les ordres du lieutenant Maurice Beck. celui-ci portait un brassard tricolore et un insigne du 92ème régiment d’infanterie de Clermont-Ferrand. Seul le dernier véhicule a pu être intercepté par les troupes allemandes qui tirèrent dessus, rue Paul Bert à Chamalières. Parmi les hommes ayant pu fuir dans les autres véhicules, figure notamment Gabriel Raymond.
6 ou 7 grenades et 3 mitraillettes et un mousqueton furent trouvés dans la voiture. Un accident mécanique avait empêché le conducteur de redémarrer après les coups de feu. En outre, selon un témoin, le réservoir été crevé. La voiture fut récupérée un quart d’heure plus tard par les Allemands et poussé à bras vers la cour des bâtiments des Missions africaines qui servaient de casernement aux troupes du 95ème Régiment de Sécurité qui comprenait deux compagnies, représentant environ 300 hommes au total. Ce sont les hommes de la 2ème Compagnie qui seront considérés responsables des arrestations et exécutions.
5 jeunes volontaires des Forces françaises de l’intérieur sont arrêtés et conduits par les Allemands en salle des missions africaines où est cantonnée une compagnie du 95 éme régiment SS. Retour ligne automatique
L’interrogatoire est très bref. Les cinq hommes sont fusillés sur le champ, avant 7h20, et enterrés sur l’ordre d’un officier. Yvon Chauveix, 21 ans,est l’un des cinq jeunes FFI fusillés, aux côtés de Maurice Beck, Serge Brousse, René Pélatan, le chauffeur, et Robert Meunier.
Le même jour, vers 20 heures, les corps des cinq résistants furent déterrés et transportés à l’atelier de chargement de l’arsenal des Gravanches à Clermont-Ferrand où, selon le témoignage de trois sous-officiers allemands, ils ont été enterrés une seconde fois.
Dès le 28 août au soir, au lendemain de la Libération de Clermont-Ferrand, des fouilles sont entreprises aux Missions africaines, mais on n’y trouva que quelques affaires personnelles des victimes, des traces de sang mais pas les corps.
Ainsi, lorsque en avril 1945 une enquête est lancée pour crime de guerre à propos de ces 5 disparitions, l’auteur du rapport conclut à la possible non exécution des 5 FFI et à leur possible déportation. Il s’appuie sur cela sur un message du chef de convoi, Maurice Beck, qu’il aurait transmis à son épouse à ce propos. En effet, le 11 avril 1945, sa femme fut informée par un dénommé Marcel Desortiaux, chef des Services de Renseignements (SR), qu’un message avait été intercepté par le lieutenant Lallemand, attaché au bureau de la Place de Riom, dans lequel son mari l’informait qu’il était interné dans un camp à cinq kilomètres de Brême (Allemagne). Ceci ne put être confirmé. Au contraire, Marcel Desortiaux, lui-même beau-père d’une des cinq victimes, Serge Brousse, enquêta auprès du dénommé Lallemand et fut convaincu qu’il s’agissait d’un hâbleur qui après avoir assuré être celui qui avait reçu le message de Beck, se rétracta pour dire que c’était une autre personne dont il ne pouvait donner le nom. Marcel Desortiaux, en tant qu’ancien combattant de 1914-1918, engagé volontaire en 1939 puis membre des services spéciaux des Forces françaises combattantes dans le Réseau Goélette, sollicita directement le général commandant la 13ème Division Militaire de Clermont-Ferrand, le 17 mai 1945, pour que la vérité soit faite sur cette affaire.
L’auteur du rapport mit ainsi en doute le témoignage d’une femme faisant le ménage aux Missions africaines et ayant vu les cadavres au nom du fait qu’elle avait été la maîtresse d’un soldat allemand. Une autre femme de ménage confirma avoir vu cinq cadavres et une fosse en train d’être creusée aux Missions africaines ce matin là.
Un gendarme de la Brigade de Clermont-Ferrand, s’appuyant sur les propose du lieutenant Gauthier, alors mobilisé pour la Libération de la France, que les corps avaient été déterrés pour être enterrés à l’arsenal des Gravanches de telle façon que les corps soient pulvérisés par l’explosion des bâtiments qui eut effectivement lieu avec l’évacuation de Clermont-Ferrand par les Allemands. L’enquête estima que l’interrogatoire des soldats allemands présents permettrait seule de faire rejaillir la vérité.
L’enquête concerna le Procureur de Tulle, la Direction des Services de Police judiciaire de Clermont-Ferrand, et le Juge d’instruction du Tribunal militaire de Lyon.
Après de nombreuses recherches et fouilles demandées par les parents des victimes, les cinq corps furent retrouvés et exhumés le 4 mars 1949 à l’Arsenal des Gravanches de Clermont-Ferrand en présence des familles et des autorités locales. Cette découverte fut possible grâce à la présence sur les lieux de 3 des ex-militaires du 95ème Sicherungs Régiment cantonné à Chamalières en août 1944 et qui, démobilisés, purent être joints en Allemagne par les familles des victimes. Ces trois hommes avaient, sur ordre, procédé le 23 août 1944 vers 23 heures à l’inhumation aux Gravanches des corps des 5 hommes exécutés le matin même à Chamalières par un peloton du 95ème RS. Les corps furent recouverts de chaux et de paille. Le capitaine Schuck qui avait ordonné de creuser la fosse, indiqua aux soldats présents que les victimes étaient des civils.
Ceux-ci permit d’établir que les responsables du massacre étaient l’ex commandant Bauer, l’obertleuntnant Fridrich Wesp et l’ex Oberleuntnant Willmes. Les fausses déclarations de l’ex capitaine Lorenz Schuck, prétendant que les victimes avaient été incinérées, n’avaient pas permis jusqu’à cette date la découverte des restes des fusillés. Schuck avait bénéficié d’un non-lieu par le Tribunal militaire en 1947 mais cette fausse déclaration et ce recel de cadavres permit de reprendre l’information à son encontre.
Les obsèques furent célébrées le 7 mars 1949 en la cathédrale de Clermont-Ferrand.
Une Stèle Commémorative a été érigée rue des Galoubies à Chamalières, sur l’espace de l’ancien couvent, où sont inscrits sur une plaque les noms des 5 fusillés et leurs âges. « Ici, le 23 Août 1944 ont été fusillés par les Allemands 5 Volontaires F.F.I. »
Après-guerre, on releva plusieurs points à éclaircir sur les circonstances du drame. D’une part, les véhicules devant servir à la mission n’avaient pas été préparés par le personnel employé au garage, contrairement à ce qui avait été prévu. Cela obligea les hommes du groupe franc a travailler toute la nuit pour les mettre en état.
D’autre part, il manquait un homme au rassemblement, celui qui en vélo devait précéder le détachement pour s’assurer que la route était livre. S’il avait été là, il aurait vu que rue Colbert il y avait ce jour là un ou deux fusils mitrailleurs en position de tir. Quand on voulut savoir ce qu’il était advenu de ce cycliste après-guerre, on apprit qu’il avait été tué. Mais la personne qui demande une enquête par lettre du 18 mars 1949 envoyée de Tulle, sur ce qu’elle qualifie de sabotage de cette mission, indique que le cycliste n’était pas mort en réalité. Il fut même nommé sous-lieutenant mais la personne qui demande une enquête n’a pu obtenir son identité auprès des survivants du groupe franc, en particulier du sous-lieutenant Loiseleur, celui-ci ayant prêté serment de ne pas divulguer les noms.
Enfin, le 3ème élément attestant de dysfonctionnements dans cette mission, serait qu’un ordre de sursoir à l’opération serait parti du Poste de commandement mais ne serait pas arrivé à destination. Le colonel Vidal qui devait monter dans la voiture du Commandant du groupe ne s’est pas rendu sur les lieux. L’auteur de la lettre demandant des éclaircissements précise qu’il n’a pu en savoir plus, les hommes du groupe étant liés par leur parole d’honneur, avec parmi eux le frère de Guy Chauveix, employé de la Banque de France à Chamalières.
Liste des victimes
BECK Maurice
MEUNIER Robert
CHAUVEIX Yvon
BROUSSE Serge
PELLETAN René
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Puy-de-Dôme, 908 W 205 : Crimes de guerre à Chamalières. — Quotidien régional La Montagne. — Mémorial Genweb.

Eric Panthou, Huguette Juniet

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