Âgé de 33 ans, exécuté le 29 août 1943 aux Eaux-Bonnes (Basses-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques) ; manoeuvre ; résistant.

Un rapport de la Brigade de surveillance du territoire de Bordeaux (Gironde) dresse à la Libération une liste des "Agents de l’ennemi’ dont « Pourruch Vincent : domicilié aux Eaux-Bonnes (Basses-Pyrénées). Fusillé par les Allemands le 30 août 1943, dans cette localité. Il n’était pas Français. Son exécution peut être lié à un acte de droit commun ». Ce rapport est surprenant et montre combien certains services policiers étaient pour le moins mal informés sur les forces de répression allemandes et sur les événements survenus sur le territoire qu’ils couvraient. Vincent Pourruch faisait peut-être partie de la communauté des passeurs qui franchissaient clandestinement les Pyrénées tant pour la contrebande que, pendant la guerre, pour accompagner vers l’Espagne ceux qui voulaient s’y rendre en passant par la vallée de l’Ossau (juifs, résistants, volontaires pour rejoindre l’Afrique du Nord). La station thermale d’Eaux-Bonnes où il fut abattu, a été l’un des premiers lieux d’implantation de la 8e compagnie du 3e régiment de la Division Brandebourg, unité spéciale de la Wehrmacht composée de volontaires français encadrés par des officiers et des sous-officiers allemands. Elle s’y installa, venant de Moumour (Pyrénées-Atlantiques), fin juin 1943. Son centre d’instruction y resta, d’abord dans la Maison de repos des PTT, puis à l’hôtel Continental, jusqu’en mars 1944. Les recrues, fournies principalement par les groupes collaborationnistes de Paris et de Bordeaux, recevaient là une formation militaire orientée vers le combat contre la Résistance puisque la spécialité de l’unité était l’infiltration dans les organisations ou filières clandestines. C’est dans le cadre de cette instruction que furent menés plusieurs coups de main contre les filières qui traversaient les Pyrénées pour aguerrir les recrues. Vincent Pourruch fut donc abattu dans ce contexte après avoir été piégé par l’un des Brandebourg. Le passeur Henri Soustrade d’Aas, village voisin d’Eaux-Bonnes, avait été contacté par un membre de la 8e compagnie se prétendant déserteur et communiste pour qu’il le guide jusqu’à la frontière. Pris par d’autres obligations, il dirigea le faux déserteur vers Vincent Pourruch. L’ayant pris en charge, celui-ci fut abattu sur la route du col de l’Aubisque, peu après la sortie de la localité par l’adjudant Schwinn et son équipe. Son épouse, Marie, née Casau, femme de chambre, fut arrêtée et déportée, tout comme l’épouse d’Henri Soustrade, arrêtée avec lui la même nuit, mais celui-ci put s’enfuir. Pourruch et Soustrade auraient été piégés par un Brandebourg s’étant présenté sous le nom de Lopez. Ce nom était l’une des identités de Jacques Roglin qui n’avouera pas la responsabilité qu’il avait eu dans cette affaire. Un autre Brandebourg, Gilbert Lamblin, reconnaitra peu après son arrestation sur les lignes alliées qu’il essayait d’infiltrer en février 1945 qu’il avait trompé un passeur demeurant à Aas avec qui il faisait du marché noir et dont il avait voulu se venger car il aurait abusé de son inexpérience dans ce domaine. Il est donc possible qu’il ait contribué à cette affaire. Le corps de Vincent Pourruch fut découvert le lendemain matin. Il fut inhumé à Aas le 1er septembre dans le tombeau de famille de son épouse et sans que son nom apparaisse. Ce meurtre venant après celui de Jean-Pierre Murcuillat* renforça l’indignation générale contre les agissements de la 8e compagnie. Ce fut le deuxième crime commis par ses éléments français dans la longue série de ceux dont ils se rendront coupables par la suite, en particulier dans le Sud-Est.
Le nom de Vincent Pourruch figure sur le monument aux morts d’Eaux-Bonnes et une plaque commémorative a été apposée sur les lieux du crime. Un hommage officiel lui a été rendu pour la première fois en 2010.
Sources

SOURCES : Arch. Nat. Surveillance du territoire, 623179, aff. 3.219 n° 5.533, communiqué par Gilles Morin. ⎯ SHD GR 28 P 7 220, interrogatoire Roglin/Lopez, 27 juillet 1945. ⎯ Arch. justice militaire, tribunal militaire de Bordeaux (dossier Frahi, etc., rapports de police, tableau des arrestations et des meurtres dans la région de Bordeaux). ⎯ Arch. dép. Bouches-du-Rhône 62 W 451 (dossier Battifredo, interrogatoire Lamblin). ⎯ Arch. dép. Gard 3 U 7 218 (cour de justice, dossier Cot). ⎯ presse locale (Sud-Ouest, « Le résistant retrouvé » 31 août 2010). ⎯ Jean-Marie Guillon et Guillaume Vieira, « La 8e compagnie de la Division Brandebourg. Une pièce essentielle et méconnue de la lutte contre la Résistance », Provence historique fascicule 252, avril-juin 2013, p. 195-212. ⎯ Antonin Nicol, Vallée d’Ossau ; Ausseau toustem, chez l’auteur, 2011 (non consulté). ⎯ Olivier Pigoreau, Sanglante randonnée. Les Français de la division « Brandebourg » et des formations de chasse SS, Paris, Histoire & Collections, 2013, p. 38-40.

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