Née le 24 octobre 1904 à Saint-Cyr (Haute-Vienne), massacrée le 10 juin 1944 à Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne) ; sans profession ; victime civile.

plaque famille Darthout -Lamaud, cimetière Oradour-sur-Glane
plaque famille Darthout -Lamaud, cimetière Oradour-sur-Glane
crédit : Isabel Val Viga
Anne Lamaud était la fille de Jean (né le 13 mai 1871, à Saint-Cyr), et de son épouse Anne née Lamaud (née le 1er mars 1882, à Saint-Cyr), cultivateurs. Ses parents s’étaient mariés le 19 février 1898 à Saint-Cyr.
Le 7 avril 1923 à Saint-Victurnien, elle épousa François Darthout (né le 24 avril 1898, à Saint-Victurnien), cultivateur, puis facteur. De cette union naquirent deux garçons, Jean Marcel (né le 12 octobre 1924, à Saint-Victurnien) époux de Louise Yvonne Angèle Georges*, Aimé (né le 6 septembre 1926, à Saint-Victurnien).
Elle était domiciliée avec sa famille au Bourg d’Oradour-sur-Glane.
Son époux échappa au massacre, facteur il était en tournée dans le village voisin. Son fils Jean Marcel, fut mitraillé dans la grange Laudy, blessé, il réussit à s’échapper. Son fils Aimé, passait son CAP mécanicien à Limoges.
« François Darthout : ’’J’habitais depuis septembre 1942 ce coquet petit village situé sur les bords de la Glane, charmante petite rivière si cher au grand peintre Corot.’’ »
« (…) Le samedi 10 juin, date désormais inoubliable pour moi, je suis parti comme d’habitude faire ma tournée après avoir laissé les miens, souriants et bien portants. Vers 14h30, alors que je me retrouvais à trois kilomètres du Bourg et que ma tournée tirait à sa fin, j’entendais tout à coup des coups de feu. (…) Je me dépêche de finir le village où j’étais et je pars dans la direction d’Oradour. (…) Voulant en avoir le cœur net, je monte sur une côte et de là, sur le haut d’un arbre, j’ai assisté au plus effroyable spectacle, la j’ai vu mettre le feu à une partie du Bourg, (…) j’ai vu mettre le feu à ma pauvre maison, une détonation, une fumée noire et instantanément tout flambait. (…) Je suis allé me réfugier chez un oncle. »

« Après une nuit passée dans l’anxiété, le dimanche matin j’appris par des gens du voisinage que mon fils aîné gisait blessé dans un champ de blé à quelques centaines de mètres du Bourg. Je partie aussitôt ainsi que deux amis et j’eus l’heureux bonheur de retrouver mon cher fils avec quatre balles dans les jambes et l’épaule gauche brûlée, mais vivant. A travers bois, par de vieux chemins, nous le transportons chez mon oncle. Mais toujours aucun nouvelle des femmes. Vers 14 heures avec un camarade qui lui aussi avait perdu sa mère, sa femme et ses quatre enfants, nous nous rendons à Oradour. A travers les ruines fumantes nous cherchons. Arrivé à l’église que nous contournons, nous nous approchons par la petite chapelle Sainte-Anne. Quelle affreuse et inoubliable vison d’horreur s’offre à nos yeux, des corps enchevêtrés les uns sur les autres et d’une hauteur d’au moins soixante centimètres brûlaient comme s’ils avaient été du charbon, et une fumée noire et acre nous empêchait de pénétrer à l’intérieur de l’église. Là, j’ai compris que je devais perdre tout espoir de revoir ma pauvre femme et ma belle-fille. »
« Marcel Darthout revenu à son domicile cherche à fuir ’’par les jardins en direction de la Glane. (…) Arrivé au bout du jardin, je me suis aperçu que les Allemands déployés en tirailleurs cernaient le bourg, ce qui m’ a obligé à revenir à la maison . Peu d’instants après, un Allemand est venu faire irruption dans notre cuisine. Il tenait un fusil à la main et, avec son canon, il nous a poussés dehors, ma femme, ma mère et moi sans ménagement. Dans la rue nous nous sommes joints aux voisins et tous ensemble nous avons été conduits au champ de Foire où il y avait déjà passablement d’habitants. D’autres sont arrivés, peu à peu la place s’ est remplie.’’ »
« A 14 heures, je me trouve là, chez le coiffeur. Soudain nous voyons surgir des véhicules remplis de soldats allemands. Je décide alors de rentrer chez moi, et de m’y cacher. (…) Les femmes et les enfants sont dirigées vers l’église. Les hommes, eux, sont rassemblés en plusieurs groupes. Le groupe dont je fais partie est le dernier ; nous sommes soixante trois personnes dirigés vers la grange Laudy. Nous stationnons là, près d’une porte condamnée. En face de nous, à une quinzaine de mètres, des Allemands installent deux mitrailleuses légères, les arment, s’étendant près d’elles, et attendent... (…) Au bout d’un assez laps de temps, nous parvient comme une explosion ; un grand bruit ; un ordre ; et puis ça commence à tirer de partout ...Je suis alors un des tout premiers à ’’plonger’’ ; mais me voilà quand même blessé aux jambes. Étendu, j’attends. Tout le monde tombe sur moi. Puis tout cesse. Plus personne. Plus de bruit. Rien. Autour de moi, j’entends des gémissements, des râles. Les Allemands viennent, montent sur le ’’tas’’, et tirent des coups de fusils sur ceux qui bougent. (…) Après avoir considéré que tout le monde est mort, les Allemands nous recouvrent de paille et de fagots. Puis ils repartent. Le calme revient. (…) Des Allemands réapparaissent. Ils font feu sur nous … Je suis en chemise, elle brûle aussitôt ; puis ce sont mes autres vêtements ; puis mes cheveux. J’essaie de me déshabiller. (…) Et nous partons ; nous nous retrouvons à cinq. Nous nous réfugions au-dessus d’un coin de grange. Blessé aux jambes, je ne peux avancer. Les autres me saisissent, me poussent, me tirent vers le haut. On grimpe sur la barge ; et je retombe de l’autre coté. Nous voici tapis là-haut, sur cette barge. Nous ne bougeons pas . Soudain, arrivent deux Allemands. Sans bruit, nus nous recouvrons de paille de haricots. Un des soldats monte à la petite échelle, jusque vers notre cache. Il craque une allumette ; elle s’éteint. Il en craque une seconde ; ça marche : il allume une paille de haricots. Tout se met à flamber instantanément. Lui, il s’en va. Nous, face aux flammes, nous reculons. Nous, descendons. Maintenant, la grange entière brûle. Alors, nous nous glissons dans les étables à lapins adjacentes. Robert Hébras et moi, nous y parvenons les derniers. Il y a là de l’eau, pour que les lapins s’abreuvent ; elle est un peu ’’rouillée’’ ; mais qu’importe : j’en bois. Ensuite, nous sortons d’ici. Robert part dans la campagne. Moi, j’avance comme je peux : à plat ventre, debout, à quatre pattes, en rampant. Au passage, je vole même une serviette qui sèche. Je suis blessé, certes ; mais vivant. Je me réfugie dans une haie située à trente mètres environ du cimetière. J’ reste jusqu’à la nuit. Je peux alors m’échapper, à la faveur de l’obscurité. »

Elle fut victime du massacre perpétré par les SS du 1er bataillon du 4e régiment Der Führer de la 2e SS-Panzerdivision Das Reich et brûlée dans l’église avec sa belle-fille et l’ensemble des femmes et des enfants d’Oradour-sur-Glane.
Anne Lamaud obtint la mention « Mort pour la France » par jugement du tribunal de Rochechouart du 10 juillet 1945.
Son nom figure sur le monument commémoratif des martyrs du 10 juin 1944 à Oradour-sur-Glane.
Son époux et ses fils, seront des habitants du village provisoire.
Son époux, décède le 11 mai 1956 à Oradour-sur-Glane.
Son fils Jean Marcel, sera témoin au procès de Bordeaux. Il adhéra dès sa création en 1945 à l’association des Familles de Victimes d’Oradour-sur-Glane et se dévoua à cette cause en devenant rapidement l’un de membres les plus actifs du conseil d’administration. De 1946 à 1984, sa carrière professionnelle l’amena à quitter le Limousin pour Paris. Il contribua de maintes manières à porter témoignage des événements du 10 juin 1944 et à faire en sorte que le souvenir de ces atrocités empêches à jamais leur récidive. En 1984, il revient vivre dans son village natal, où il assumera dès 1985 la vice présidence de l’Association. Président de l’association des Familles de Martyrs d’Oradour-sur-Glane entre 1992 et 2000. Officier de la Légion d’honneur le 13 juillet 2009. il décède le 4 octobre 2016, inhumé à Oradour-sur-Glane.
Sa mère décède le 2 mai 1959 à Cognac-la-Foret.
Voir Oradour-sur-Glane
Sources

SOURCES : Liste des victimes, Centre de la Mémoire d’Oradour-sur-Glane. — Guy Pauchou, Dr Pierre Masfrand, Oradour-sur-Glane, vision d’épouvante, Limoges, Lavauzelle, 1967, liste des victimes, pp. 138-194. — MémorialGenWeb. — Archives État civil de la Haute-Vienne, actes de naissances, mariages, décès, recensements, registre de matricule militaire. — Extrait d’une lettre adressée à Mr Brun, le 16 novembre 1944, par François Darthout, Centre de Mémoire. — Extrait du témoignage de François Darthout, après le drame, Centre de Mémoire. — Jean-Jacques Fouché, Oradour, éditions Liona Levi, piccolo histoire (p136). — Louys Riclafe et Henri Demay, Paroles de miraculés, témoignage de Marcel Darthout, éditions L’Harmattan (p76 à 78). — Dossier de presse de l’Élysée (septembre 2013).

Dominique Tantin, Isabel Val Viga

Version imprimable