Né le 21 février 1905 à Moreda (province de Grenade, Espagne), mort au combat le 14 août 1944 à Nant (Aveyron) ; résistant, maquis des Corsaires, Organisation de la Résistance Armée (ORA).

Cimetière de Nant (Aveyron). Tombe de Manuel Cuenca.
Cliché : Clotilde Bigot, 24 février 2021
Nous ne connaissons pas le parcours de Manuel Cuenca avant sa mort en l’état de la documentation consultée. Nous pouvons supposer que sa présence en France pourrait s’expliquer par l’émigration économique espagnole du début du XXe siècle, ou du fait l’émigration politique, à savoir la fuite des républicains à l’issue de la guerre civile espagnole (1936-1939), la Retirada. Sur sa tombe dans le cimetière de Nant (Aveyron), une plaque témoigne de l’existence d’un fils.
Manuel Cuenca fit partie des membres du maquis des Corsaires tués les 14-15 août 1944 à Nant (Aveyron) par les Allemands alors qu’ils rentraient d’une mission de sabotage au Pas de l’Escalette (Hérault). Partis le 13 août 1944 en début d’après-midi du mas des Pommiers (situés à quelques kilomètres au Sud de Nant), les Corsaires rentrèrent à leur base le 14 août. Vers 14 heures, les occupants du véhicule décidèrent de traverser le village de Nant au lieu d’emprunter un itinéraire secondaire, plus discret. Les jeunes gens, une trentaine au total, laissèrent librement exprimer leur joie et leur fierté (bien que la mission en elle-même n’ait été que partiellement réussie) : c’est en chantant et en laissant flotter le drapeau tricolore qu’ils traversèrent le village, transgressant ainsi les ordres stricts en matière de sécurité. Manuel Cuenca se trouvait dans ce camion avec le reste du groupe, sous le commandement du lieutenant Cassanas, dit « Roger ». Ce changement d’itinéraire à la dernière minute marqua le début de deux journées particulièrement violentes à Nant, petit village au pied du Larzac. En effet, le détachement de la 11ème colonne blindée allemande, partie d’Albi (Tarn) et en reconnaissance sur la route du Larzac, aperçut le camion depuis la route des Liquisses (actuelle D 999) qui descend du Larzac et surplombe Nant. Les jeunes maquisards, tout à leur joie ne virent pas les Allemands arriver droit sur eux.
Le lieutenant Cassanas raconte la scène dans un compte-rendu, non daté : À la sortie Nord de Nant, à 300 mètres du cimetière sur le chemin du camp, vers 14h15 une première rafale de mitrailleuses vient s’écraser sur un mur de clôture à une dizaine de mètres en avant du camion. Je donne ordre de stopper et de descendre du camion pendant que les deux fusils mitrailleurs se mettent batterie sur le mur protégé de replis des autres éléments de la section. Un seul FM exécuta l’ordre, car le second attaché au dessus de la cabine ne put être descendu à temps. Le soldat Robic Alain (Sirroco) se mit en batterie et sur mon ordre vida ses chargeurs sur les Boches qui avançaient en se camouflant parmi les gerbiers. Deux hommes malheureusement furent tués au combat, le sergent Boudon Jean et le soldat Cuenca Manuel. Selon Gérard Bouladou, dans Les maquis du Massif Central méridional : Ardèche, Aude, Aveyron, Gard, Hérault, Lozère, Tarn, 1943-1944, ce fut bien Manuel Cuenca qui couvrit la retraite des Corsaires : Le camion, stoppe, les hommes se dispersent protégés par un fusil-mitrailleur servi par Cuenca, un Espagnol, qui sera tué, et le sergent Boudon Jean qui, blessé, sera achevé et défiguré. Christian Font et Henri Moizet reprennent cette idée. Manuel Cuenca fut en tout cas la première victime de l’accrochage.
Selon son acte de décès, la constatation de la mort fut faite par le capitaine Raoul Malaval, commandant du 28e groupement d’infanterie d’Albi, membre du bataillon Puget (ORA) depuis le 18 juin 1944. Le 17 août 1944, le sous-préfet de Millau transmit au maire de Nant, sur autorisation des autorités allemandes, le droit d’inhumer les corps des victimes. Sa sépulture est demeurée à Nant.
Son nom figure sur la plaque apposée à Nant, place du Claux, commémorant les victimes des combats de Nant, des 14-15 août 1944. Il ne figure pas sur le monument des résistants du Rouergue de Sainte-Radegonde (Aveyron). Il a été homologué simple soldat. Il a obtenu la mention Mort pour la France.
Voir Nant (Aveyron), 14-15 août 1944
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Aveyron : 217 W 36 — Arch. mun. Nant : acte de décès n° 31 (registre état civil 1936-1945) Service historique de la Défense, Vincennes : GR 19 P 12/25, GR 19 P 30/11 — Service historique de la Défense, Caen : AC 21 P 110878 (non consulté). — Christian Font et Henri Moizet, Construire l’histoire de la Résistance. Aveyron 1944, CDDP Rodez – CDIHP Aveyron, CRDP Midi-Pyrénées, 1997, pp. 212-213 — Gérard Bouladou, Les maquis du Massif Central méridional : Ardèche, Aude, Aveyron, Gard, Hérault, Lozère, Tarn, 1943-1944, Nîmes, éd. C. Lacour, 2006, pp. 402-405 — Gaston Laurans, Nant au mois d’août 1944, 1969, Rodez, Imprimerie Carrère, pp. 24-25 — Aimé Vielzeuf, Ardente Cévenne, Nîmes, Imprimerie Bené, 1973, p.99. — sites internet : memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr (consulté le 16 mars 2021), monumentsmorts.univ-lille.fr (consulté le 16 mars 2021), memorialgenweb.org (consulté le 30 mars 2021).

Clotilde Bigot

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