Né le 27 février 1903 à Amiens (Somme), sommairement exécuté le 1er août 1944 à Sassenage (Isère) ; homme de lettres ; résistant de l’Armée Secrète, homologué lieutenant des Forces françaises de l’Intérieur

Tombe 35, Nécropole Nationale de Saint-Nizier-du-Moucherotte (Isère)
Tombe 35, Nécropole Nationale de Saint-Nizier-du-Moucherotte (Isère)
Photo : Thierry Pinel, Geneanet, sous licence d’usage CC BY-NC-SA 2.0
André, Gaston, Pierre, Henry Jullien était le fils d’Henri, Pierre, Jules, Marie, officier d’état major, et de Marie, Alice, Berthe Peulevé, son épouse.
Il fit ses études primaires à l’école communale de Saint-Cyr (aujourd’hui, Saint-Cyr-l’École, Yvelines), son père étant alors commandant en second de l’École spéciale militaire.
Sa scolarité se poursuivit au lycée du Mans (Sarthe), puis au lycée Sainte-Croix.
À la déclaration de guerre en 1914, son père était colonel du 117ème Régiment d’Infanterie. Il mourut, général de brigade, le 27 décembre 1918.
Après avoir commencé ses études supérieures à Angers (Maine-et-Loire), André Jullien les poursuivit à Paris.
Il était licencié en droit et diplômé de l’École des sciences politiques.
Il était poète, auteur dramatique et romancier, connu sous le nom de Jullien du Breuil ou André Du Breuil.
Certains de ses poèmes parurent dans la revue Des Poèmes en 1924. Son roman « Imprudence » fut publié en 1927. Le suivant, « Kate » parut en 1929.
Fréquentant les milieux artistiques parisiens, il se lia d’amitié avec Jean Cocteau, Marcel Jouhandeau, Max Jacob ou encore François Mauriac.
André Jullien épousa Marie Scoville, journaliste de nationalité américaine, le 22 juin 1931 à Paris, Ve arr. (Seine, aujourd’hui Paris).
Séjournant de plus en plus souvent sur la Côte-d’Azur, il s’éloigna des mondanités, même si le succès d’une pièce adaptée d’un auteur anglais le contraignit à revenir dans la capitale.
Mobilisé en septembre 1939, il fut envoyé dans le secteur de Dieppe-Le Tréport (Seine-Inférieure, aujourd’hui Seine-Maritime) et affecté comme interprète auprès de l’Armée britannique.
Lors de la retraite en 1940, il se rendit par deux fois derrière les lignes ennemies pour récupérer du matériel abandonné, ce qui lui valut d’être décoré de la Croix de Guerre 1940.
Rendu à la vie civile, il retourna dans le Sud-Est de la France et entra bientôt dans la Résistance.
Il fut arrêté sur dénonciation le 19 décembre 1941 et fut interné durant 5 mois, d’abord à Nice (Alpes-Maritimes), puis à Marseille (Bouches-du-Rhône). Finalement condamné à deux ans de prison avec sursis, il fut libéré et reprit aussitôt son activité clandestine.
Alors qu’il était recherché par la Gestapo, il partit pour l’Isère, puis gagna le maquis du Vercors, secteur 8 de l’AS Isère, le 1er juillet 1944.
Il fut affecté par le commandant Tanant à la mission interalliée Eucalyptus où il servit comme interprète et agent de liaison avec le grade de lieutenant.
En juillet 1944, parallèlement à l’invasion du Vercors, l’armée allemande encercla le massif et toutes les communes situées à sa périphérie furent investies.
Après l’ordre de dispersion donné le 23 juillet 1944 par François Huet, chef militaire du Vercors, de nombreux maquisards tentèrent de quitter le massif pour poursuivre la lutte.
Le lieutenant André Jullien Du Breuil, le sous-lieutenant Rémi Lifschitz, et Léa Blain, secrétaire et chiffreuse le la mission Eucalyptus, rejoignirent au-dessus du hameau de La Rivière, la grotte des Fées, située dans la forêt de Saint-Agnan-en-Vercors (Drôme), où s’était réfugié le groupe Goderville (Jean Prévost). La situation de la grotte est difficile à trouver, l’entrée se fait par une chatière de 60 cm ouvrant sur une salle propice au refuge.
De la grotte, les réfugiés pouvaient apercevoir les colonnes de fumée laissant présager de la tragédie qui se déroulait sur le plateau. Là, pendant plusieurs jours autour du Capitaine Goderville, ils furent une poignée d’hommes : le Capitaine Bouysse (Charles Loysel), le Lieutenant Raymond (Jean Veyrat), Alfred Leizer, le Lieutenant André Jullien Du Breuil, Simon Nora, Rémy Lifschitz et Léa Blain, seule femme dans cette cavité où l’eau, la nourriture, et les couvertures manquaient terriblement.
Le petit groupe de la grotte des Fées s’impatientait. Cette existence recluse, oisive, avec une nourriture frugale et rare, dans le froid et l’humidité, pesait à tous. Ils décidèrent d’agir. Puisqu’on avait cessé de se battre dans le Vercors, il fallait désormais en sortir et rejoindre les camarades qui, dans l’Isère, poursuivaient la lutte.
Le lundi 31 juillet 1944, profitant de l’accalmie qui semblait régner aux alentours, le groupe Goderville prit la décision de quitter la grotte et s’éloigna en direction du nord-est. Le capitaine Goderville et le capitaine Bouysse avaient décidé de longer, en forêt, la route qui mène à Corrençon (Isère), Villard-de-Lans (Isère), Engins (Isère), et de rallier Sassenage (Isère).
Simon Nora, qui avait décidé de rejoindre ses parents qui se cachaient à Méaudre (aujourd’hui Autrans-Méaudre-en-Vercors, Isère), quitta le groupe.
Rémy Lifschitz et Léa Blain s’arrêtèrent à Villard-de-Lans, car la jeune femme avait les pieds en sang et ne pouvait plus avancer.
Le matin du 1er août 1944, au lieu-dit "La Croix des Glovettes" à Villard-de-Lans, ils furent surpris par une patrouille allemande : tous deux vendirent chèrement leur peau avant de périr. Rémy Lifschitz fut déchiqueté par une grenade. Léa Blain fut tuée d’une balle dans la tête.
Après une pause à Engins, les hommes s’engagèrent dans les Gorges d’Engins. Ils sortirent du défilé le 1er août et atteignirent le pont Charvet, où ils tombèrent sur des soldats allemands qui les abattirent aussitôt à la mitrailleuse. André Jullien du Breuil, Jean Prévost, Alfred Leizer, Charles Loysel et Jean Veyrat furent tués sur le coup.
Le 3 août 1944, après le départ des Allemands, des habitants de Sassenage relevèrent les corps et les ramenèrent au village.
Les cinq corps anonymes numérotés et photographiés, ils furent inscrits sur les registres d’état civil de Sassenage puis inhumés dans le cimetière de la commune.
L’acte de décès n°20 du 3 août 1944 porte les indications suivantes : « Le 3 août 1944, à 9 heures, nous avons constaté au lieu-dit pont Charvet le décès d’un individu de sexe masculin, dont l’identité n’a pu être établie, dont la mort paraît remonter à deux jours, n°4 d’un groupe de cinq personnes ».
Ce n’est que quelques jours plus tard qu’ils furent identifiés.
Un jugement du tribunal civil de Grenoble (Isère) en date du 28 mars 1945, indiqua que cet acte de décès devait être attribué à André Jullien.
Une stèle en leur mémoire fut posée en 1948 grâce à une souscription lancée par Pierre Dalloz.
André Jullien obtint la mention "Mort pour la France" et fut homologué résistant, lieutenant des Forces françaises de l’Intérieur.
Il est désormais enterré dans la Nécropole Nationale de Saint-Nizier-du Moucherotte (Isère), tombe 35.
Son nom figure sur le mémorial érigé au pont Charvet à Sassenage, dans la liste des écrivains morts pour la France au Panthéon à Paris Ve arr., sur l’une des plaques commémoratives apposées dans l’église Saint-Jacques à Paris Ve arr., sur le monument commémoratif de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (S.A.C.D.) à Paris IXe arr.


Notice provisoire


Voir : Pont Charvet, Sassenage
Voir : Nécropole nationale de Saint-Nizier-du-Moucherotte
Sources

SOURCES : SHD Vincennes, GR 16 P 314625 (à consulter) ; GR 19 P 38/16 — AVCC Caen, AC 21 P 58124 (à consulter) — Mémoire des hommes — Geneanet — Mémorial GenWeb — https://data.bnf.fr/fr/12942947/andre_jullien_du_breuil/ — Coll, Anthologie des écrivains morts à la guerre 1939-1945, Albin-Michel, 1960 — article Wikipedia Jean Prévost — http://beaucoudray.free.fr/vercors2.htm — État civil

Jean-Luc Marquer

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