Né le 25 février 1892 à Moulins (Allier), fusillé le 1er septembre 1942 à Cologne (Allemagne) ; percepteur ; résistant au sein du réseau Confrérie Notre-Dame (CND)- Forces françaises combattantes (FFC) dans les Deux-Sèvres.

Gabriel Richetta
Gabriel Richetta
Crédit : site web de l’Afmd-Allier
Thouars
Thouars
Crédit : page web de l’Afmd-Allier
Gabriel Richetta était le fils de Clarisse Richetta, domestique, alors âgée de 21 ans, née à Sevelinges (Loire), fille de Antoine et Caroline Regaldo, et d’un père inconnu.
Devenu employé de bureau, il résidait à Paris, rue de Sèvres (VIe arr.), lorsqu’il fut convoqué pour effectuer son service militaire en 1913 dans le 165e RI au sein duquel il combattit pendant la Grande Guerre. Nommé caporal le 13 septembre 1914, il fut promu sergent le 18 janvier 1915. Porté disparu au bois des Caures le 23 février 1916 au début la bataille de Verdun, il fut capturé par les Allemands et resta en captivité jusqu’au 7 décembre 1918. Il tenta de s’évader à cinq reprises et termina la guerre dans un camp de représailles. Il aurait été titulaire de la Croix de Guerre 1914-1918, mais son registre matricule militaire ne mentionne pas l’attribution de cette décoration.
Le 23 juin 1919, à Thenon (Dordogne), il épousa Antoinette Andrée Parret, née le 11 janvier 1899 à Castets (Landes). De cette union naquirent trois enfants, Jacqueline née le 12 juillet 1920 [épouse Berlet], Jean né le 19 août 1925 et Claude né le 17 juillet 1932. Gabriel Richetta devint percepteur des contributions directes à Oiron (Deux-Sèvres). Il était domicilié à Thouars, 30 rue Denis Papin, où sa femme exerçait la profession de chirurgien-dentiste. En 1939, il fut affecté spécial dans l’administration des finances.
Gabriel Richetta rejoignit très tôt la Résistance. Avec André Chauvenet, chirurgien à l’hôpital de Thouars, il organisa un petit groupe d’abord autonome. Selon le témoignage de son épouse (déposé au Centre régional Résistance et Liberté de Thouars, et en ligne sur le site de l’Afmd de Allier) :
« Au début d’octobre 1940 Richetta s’est mis sous les ordres du docteur Chauvenet, chirurgien à l’hôpital de Thouars (Deux-Sèvres) en apportant à celui-ci les éléments qu’il avait lui-même de son côté et de sa propre initiative organisés. Création d’une organisation paramilitaire dès juin 1940, d’abord seul, puis en qualité d’adjoint du docteur Chauvenet à qui M. Richetta a fait connaître ses agents et les dépôts d’armes déjà en voie de formation.
En 1940 M.Richetta, percepteur dans la commune de Oiron, commune située à une dizaine de kilomètres de Thouars, disposait d’une voiture, d’un laissez-passer et d’un peu d’essence. Il visitait treize communes et connaissait beaucoup de gens. Ses activités de résistance […] avaient d’abord consisté dans la récupération d’armes et de munitions, il a même été sur la piste d’un char de combat. Par la suite elles s’étaient orientées vers le recueil de postes radio émetteurs récepteurs (dont plusieurs avaient été parachutés à Tourtenay), la recherche de renseignements, l’acheminement du courrier, les liaisons en tout genre… »
Il intégra par la suite, sous le pseudonyme de Moulins, la Confrérie Notre-Dame (CND), réseau crée dès l’été 1940 par Gilbert Renault (alias Colonel Rémy) et affilié aux services secrets de la France libre, organisation connue par la suite sous le nom de CND Castille. Ce réseau, l’un des plus importants avec Alliance, avait pour mission de collecter et de transmettre des renseignements à Londres (notamment sur les mouvements de la flotte allemande) et rayonna dans toute la zone occupée. Ce fut dans l’ouest de la France que le réseau s’implanta d’abord, avec la participation du groupe thouarsais.
Au printemps 1941, l’opérateur radio de la CND, Bernard Anquetil (alias Lhermitte) fut déplacé de Nantes vers le nord des Deux-Sèvres et pris en en charge par les résistants du groupe Chauvenet-Richetta. Il put émettre depuis le château d’Auboué puis de l’hôpital de Thouars et du service de radiologie du Dr André Colas (Nick). Les renseignements transmis aidèrent les Alliés à couler le Bismarck et immobiliser le Scharnhorst. Bernard Anquetil fut arrêté à Saumur le 30 juillet 1941 et fusillé au Mont-Valérien le 24 octobre. Robert Delattre (Bob) lui succéda, et d’août à octobre les résistants thouarsais réceptionnèrent quatre parachutages de matériels de transmission sur le territoire de la commune de Tourtenay.
Gabriel Richetta participa donc à l’hébergement des agents de liaison et des opérateurs radio avec leur poste d’émission, à la transmission du courrier et dà la récupération et du transport d’armes et de munitions
Le groupe thouarsais de la CND fut décimé par la répression au cours du premier semestre de 1942. André Chauvenet fut arrêté le 21 janvier ; il sera rapatrié de Buchenwald en avril 1945. André Colas, arrêté le même jour, sera libéré en juin 1942. Le 10 février, la Feldgendarmerie arrêta le jeune Maurice Bonneau (né le 17 juillet 1921 à Thouars, maçon cimentier dans l’entreprise familiale) qui avait participé à des transports d’armes et aux liaisons avec la côte vendéenne. En dépit des menaces, Robert Delattre, Daniel Bouchet et Gabriel Richetta organisèrent dans la nuit du 27 mars 1942 à la Motte-Bourbon (Maine-et-Loire), une opération pick-up permettant le retour de Rémy et le départ pour Londres de Christian Pineau, co-fondateur de Libération-Nord.
Le 7 mars 1942, Gabriel Richetta fut arrêté sur son lieu de travail par la Feldgendarmerie ; le 11 mars ce fut au tour de Raymond Chessé de tomber entre les mains des Allemands.
Richetta fut emprisonné à Angers (7-21 mars 1942) puis à Fresnes (21 mars-30 juin), et condamné à mort avec Raymond Chessé et Maurice Bonneau le 1er juin 1942 par le tribunal militaire du Gross Paris siégeant à l’Hôtel Continental. L’affaire fut donc considérée trop importante pour être laissée à l’appréciation d’un simple tribunal de Feldkommandantur.
Les condamnés furent déportés le 2 juillet dans un convoi de 53 hommes de Fresnes à la prison de Karlsruhe, puis transférés à la prison de Rheinbach, non loin de Bonn, où ils auraient été astreints au travail forcé. Enfin, ils furent conduits à la prison de Cologne qui était le siège du tribunal chargé des affaires Nacht un Nebel, Nuit et Brouillard (NN), venant de France. Gabriel Richetta– avec son compagnon Raymond Chessé – se seraient donc vu appliquer la procédure NN qui avait été mise en place à la fin de l’année précédente. Les tribunaux de la Wehrmacht étant jugés trop laxistes, le décret Keitel dit « Nuit et Brouillard » du 7 novembre 1941 disposait que ne seraient à juger dans les pays occupés que les crimes à coup sûr justiciables de la peine de mort (ce fut le cas) et à condition que celle-ci puisse être appliquée dans un délai inférieur ou égal à huit jours (ce qui fut peut-être le motif de la déportation) ; les inculpés ne remplissant pas ces deux conditions étaient à déporter en Allemagne dans un secret absolu pour y disparaître « dans la nuit et le brouillard », c’est-à-dire sans laisser de trace. Cette disposition était censée avoir un effet de terreur comparable aux fusillades.
La peine de Maurice Bonneau ayant été commuée en 10 ans de réclusion, il mourut de tuberculose et d’épuisement à la prison forteresse de Sonnenburg le 13 juin 1944.
Gabriel Richetta fut passé par les armes le 1er septembre à 1942 à 21h à la prison de Klingelpütz à Cologne où il fut inhumé au cimetière ouest, dans la tombe n° 44. La date du 2 septembre mentionnée dans le livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation est erronée. Raymond Chessé fut exécuté à 21h10. Ces deux hommes ont donc été fusillés et non guillotinés – encore moins décapités à la hache comme on peut le lire parfois (seule la guillotine fut utilisée pour certaines exécutions, celle des résistantes notamment).
Gabriel Richetta obtint la mention Mort pour la France. Il fut homologué résistant des Forces françaises combattantes (FFC) et déporté et interné de la Résistance (DIR), agent P1 CND du 1er septembre 1941 au 6 mars 1942, avec assimilation au grade de sous-lieutenant (chargé de mission 3e classe agent P2 après son arrestation). La médaille de la Résistance lui fut attribuée à titre posthume (décret du 24 avril 1946).
Le 22 octobre 1945, Gilbert Renault (colonel Rémy), dans un courrier signé de l’un de ses pseudonymes (Georges Roulier), écrit : « Richetta nous a rendu les plus grands services avec un mépris total du danger ».
Son nom est inscrit sur le monument aux Morts de Thouars ainsi que sur le monument commémoratif aux Résistants déportés de Lageon (Deux-Sèvres). Une rue de Thouars porte son nom par décision du Conseil Municipal de Thouars en date du 7 mai 1992.
Sources

SOURCES : Service historique de la Défense, AVCC, Caen, AC 21 P 143864 (consulté). — SHD Vincennes GR 28 P 4 50 1001 (à consulter). — Page web du Centre régional Résistance et Liberté de Thouars. — Témoignage de son épouse sur la page web de l’AFMD-Allier. — Acte de naissance en ligne (Arch. Dép. Allier). — MémorialGenWeb.

Dominique Tantin

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