Le 28 juin 1944, l’armée allemande donna l’assaut du maquis de la forêt de Saffré, tuant treize maquisards et en capturant cinquante-huit dont vingt-sept ont été fusillés après condamnation à mort le 29 juin 1944 au château de La Bouvardière à Saint-Herblain, deux exécutés à la prison Lafayette à Nantes et vingt-et-un déportés morts en Allemagne.

Mémorial aux maquisards au Pas-du-Houx
Mémorial aux maquisards au Pas-du-Houx
Plaque commémorative à l'oratoire Notre-Dame au Pas-du-Houx
Plaque commémorative à l’oratoire Notre-Dame au Pas-du-Houx
La Bouvardière, 50e anniversaire. Crédit photo : Fonds Jean-Charles Verdier
La Bouvardière, 50e anniversaire. Crédit photo : Fonds Jean-Charles Verdier
Eddie Warmington, aviateur anglais de la RAF, fait prisonnier le 28 juin 1944 dans le maquis. Cliché J.C. Verdier.
Eddie Warmington, aviateur anglais de la RAF, fait prisonnier le 28 juin 1944 dans le maquis. Cliché J.C. Verdier.
En juin 1944, 18 groupes de résistance du Nord du département formèrent l’ossature du maquis de Saffré constitué à partir du 16 juin 1944. De nombreux jeunes réfractaires au STO se camouflaient à la campagne dans des fermes, rejoints par les réfugiés nantais et ceux des villes côtières bombardées.
Le maquis comptait environ 310 hommes répartis en plusieurs compagnies : une de 160 hommes aux Brées avec le poste de commandement, une de 110 hommes au Pas-du-Houx, la Volante constituée par 20 hommes et autant pour l’intendance et l’équipe chargée de la récupération des aviateurs tombés sur ce territoire isolé où étaient attendus des parachutages d’armes. Le terrain avait été homologué officiellement après l’inspection des délégués militaires des Forces Françaises libres, le 16 octobre 1943. Le grade de lieutenant fut attribué à Claude Gonord, mais il fut arrêté le 19 décembre 1943 et Louis Loizeil devint alors un des responsables. En pays de Châteaubriant, la répression fut terrible au début de l’année 1944 contre les membres des réseaux Oscar-Buckmaster et Confrérie Notre-Dame, privant la résistance de nombreuses compétences (beaucoup mourront en déportation).
En juin 1944, dans le cadre du débarquement de Normandie, les groupes maquis sous l’égide de l’Armée secrète (Libé-Nord) et des délégués parachutés par Londres, ont pour mission de retarder la Wehrmacht dans ses mouvements vers la Normandie. Le maquis de Saffré se préparait à recevoir un parachutage d’armes vers le 20 juin mais celui-ci fut retardé à cause de la météo. Les Jedburghs, trois officiers arrivés le 27 juin s’inquiétèrent de la faiblesse de l’armement disponible, une soixantaine de maquisards seulement étant armés de petit calibre. L’occupant, renseigné et épaulé par des agents français de la Gestapo, notamment Jacques Vasseur, put localiser le maquis.
Le lendemain vers 5h, l’encerclement de la forêt de Saffré et l’attaque du maquis à l’aide d’armes automatiques et de canons légers commencent. L’opération est montée par le SD d’Angers avec le renfort du bureau nantais. La vingtaine d’agents du SD nantais- certains en civil, d ’autres en uniforme- sont tous mobilisés . Le sous-chef du service angevin , Span, reçoit le commandement, secondé par les Obersturmführer Busch et Bruckle. Les Allemands mobilisent toutes les troupes disponibles : d’importants éléments du régiment de l’artillerie côtière basé à Saint-Herblain, des marins du dragueur de mines 384 et des soldats de l’unité B26 de la Feldgendarmerie sous les ordres de l’adjudant Spiss, de la Sipo-SD, renforcés par leurs auxiliaires français et les Groupes d’Action pour la Justice Sociale (GAJS) inféodés aux responsables allemands d’Angers et de Nantes ainsi que quelques commensaux du marché noir, soit entre 1500 et 2000 hommes.
L’appui de la Milice nantaise a été indéniablement demandé. James de Junquières s’est personnellement déplacé à deux reprises rue Harrouys, siège de la Milice, pour demander au colonel François Boudot l’intervention de ses hommes. Ce dernier a catégoriquement refusé, arguant de l’impréparation de sa troupe à un tel combat. Il n’est pas non plus impossible que le chef de la Milice n’ait pas souhaité se salir encore plus les mains en participant aux basses besognes des Groupes d’action.
Treize maquisards furent tués au combat, abattus ou blessés et achevés.
BOURRÉ Maurice
CHATELIER Jean
CHAUMEIL Georges
CHAUVIN Albert
COEDEL Jean-Marie
GEFFRIAUD Robert
GUIHÉNEUX Auguste
GUILLET Félix
LOIZEIL Louis
NAULEAU Joseph
ORIEUX Paul
RABIN Baptiste
RENAUD Francis
Les prisonniers furent transportés à la prison La Fayette à Nantes et le lendemain 29 juin trente-cinq d’entre eux comparurent au château de La Bouvardière, à Saint-Herblain, où siégeait le tribunal militaire allemand de Nantes FK 518 qui les condamna tous à mort.
Vingt-sept ont été fusillés entre 23 h et 23h 43, par un peloton de douze soldats commandés par un officier, devant un petit monticule de terre au fond du parc du château. Pour mieux viser leur cible dans l’obscurité et en utilisant trois balles, un carton blanc avait été accroché à la place du coeur. Un médecin militaire constatait le décès et notait l’heure exacte. Les cercueils empilés attendaient dans le parc depuis l’après-midi. Le lendemain, ordre fut donné à un paysan voisin du château de recouvrir le sang avec du sable et des escarbilles.
Dans l’après-midi du 30 juin les vingt-sept cercueils furent amenés au cimetière de La Chauvinière à Nantes où les corps des fusillés furent inhumés de manière anonyme, un nom écrit à la craie sur chaque cercueil. Les familles ne furent averties que plusieurs jours, ou même plusieurs semaines plus tard. Le chef du service des cimetières de Nantes eut la présence d’esprit de numéroter les tombes, ce qui facilita l’identification lorsque les corps furent exhumés en septembre 1945.
BABONNEAU Joseph
BIVAUD Joseph
COLARD Joseph
CORGNET Lucien
DURAND Georges
GABARET Alcide
GARÇON Jean
GICQUEAU Armand
GOUGEON Cyprien
HOLLNER René
HOUGUET Marcel
JOUNEAU Henri
LANEN Robert
LAURENT Georges
LEFRANC Pierre
LEHO Louis
MACAULT Henri
MOREAU Henri
PATY Jean
PICARD Charles
POUTY Jean
RAGOT André
RICHARD Henri
RETIÈRE Joseph
RIGOLET Jean
TEMPLÉ Alexandre
TIGER Paul
Deux prisonniers du maquis de Saffré furent exécutés dans la cour de la prison Lafayette à Nantes le 13 juillet 1944 : LEGENDRE Marcel et TEMPLÉ Jean.
Morts dans les combats de la Libération :
Les maquisards rescapés reformèrent des groupes dont celui de Sion-les-Mines dans le bois de la Hunaudière. Le 11 juillet 1944, une quarantaine de soldats allemands en embuscade mitraillèrent un petit groupe sans défense, quatre furent tués :
COLLET Roger
DENEUIL Louis
GATINEAU Robert
LEBORDAIS Paul
Le 4 août 1944, à Teillé, RIALLAND Pierre, mortellement blessé pendant un accrochage entre résistants et cyclistes allemands.
Le 6 octobre 1944 à Plessé, MARY Gabriel, abattu par une patrouille allemande.
Le 22 février 1945 à Plessé , front de la poche de Saint-Nazaire, POIRIER Germain tué au combat.
Les maquisards de Saffré morts au combat ultérieurement dont les noms sont inscrits sur la plaque commémorative :
BRISSON Louis, né le 13 juin 1919 à Abbaretz (Loire-Inférieure) mort dans un accident en service commandé le 3 janvier 1945 à Auray (Morbihan).
GAILLARD Lionel, né à Nantes le 2 septembre 1921 , tué en Indochine, le 22 décembre 1946.
GUIMBAL Hubert, né le 12 février 1923 à Bordeaux (Gironde), mort suite de maladie contractée au maquis à Nantes le 14 septembre 1945.
Les morts en déportation sont au nombre de vingt-et-un :
BEAUGEARD Yves ; DOUSSET Etienne ; DUPONT Jean ; DUPONT Roger ; EPAILLARD François ; EVAIN Eugène ; FOURNY Marcel ; GERGAUD Clément ; GODIN Jean ; HAURAY Louis ; LEBORDAIS Raymond ; LE GOFF Robert ; LEPAGE Pierre ; MARSAC Jules ; NAULEAU Joseph (père) ; ROUQUIER Marie-Louise ; TARRAS Jean ; TATTEVIN Marcel ; VALOTAIRE Pierre ; VERGNEAU Edouard ; VITRAT Roger.
L’abbé Henri Ploquin (condamnation à mort commuée), Jean Sauderais, Henri Mainguy notamment revinrent des camps et témoignèrent.
Le gestapiste Jacques Vasseur, condamné à mort à deux reprises, vit sa peine commuée et fut libéré le 15 octobre 1983.
Chaque année des cérémonies ont lieu au Pas-du-Houx où a été érigé un monument, oeuvre du sculpteur nantais Jean Mazuet, inauguré en 1950 en présence du général de Gaulle et du général Audibert de l’ex-Armée secrète. Une plaque a été apposée aux Touches, à La Maison Rouge ( famille Martin) lieu de naissance du maquis. Des panneaux explicatifs ont été installés sur le site mémoriel du maquis de Saffré.
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Loire-Atlantique. — SHD, Vincennes, GR 19P 44, en ligne. — A. Perraud-Charmantier,Le drame du maquis de Saffré, éditions du fleuve, 1946. — Dominique Bloyet, Étienne Gasche, Jeunes résistants en Loire-Atlantique, Coiffard Libraire éditeur, 2014. — Étienne Gasche, Saffré, 28 juin 1944 : la mémoire des maquisards, 2012. — Christophe Besler, La Collaboration en Loire- Inférieure tome 2, p. 211-212, 2005 . — Etienne Gasche, De la Maison Rouge au Maquis de Saffré , 1988. — Briac Le Diouron, (commandant Yacco), Soldats de l’ ombre , Imprimerie centrale de l’Ouest, 1968. — : [https://www.le-maquis-de-saffre.fr/bataille-de-saffre/].— Notes Jean-Charles Verdier.

Annie Pennetier

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