Né le 20 mars 1897 à Saint-Symphorien-de-Lay (Loire), exécuté le 16 juin 1944 à à Saint-Didier-de-Formans (Ain) ; cheminot ; résistant.

Étienne Mignard était le fils de Victor Joannes (1870-1935), employé de commerce puis clerc de notaire et de Jeanne Marie Emilie Imbert (1871-1949). Il était l’aîné d’une fratrie de cinq enfants.
Il obtint son bac puis il devança l’appel le 9 janvier 1916 pour combattre les troupes allemandes. Il fut mobilisé au 14e Bataillon de Chasseurs à Pied de Grenoble (Isère) qui partit combattre dans les Vosges (sanglantes opérations au Linge), à la bataille de la Somme, dans le secteur de Reims (Chemin des Dames, Craonne) et pour finir en Italie. Il fut blessé trois fois. Décoré de la médaille militaire et de la Croix de Guerre, il fut démobilisé le 19 septembre 1919.
Le 1er septembre 1920, il fut embauché à la compagnie ferroviaire PLM à la gare de Veynes (Hautes Alpes) comme facteur aux écritures à l’essai. Il se maria le 9 janvier 1921 à Grenoble (Isère) avec Blanche Dussert (1896-1982), le couple eut deux enfants, en 1928 et 1930.
Il rejoignit la gare de Sisteron en juin 1921 où il fut titularisé en septembre de cette même année. Il fut ensuite muté en gare de Tullins-Fures (Isère) en janvier 1923, à Vinay (Isère) comme facteur enregistrant en mars 1924 puis Grenoble en janvier 1926. En mars 1928 il fut nommé et muté à Miramas comme sous/chef de gare 3e classe (SCG3) puis Toulon (Var) en août 1930. En décembre 1924 il fut muté et nommé en gare de Lyon Perrache comme sous/chef de gare 2e classe puis nommé sous/chef de gare 1ère classe en septembre 1940. La famille logea au 101 du cours Charlemagne dans le deuxième arrondissement de Lyon à deux pas de la gare.
En 1940, lors de l’invasion des allemands en France et en Europe, l’ancien combattant de 14-18 vit très mal cette situation. Petit à petit il rejoignit la résistance notamment en intégrant le Réseau Nap-fer. Commençant par distribuer secrètement la presse clandestine, il profita de ses responsabilités de sous-chef de gare pour embaucher des jeunes résistants et les soustraire au travail obligatoire en Allemagne.
Grâce à son poste, il put observer toutes les circulations ferroviaires et donna des informations précieuses sur les déplacements des TCO allemands (transports en cours d’opération). Il faut noter que dès l’été 1942 les informations stratégiques ferroviaires furent transmises à Londres en vue de la préparation d’un débarquement de forces alliées. C’est la mise en place du fameux « plan vert » par le Nap-Fer. Ce plan vert aura une redoutable efficacité sur les mouvements ennemis. Lors du débarquement allié de juin 44, les trains de troupes allemandes ne pourront jamais arriver à temps sur le front de l’Ouest. On estime qu’à la suite des sabotages ferroviaires, 10 à 15 divisions ennemies furent dans l’impossibilité de rejoindre la Normandie et de procéder à l’encerclement prévue des forces alliées. De Gaulle et Eisenhower rendront hommage appuyé aux cheminots pour ces actions.
Les renseignements collectés vont également pour une grande part en direction des réseaux, du maquis et des groupes francs.
Étienne Mignard œuvre dans le réseau Nap-fer (qui deviendra Résistance-Fer), comme agent P2 en qualité de chargé de mission 3e classe homologué sous-lieutenant.
Le 3 mars 1944 vers 16h45, deux policiers allemands se présentèrent à la porte 112 du bâtiment voyageurs de la gare de Lyon-Perrache et le demande. Après quelques secondes d’entretien dans le couloir, ils l’emmènent pour « l’interroger ». Étienne Mignard futemprisonné au fort Montluc à Lyon le 23 mars 44 pour activité antiallemande.
Le 16 juin 1944 au soir il fut appelé « sans bagages » avec 30 camarades, dont Marc Bloch, historien médiéviste de renom et poète ainsi que Lucien Bonnet responsable régional des groupes francs et de l’Armée secrète du MUR. Ils furent conduits de la prison à Saint-Didier-de-Formans (Ain) dans un champ au lieu- dit les Roussilles pour y être exécutés par les allemands. Deux autres cheminots périrent à ses côtés, il s’agissait de Fabien Roussel, agent du dépôt de Lyon-Vaise, militant CGT et de Marius Gayet, manœuvre spécialisé au dépôt de Chambéry, résistant communiste, reconnus par Résistance Fer. On relève deux survivants de cette tuerie, le corps criblé de balles, Jean Crespo (mort le 17 avril 1948 à Marseille des suites de ses blessures) et Charles Perrin dit « Vauban ».
Étienne Mignard mourut fusillé à l’âge de 47 ans. Ayant été dépouillé de ses papiers, c’est bien plus tard que sa femme reconnut le corps n°1 dans la documentation photographique présentée par la gendarmerie de Trévoux. Sa dépouille, ayant été inhumé sous le numéro 1 au cimetière de Saint Didier de Formans fut rapatrié, il repose désormais dans le caveau familial du village de Saint Symphorien de Lay.
Sa mémoire est honorée aux monuments aux morts de Saint-Symphorien-de-Lay, Saint-Didier-de-Formans, cimetière de la Croix-Rousse à Lyon 4ème, sur la stèle des cheminots de la gare de Lyon-Perrache morts pour la France en 1939/1945 et sur la sur la stèle régionale SNCF de Lyon (ex-4ème arrondissement du réseau Sud-Est), porte Saône de la gare de Lyon Perrache. La mention mort pour la France est apposée sur son acte de décès en 1945. Il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur le 30 septembre 1959 puis Officier. Il est homologué FFC et le titre d’Interné Résistant lui a été attribué le 1er février 1956.
Sources

SOURCES : Archives SNCF de Béziers. —Site « Guide des recherches SNCF pour la période 39/45 » 118LM110/002, 266LM003/007. — AVCC Caen, 21 P516 561 et SHD cote GR 16 P 418563. — Mémorial de l’Oppression, Archives Départementales du Rhône, recherches Frédéric Couffin. — A.D. du Rhône, archives Montluc. — IHS CGT cheminots, Lyon.

Robert Goujon

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