Le 10 octobre 1944 vingt sept résistants capturés par les Allemands et emprisonnés à la caserne Friedrich à Belfort furent fusillés à Banvillars. Ils furent abattus par la Milice à laquelle les Allemands avaient confié l’exécution.

Ces résistants étaient pour la plupart membres des 3 compagnies de combat des FFI (Forces Françaises de l’Intérieur) du Groupement Territoire de Belfort qui avaient reçu pour mission, début septembre 1944, de harceler les troupes allemandes en retraite dans le massif sous-vosgien, ainsi que dans le secteur d’Étobon, afin de créer une zone d’insécurité pour l’ennemi et faciliter ainsi la libération de la région.
Le 15 août 1944, les armées alliées débarquèrent sur les côtes de Provence et remontent les vallées du Rhône et de la Saône en rencontrant peu de résistance sur leur chemin. En trois semaines, le 6 septembre, la Première armée française était à Baume-les-Dames à 60 km de Belfort. Il est alors décidé de mobiliser les FFI du Groupement Territoire de Belfort.
Mais les alliés durent à ce moment stopper leur offensive pendant près de 2 mois devant la trouée de Belfort car les munitions, le carburant, le ravitaillement qui étaient transportés en camions depuis la côte méditerranéenne n’arrivaient plus à suivre. L’offensive ne repris qu’à la mi-novembre et Belfort ne fut libérée que le 21 novembre 1944. Ce contretemps permit le retour en force des Allemands, secondés par la milice et l’attaque des maquis avec des moyens puissants, de multiples rafles, des arrestations très nombreuses suivies de l’exécution de nombreux résistants.
Pour éviter l’encerclement et la destruction, les maquisards vont devoir quitter les sommets de la Planche des Belles Filles dans la nuit du 17 au 18 septembre 1944 puis se disperser le 27 septembre 1944. Un grand nombre d’entre eux essaieront de rejoindre les lignes alliées toutes proches ou de franchir la frontière franco-suisse. Cinq passages de lignes réussiront entre le 1er octobre et le 1er novembre et environ 120 FFI qui rejoindront la 1re armée française pour être incorporés au commando "Belfort", constitué au sein de la Brigade Alsace-Lorraine commandée par André Malraux. Sur les 654 combattants FFI du Groupement Territoire de Belfort, 117 seront tués au combat, fusillés, morts en déportation ou disparus.
Le 2 octobre 1944, alors qu’ils n’étaient plus qu’à quelques heures de marche des lignes alliées, les FFI du commando du capitaine Perriaux, fort d’une trentaine d’hommes, tomberont dans une embuscade allemande au bois de Granges, au nord de Saulnot en Haute-Saône. Sept d’entre eux parvinrent à s’échapper mais les autres furent encerclés et capturés.
Emprisonnés à la Caserne Friedrich à Belfort, ils furent condamnés à mort comme terroristes par une cour martiale allemande. Au matin du 10 octobre 1944, les 28 prisonniers furent sortis de leurs cellules et emmenés en camionnette en direction d’Héricourt. Parmi eux figurait le chanoine Pierre, curé-doyen de Giromagny, âgé de 63 ans qui avait été arrêté juste après sa messe le 7 octobre suite à une dénonciation. Après quelques kilomètres, la camionnette s’arrêta en bordure de la forêt de Banvillars où les prisonniers furent fusillés par la Milice à laquelle les Allemands avaient confié l’exécution.
Au moment d’être fusillé, le chanoine Pierre, qui était capitaine de réserve salua et demanda en allemand la faveur en tant qu’officier français de mourir en face et non fusillé dans le dos. L’officier qui commandait le peloton fit alors un geste d’arrêt aux sous-officiers mitrailleurs et le curé sera épargné pour son courage et pourra témoigner du massacre en racontant la fin de certaines des victimes.
Par exemple celle de Pierre Marconnot-Thanneur :
« C’est alors un grand jeune homme, de La Chapelle-sous-Chaux, hésitant et gauche car il n’a plus ses lunettes. Avec lui est un compatriote : il s’écrie : " Mon papa ! ma maman ! Ma pauvre petite Odette ! " Ils s’avancent tous deux vers les premiers cadavres : fusillés ». Les corps des 27 victimes furent découverts le 6 décembre dans un charnier de la forêt de Banvillars.
Il assista à la mort des treize premières victimes puis fut ramené à la Caserne Friedrich. Il sera déporté le 28 octobre vers l’Allemagne et le camp de concentration de Dachau, où il survécut et déclara à sa libération en mai 1945 : "J’étais à Banvillars. J’ai assisté à l’affreuse tragédie".
Les victimes :
— CHAUCHOT Joseph, Jacques
— DUGOIS Claude, Jean, Louis
— DUGOIS Henri, Antoine, Arsène
— DUGOIS Henri, Antoine, Élie
— GOUX Pierre, Jules
— GRANDVOINET Joseph, Félicien
— GRANDVOINET Roger, Joseph
— HENRY Marcel
— JEANBLANC Robert, Auguste
— JEANPIERRE Roger, Arthur, Delphin
— LEBLANC Pierre, Émile
— LINSIG Daniel, Frédéric, Camille
— MARCONNOT-THANNEUR Paul, Pierre, Alexandre
— MARIETTA Aimable, Jacques
— MARIETTA Ebéro, Clément
— MILLET Jean-Joseph, Marie
— NARDIN Léon, Albert
— NARDIN Marcel René, Henri
— OLIVIER Maurice
— PERRIAUX Robert, Pierre
— PIERRE Prosper, Joseph, Roger
— SAVANT-ROS Achille, Pierre
— SENER Jacques, Émile
— THÉVENOT André, Armand
— 3 inconnus :
— inconnu 1
— inconnu 2 origine sénégalaise
— inconnu 3 origine nord-africaine
Les 27 corps seront découverts dans un charnier le 6 décembre 1944.
Sources

SOURCES : AJPN Banvillars en 1939-1945 A la mémoire des fusillés de Banvillars, 2011.— Le Territoire de Belfort dans la tourmente 1939-1944 tome 2 Conseil général du Territoire de Belfort Archives départementales, 1993, Document H 13 La répression sauvage des derniers mois (témoignage complet du curé de Giromagny).—

Jean-Louis Ponnavoy

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