Né le 3 mai 1907 à Toulouse (Haute-Garonne), mort le 12 juin 1944 en action de combat à Bonrepos-sur-Aussonnelle (Haute-Garonne) ; ouvrier en chaussures à Toulouse ; résistant (FTPF puis membre du maquis de l’Armée secrète (AS) de Saint-Lys (Haute-Garonne)

Lucien Lafforgue (1903-1944)
Lucien Lafforgue était le fils de Joseph, Honoré Lafforgue (1878-1947), cordonnier, et de Marie-Jeanne Gély (âgée de vingt-quatre ans en 1903, morte vers 1940), mécanicienne. Ce couple de professionnels de la chaussure demeurait 16, rue Arago. Lucien Lafforgue poursuivit une carrière professionnelle dans la même branche.
Il se maria un première fois le 28 avril 1932 à Toulouse avec Marie-Jeanne Cazenave. Il épousa ensuite lors d’un mariage célébré également à Toulouse le 7 décembre 1936, Louise, Marie, Antoinette, [dite Violette] Carralade. Nous ignorons son parcours politique et militant d’avant 1940. Pendant la Seconde Guerre mondiale, après la mort de sa mère, il s’occupa de son père, infirme et de sa jeune sœur et secourut son frère, prisonnier de guerre en Allemagne.
Résistant, il intégra les FTPF « légaux » de la Haute-Garonne. Il appartint sans doute à la 3402e compagnie des FTPF de la Haute-Garonne dont les activités étaient centrées sur la ville de Toulouse et sa périphérie. Cette unité se livrait à la propagande clandestine et à des activités de sabotage. Lafforgue, quant à lui, a été signalé comme ayant participé à des sabotages contre les voies ferrées. On a signalé en particulier sa participation à un attentat à Labège (Haute-Garonne) contre la ligne de chemin de fer de Toulouse à Sète (Hérault) ainsi que son coup de main à l’école des Amidonniers où il s’était emparé de cartes d’alimentation.
Il fut sans doute contacté par Jean Chaubet, un socialiste, dirigeant départemental des MUR (Mouvements unis de la Résistance) et de l’AS (Armée secrète) qui essayait de rassembler des volontaires pour former un maquis après le débarquement attendu des Alliés. Sans doute les deux hommes devaient bien se connaître ce qui permettrait de comprendre pourquoi un combattant des FTPF ait accepté d’intégrer une formation armée de l’AS. Diverses sources indiquent qu’ils étaient beaux-frères (?). Ils habitaient tous deux le quartier toulousain de Bonhoure.
Lafforgue fit donc partie des résistants qui répondirent à l’appel de Chaubet de rejoindre, le 7 juin 1944, le maquis de l’AS que ce dernier avait prévu de constituer dans les environs de Saint-Lys (Haute-Garonne). Le 7 juin 1944, donc, des hommes recrutés pour gagner les cantonnements du le maquis de Saint-Lys — parmi lesquels Lucien Lafforgue — quittèrent leur domicile, à Toulouse ou dans les environs immédiats. Le maquis s’installa initialement au château de Gagen situé sur le territoire de la commune de Bonrepos-sur-Aussonnelle, à proximité de la RD 67 qui relie Saint-Lys à L’Isle-Jourdain et du croisement de cette dernière avec la RD 68 qui relie Fonsorbes à Bonrepos-sur-Aussonnelle. Dès le 11 juin, les hommes qui s’y trouvaient étaient en train d’être dirigés vers d’autres cantonnements, au château de Candelé, à proximité de Gagen, et vers Mérenvielle (Haute-Garonne), commune limitrophe du Gers. Ce transfert ne put s’effectuer du fait de l’attaque allemande. Le 12 juin, il ne restait plus qu’une trentaine d’hommes à Gagen. Ce jour-là, en fin d’après-midi, surgit, à proximité de Gagen, une colonne de la division blindée Das Reich. Celle-ci, formée de trois compagnies cantonnées jusqu‘au 10 juin au matin dans des villages du sud de Toulouse Les 9e, 10e, 11e et 12e compagnies du 3e bataillon du régiment SS Deutschlandde la division blindée SS Das Reich quittèrent les villages où elles stationnaient, au sud de Toulouse, en Haute-Garonne, dans les basses vallées de l’Ariège et de son affluent, la Lèze. Leur mission de destruction de maquis et de répression des populations civiles commença au petit matin d’un samedi pluvieux. Le 10 juin leur action meurtrière s’exerça en Comminges (Haute-Garonne), marginalement en Couserans (Ariège) et, le 11 juin en Bigorre (Hautes-Pyrénées). Les SS se livrèrent à des massacres de civils et de résistants. Ce ne fut pas par hasard que les SS attaquèrent le château de Gagen, cantonnement du maquis de Saint-Lys. Ils connaissaient apparemment le lieu car, la veille une voiture conduite par un militaire allemand avait été attaquée par des résistants d’un autre maquis, celui de Mangane. Or, les Allemands ont attaqué sans hésiter le maquis de Saint-Lys. Disposaient-ils de l’information avant leur départ, ce qui justifierait qu’ils aient un détour, pour leur retour, par le Gers. Ou ont-ils glané des informations auprès de civils locaux pendant leur passage dans le secteur ? Ou, encore, ont-ils été informés par des « traitres » présents dans les rangs du maquis ? Toutes ces hypothèses ont été formulées. Ils ignoraient cependant que le transfert des hommes du maquis de Gagen vers le Candelé était déjà bien avancé. Les maquisards présents à Gagen furent surpris. Ils essayèrent de se replier vers le Candelé en se réfugiant dans un premier temps dans les bois proches. Un groupe comprenant Lucien Lafforgue, Eugène Lozes, André Bousquairol, Abel Autofage, André Cavagnol, Joseph Vié, Bordes, Rucosa et Séguela couvrait la retraite du gros de l’effectif, parmi lesquels Jean Chaubet. Les cinq premiers furent tués. Lors de ce repli depuis Gagen, André Cavagnol avait été chargé de transporter au Candelé les archives du maquis. À la ferme de Cambrai, les Allemands mirent en batterie un fusil-mitrailleur et tirèrent sur le groupe qui se déplaçait. Abel Autofage et Lucien Lafforgue furent les premiers atteints par les balles allemandes, peu avant Cavagnol et Bousquairol. Jean Chaubet, Joseph Vié et Jean Micoud furent ensuite tués plus loin.
Lucien Lafforgue fut inhumé au cimetière toulousain de Terre Cabade. Il reçut la mention « mort pour la France ». Son nom figure sur le monument commémoratif érigé à la sortie du village de Bonrepos-sur-Aussonnelle, vers Saint-Lys. Sur cette plaque est gravée, avec les noms, l’inscription suivante : « Le maquis de Saint-Lys à ses camarades des Corps francs de Libération morts au combat du 12 juin 1944 ». Une plaque y a été apposée à sa base avec leurs noms et l’inscription suivante : « Aux victimes civiles de la barbarie nazie du 12 juin 1944 ». Il est également gravé sur le monument aux morts de Saint-Lys appartenant à toutes les catégories de victimes de la Seconde guerre mondiale, parmi lesquelles celles du maquis de Saint-Lys (on y a rajouté ultérieurement les morts de la guerre d’Algérie). Enfin son nom figure sur le monument aux morts du quartier toulousain de Bonhoure, Guilhemery, côte de l’Hers. Le conseil municipal de Toulouse a honoré sa mémoire en donnant son nom à une rue et à une impasse de la ville.
À Caen (Service historique de la défense, AVCC), il y a, à son nom, un dossier, non consulté (cote 21 P 68040).
Sources

SOURCES : Arch. com. Toulouse, 1 E 632, état civil, registres des actes de naissances, 1907, 1er volume. — Michel Goubet, « Les combattants FTPF [en Haute-Garonne] » ; « Les Francs-Tireurs et partisans français [en Haute-Garonne] » ; « Le mouvement Franc-Tireur [en Haute-Garonne] » ; « Le maquis et le combat de Saint-Lys 12 juin 1944 » in La Résistance en Haute-Garonne, CDROM, Paris, AERI (Association pour des études sur la résistance intérieure), 2009. — Guy Penaud, « La Das Reich » 2e SS Panzer Division, préface d’Yves Guéna, introduction de Roger Ranoux, Périgueux, La Lauze, 2e édition, 2005, 558 p. [pp. 395-397, p. 542]. — Philippe Viguier, Le maquis de Saint-Lys 1944, sl., sd. [1985], 22 p. — Site MemorialGenWeb consulté le 1er février 2020. — Site Mémoire des Hommes consulté le 7 février 2020.

André Balent

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