Chaveroche (Corrèze), 18 décembre 1943
Le 18 décembre 1943, à Chaveroche (Corrèze), une commune proche d’Ussel (Corrèze), les Allemands massacrèrent cinq habitants et un résistant en représailles après qu’un officier eut été blessé par un coup de feu.
Voici leur récit des évènements.
« Le 18 décembre 1943, quelques jeunes qui font une quête pour les maquisards, près du village de Chaveroche, se trouvent face à un officier allemand qui précède d’une centaine de mètres sa troupe en exercice (une section de la compagnie de parachutistes provisoirement cantonnée à Ussel). Un coup de feu : l’officier est blessé. Les jeunes s’enfuient et l’un d’eux se réfugie dans une grange. Les Allemands fouillent les maisons ; ils arrêtent cinq hommes : Chiriol, un gendarme en retraite, et son domestique Trémont, âgé de 16 ans ; Neyrat, maçon, et ses deux neveux, Sauviat et Gaulet (sic), venus de Paris passer quelques jours dans leur famille. Tous les cinq sont immédiatement fusillés dans une rue du village, face à l’école. D’autres soldats allemands mettent le feu à la grange où ils ont vu entrer l’un des jeunes ; celui-ci sort au milieu des flammes : il est abattu d’une rafale de mitraillette.
Le rapport de la gendarmerie d’Ussel est éloquent dans sa brièveté : “les corps de six hommes sont allongés sur le dos, sur le parvis de l’église ; tous portent des blessures à la poitrine et trois d’entre eux sont en outre atteints à la tête... Deux bâtiments achèvent de se consumer ; à la Mairie, les panneaux des deux portes sont enfoncés ; un des vantaux de l’église est détruit...”
Le lendemain, les Allemands imposent des obsèques très simples : seuls les habitants de Chaveroche, le préfet de Tulle, le maire d’Ussel sont autorisés à suivre les cercueils, surveillés par la troupe. »
Nous disposons aussi du témoignage de la petite fille de la maitresse de l’école de Chaveroche qui nous a été transmis par M. Michel Fumeron. Le voici :
« En 1943, ma grand-mère, Mathilde JANOUEIX est maîtresse d’école à Chaveroche depuis une vingtaine d’années.
Le 18 décembre 1943, quand des coups de feu éclatent à proximité de l’école, elle ignore ce qui se passe. Les coups de feu sont trop proches pour envisager d’évacuer l’école. Il faut protéger les enfants pourtant. Elle leur demande de se mettre sous les tables, « un grand à côté d’un petit » comme me l’a rapporté une de ses anciennes élèves.
Quand les coups de feu cessent, elle sort de l’école pour savoir ce qui s’est passé. Et elle découvre l’horreur. Des corps sans vie sur la place du bourg. Les hommes qui gisent là, elle les connaît tous. Il y a aussi des soldats allemands.
Lorsque les soldats allemands commencent à défiler devant les corps des martyrs, elle ressent alors une immense colère. Son père mort, son mari estropié, ses cousins morts, et tous ceux qui ont souffert des deux guerres. Ce qu’elle voit, c’est un affront, un mépris, une absence de respect. Alors une seule chose compte, que cela cesse, que les corps des martyrs soient respectés.
Elle commence à tirer un à un les corps dans l’église. Les soldats allemands lui ordonnent d’arrêter, veulent l’en empêcher, menacent de l’exécuter. A ce moment-là, elle n’a pas peur, elle n’a qu’une idée : transporter les corps des martyrs dans un lieu où ils seront respectés.
Sans doute y a-t-il eu assez de morts ce jour-là, les soldats allemands ne mettront pas leur menace à exécution. Elle aura donc la vie sauve. Lorsque les soldats ont quitté le bourg, un homme qui a pu se cacher et échapper à la rafle va venir aider ma grand-mère. Malheureusement, je n’ai pas retenu son nom. J’espère que certains s’en souviennent.
J’ai 15 ans quand ma grand-mère me raconte cet événement. »
Les noms des victimes sont inscrits sur une stèle commémorative.
Liste des victimes
CHORIOL Jean, Félix, dit Francis
COLLET Paul, Roger
IMBERT Gilbert
NEYRAT Alphonse, Michel
SAUVIAT Maurice, Antonin, Paul
TREMONT Clotaire
SOURCES : Louis Le Moigne et Marcel Barbanceys, Sédentaires, Réfractaires et Maquisards, L’Armée Secrète en Haute-Corrèze, 1942-1944, 1977, Amicale des maquis Armée secrète de Haute-Corrèze, (Neuvic), en ligne sur le site Gallica de la BNF. — MémorialGenWeb. — Mémoire des Hommes. — Geneanet. — Témoignage communiqué par M. Michel Fumeron (septembre 2021)
Dominique Tantin