Né le 17 octobre 1914 à Rimont (Ariège), mort à Esplas-de-Sérou (Ariège) vers le 15 juillet 1944 ; domicilié à Montseron (Ariège) ; victime d’une « bavure » du maquis du col de la Crouzette (Ariège), exécutée sommairement après un « procès » expéditif

Pierre Soula était le fils de Léon Soula et de Marie Eychenne. Léon Soula, né le 10 octobre 1888 à Montseron (Ariège) résidait avec sa famille à Montseron, petit village d’habitat dispersé du Couserans, à proximité du bourg de Castelnau-Durban. Sus le régime de Vichy, cet ancien combattant la Première Guerre mondiale était devenu le chef de la Légion des combattants de la commune. Le témoignage d’Achille Baselga, maquisard (AGE) du col de la Crouzette, a confié le 11 avril 1997 à Élérika Leroy qu’ « il possédait chez lui des armes et qu’il tirerait éventuellement sur des maquisards. Lors d’une réunion agricole à Saint-Girons, il fit sans savoir, une réflexion à un chef maquisard » De ce fait, il devint très suspect aux résistants qui avaient formé divers maquis (FTPF, AGE, AS). Les assassinats du 15 juillet 1944 précipitèrent les événements.
En effet, le 15 juillet 1944, des hommes de main de la Sipo-SD de Saint-Girons affiliés au PPF (Parti populaire français) massacrèrent sauvagement deux notables qui aidaient les maquis des FTPF (Francs-tireurs et partisans français) et de l’AGE (Agrupación de guerrilleros españoles) du col de la Crouzette (1242 m), Paul Laffont, ancien député et ministre et Charles Labro, médecin. René Plaisant, chef des FTPF de la Crouzette, réagit en impulsant la création d’un « tribunal du peuple » destinés à punir les traîtres et les collaborationnistes. L’historien ariégeois de la Deuxième Guerre mondiale, Claude Delpla, estima qu’il exerça une justice qu’il qualifia de « militaire ». Les guérilleros de l’AGE et le maquis (Armée secrète) de Labastide-de-Sérou furent associés à l’exercice de cette justice. Des groupes de résistants (FTPF et AGE) furent dépêchés dans les villages du massif de l’Arize et, surtout, de son piémont, afin d’y arrêter les collaborationnistes « notoires » et de les ramener au maquis afin de les « juger ». Six maquisards (trois Français, FTPF — dont Joseph Dougnac — et six Espagnols, AGE. Robert Fareng (La Libération de l’Ariège, 1947, mémoire d’études supérieures cité par André Laurens, op. cit., 1997) a accusé les seuls guérilleros espagnols d’avoir été les auteurs de ce crime, exonérant ainsi les FTPF qui les accompagnaient — allèrent à Montseron afin de s’emparer de Léon Soula mais se trompèrent de cible. Ils pénétrèrent, en soirée dans la maison de Joseph Pédoya. Un Espagnol informé que Soula était dangereux et risquait de tuer les résistants, vida le chargeur de sa mitraillette Sten dans le ventre de Pédoya. Les maquisards s’aperçurent rapidement de leur erreur fatale et demandèrent où résidait le collaborationniste qu’ils recherchaient. Ils allèrent donc chez Soula où, d’ailleurs, ils ne trouvèrent pas d’armes et s’emparèrent de lui. Le témoignage d’un des six résistants, recueilli par Élérika Leroy indique que le commando ne trouva que la femme et le fils de Soula. Il se seraient emparés du fils forçant ainsi le père à sortir de sa cachette. Pierre Soula n’était en effet pas recherché par les hommes de la Crouzette. Mais, comme le précise Claude Delpla, le fils a voulu suivre le père. Pierre et Léon Soula furent donc emmenés au maquis et furent tous deux traduits devant le « tribunal du peuple » siégeant à proximité du col de la Rille (commune d’Esplas-de-Sérou). René Plaisant avait fait adopter une règle selon laquelle ceux qui montaient à la Crouzette n’en redescendaient pas, ce qui signifiait, en fait, que les suspects traînés devant cette sorte de « conseil de guerre » devaient subir la peine de mort. C’est ainsi que Pierre Soula, bien qu’« innocent » puisque n’étant pas un collaborationniste, fut condamné à mort et exécuté. Son corps fut retrouvé enterré près du col de la Crouzette, le 25 septembre 1944.
Quant à son père, certes pétainisite, il fut lui aussi exécuté pour des propos imprudents contre les maquis qu’il il avait tenus, par fanfaronnade et qu’il ne pouvait mettre à exécution car ne possédant pas d’armes.
Voir Esplas-de-Sérou (Ariège), col de la Crouzette (1244 m) et col de Rille (938 m) ; Castelnau-Durban (Ariège), Rivèrenert (Ariège), 19 juin-21 juillet 1944
Sources

SOURCES : Arch. dép. Ariège, 129 W 43, f° 957, fiche du registre matricule de Léon Soula. — Claude Delpla, Il y a 50 ans (21 et 22 août 1944) ... Bataille de Rimont et de Castelnau-Durban ... L’Ariège était libérée, Saint-Girons, Imprimerie Barat, 1994, 39 p. [p. 28]. — Claude Delpla, La libération de l’Ariège, Toulouse, Le Pas d’oiseau, 2019, 514 p. [p. 134, 159]. — André Laurens, Une police politique sous l’occupation La Milice française en Ariège 1942-1944, Nîmes, Lacour, 1997, 253 p. [p. 190, note 62]. — Élérika Leroy, Les résistants et l’épuration. Aspects de la répression contre les collaborateurs dans le Midi toulousain 1943-1953, Mémoire de maîtrise, dir. Pierre Laborie, université de Toulouse-Le Mirail, 1998, 200 p. [p. 54]. — Notes communiquées, 4 décembre 2020, par Élérika Leroy (liste nominative des personnes exécutées par le maquis de la Crouzette en juillet 1944). — Sites MemorialGenWeb et Mémoire des Hommes consultés infructueusement le 8 janvier 2021.

André Balent

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