FAVARO Arthur [FAVARO Arturo, francisé en Arthur]
Né le 14 février 1902 à Cadoneghe (province de Padoue) en Vénitie (Italie), exécuté sommairement le 13 juin 1944 au Fenouillet, commune de la Roque-d’Anthéron (Bouches-du-Rhône) ; mécanicien ; militant communiste de Miramas (Bouches-du-Rhône) ; résistant, membre des Francs-tireurs et partisans (FTP), FFI, participant au maquis de Sainte-Anne.
Vers 1925, il quitta l’Italie à pied où il était recherché et gagna la région lyonnaise où il travailla comme ouvrier mécanicien à l’usine Berliet. Il fréquenta à Vénissieux un restaurant tenu par Jean Giorda dans lequel se retrouvaient des travailleurs italiens. Il y rencontra la fille du patron, qui allait devenir sa femme. Le 19 janvier 1929, Arthur Favaro et Adèle, Elvire Giorda se mariaient, avec l’accord des parents de cette dernière, âgée de quinze ans et trois mois. D’après le recensement de la population, ils vivaient en 1931 au 50, rue de la Borelle avec leur premier enfant. Antonio, un des frères d’Arthur, l’avait rejoint et vivait à la même adresse, employé comme menuisier par l’entreprise SOMUA.
On connut sept enfants au couple Favaro : Armand en 1929, Marie en 1932, Thérèse en 1934, Georges en 1936, Michel en 1938, Colette en 1940 et René en 1942 ; deux autres étaient morts en bas âge.
Licencié en 1933, Arthur Favaro se rendit dans le Midi pour faire les vendanges. Il travailla ensuite comme ouvrier spécialisé à l’usine Kuhlmann de Miramas (Bouches-du-Rhône) et s’installa aux Cités Jardin avec sa femme, leurs enfants et sa mère, Teresa Favaro. Celle-ci, qui venait régulièrement à la Cité Bertrand jouer aux cartes avec des amis italiens, vit un appartement s’y libérer. La famille emménagea donc dans cette ancienne caserne de la guerre de 1914-18, aménagée depuis pour en faire des appartements et habitée par un grand nombre d’Italiens.
A la déclaration de guerre, Teresa Favaro prit peur. Elle avait de très mauvais souvenirs de la Première guerre et préféra retourner vivre en Italie, croyant que les Allemands apporteraient une évolution positive.
Militant communiste, Arthur Favaro rejoignit les FTPF, sous-secteur Nord des Bouches-du-Rhône, le 15 janvier 1943. Il intégra alors, sous le matricule 52047, le détachement de Miramas, sous le commandement de Joseph Chionchini, alias "Commandant Gay".
La même année, des troupes de l’armée italienne investirent la Cité Bertrand, s’installant de l’autre côté de la cour qui les séparait des locataires. Elles utilisèrent les anciennes cuisines militaires et aménagèrent des dortoirs. Marie Favaro, la fille aînée d’Arthur, qui n’avait alors pas conscience de la gravité des événement, garda en mémoire l’atmosphère festive qui régnait le soir dans la cité, quand les soldats chantaient et jouaient de l’accordéon.
Comme Arthur Favaro était habile de ses mains et qu’il avait de nombreux enfants à nourrir, il exerça plusieurs activités illégales qui l’amenèrent parfois à côtoyer l’ennemi de près. Avec des collègues de chez Kuhlmann, il fondit par exemple des pièces de monnaie des années 1920, qui contenaient un peu d’or, pour en faire des bagues. Il en vendait aux officiers allemands en leur donnant rendez-vous chez lui. Il se fabriqua d’ailleurs une chevalière, qui permettra plus tard de le reconnaître. Il produisit également de la viande non déclarée. Certains clients venaient de Marseille pour la lui acheter.
Lorsque l’occupation italienne prit fin, des troupes allemandes vinrent dans la Cité Bertrand arrêter les soldats italiens encore présents. Favaro aida des officiers italiens à s’échapper, tandis que ceux qui étaient pris étaient enfermés dans l’école Jean Macé des garçons. Un soir il fut surpris par des soldats allemands alors qu’il était occupé par sa production de viande dans un cabanon attenant à son logement. Les Allemands lui ordonnant d’ouvrir, il camoufla la viande sous une couche de foin. Mais les soldats la découvrirent en tâtant avec leurs baïonnettes. Il n’eut toutefois pas d’ennuis car l’occupant avait là d’autres priorités.
Dans le jardin qu’il exploitait il creusa une tranchée, qui servit un temps à la famille pour s’abriter lors des bombardements.
Le 5 juin 1944, le message « Méfiez-vous du toréador » passa sur Radio Londres pour avertir les résistants de l’imminence du débarquement en Provence. Néanmoins, entre-temps l’opération fut repoussée au 15 août. Le 11 juin 1944, il rallia, sur ordre, avec son détachement, le maquis de la Chaîne des Côtes.
Suite à une dénonciation, l’armée allemande encercla le plateau de Manivert dans la colline de Sainte-Anne, où étaient retranchés près de 400 maquisards. Malgré leur courage et les dommages considérables qu’ils infligèrent aux troupes d’occupation pendant toute la journée du 12 juin, les résistants durent faire face à un ennemi supérieur en nombre et à un manque de munitions. Pour les obliger à se rendre les Allemands mirent le feu au maquis.
Après qu’un ordre de dispersion leur fut donné, les résistants furent les proies d’une chasse à l’homme à travers la Chaîne des Côtes. Beaucoup furent capturés, la plupart d’entre eux torturés et fusillés. Le soir on comptait 62 morts parmi les maquisards. Arthur Favaro fut pris et conduit rue d’Italie à Marseille pour être torturé par la Gestapo.
Le 13 juin, il fut amené dans la clairière du Fenouillet, entre Charleval et La Roque-d’Anthéron, avec 27 autres prisonniers, et fusillé.
Leurs corps ne furent retrouvés que le 6 octobre 1944. Des habitants des alentours avaient préparé une enveloppe pour chacun des fusillés contenant des effets personnels. Ils avaient mis de côté la chevalière d’Arthur Favaro et un morceau du pantalon de velours côtelé qu’il portait le jour de son exécution. Il fut reconnu par sa famille après exhumation et sur déclaration du docteur René Corriol, médecin à la Roque-d’Anthéron. Le lendemain, il fut transféré à Miramas où il fut inhumé.
Homologué sergent à titre posthume, il fut décoré de la Médaille de la Résistance par décret du 17 décembre 1968. On lui attribua les mentions « Mort pour la France » et « Interné résistant ». Le Service historique de la Défense de Caen dispose de documents le concernant.
Son nom est gravé sur la stèle érigée dans la clairière du Fenouillet et sur le mémorial du maquis de Sainte-Anne à Lambesc. Il figure, à Salon, sur le monument de la Résistance du Val-de-Cuech, et, à Miramas, sur le monument aux morts et la plaque commémorative du hall de la mairie.
En septembre 1954, la ville de Miramas donna le nom d’Arthur Favaro à une fraction de la rue Gabriel Péri, celle où était située sa maison. La municipalité y dévoila également en 2009 une plaque pour lui rendre hommage.
Voir La Chaîne des Côtes et ses environs, Lambesc, Charleval, La
Roque-d’Anthéron, Le Fenouillet (Bouches-du-Rhône), 11 -
13 juin 1944
SOURCES : AVCC Caen, 21 P 244, listes de décédés et arrestations, dossiers 21P 182710 et 21P 627496. — Arch. Musée de Lambesc. — Recensement de la population de Vénissieux (Rhône), 1931, 6 M 693. — Arch. communales Miramas. — Miramas info, n°117, avril 2012, p. 25. — Article de La Provence sur Miramas : « Qui est Arthur Favaro dont une rue porte le nom ? ». — Certificat de mariage, Vénissieux, 1929, EP 32872. — Certificat d’appartenance aux FFI, signé par le colonel Simon, ex-chef régional FFI R2, au nom du général Astier de Villate, représentant de la IXe région militaire (Marseille), daté du 12 janvier 1948. — Lettre de Roger Lazard, maire de Miramas, du 22 septembre 1954. — Mémorial GenWeb. — État civil. — Témoignage de la famille. — Témoignage complémentaire de sa fille aînée Marie (mai 2021).
Robert Mencherini, Renaud Poulain-Argiolas