Le 29 janvier 1944, dans cette commune de Corrèze, Treignac, un combat opposa le Groupe Mobile de Réserve (GMR) « Bourbonnais » et un escadron de la Garde à des maquisards des Francs-Tireurs et Partisans (FTP) et de l’Armée Secrète (AS). Quatre résistants et trois civils furent tués ou mortellement blessés. Deux résistants capturés furent condamnés par une cour martiale de Vichy et exécutés à Limoges le 11 février 1944.

Monument commémoratif à la mémoire des Maquisards à Treignac (Corrèze)
Monument commémoratif à la mémoire des Maquisards à Treignac (Corrèze)
Crédit : MémorialGenWeb
Monument commémoratif à la mémoire des victimes civiles à Treignac (Corrèze)
Monument commémoratif à la mémoire des victimes civiles à Treignac (Corrèze)
Crédit : MémorialGenWeb
Les GMR furent créés par un décret de Vichy du 17 juillet 1941. Il s’agissait d’une force paramilitaire de maintien de l’ordre relevant de la Police nationale et organisée sur le modèle de la gendarmerie mobile. En 1943-1944, elle fut souvent engagée pour combattre les maquis aux côtés de la Milice française et des Allemands.
Dès 1943, des maquis se développèrent en Corrèze, où se réfugiaient de nombreux réfractaires au STO. Ce fut le cas dans la région de Treignac où cantonnaient des groupes de l’AS et des FTP, ce qui ne manqua d’attirer l’intervention des GMR renforcés par des gardes (ex-gendarmerie ou garde républicaine mobile, devenue sous Vichy la « Garde » par décret du 9 février 1941 et rattachée en 1943 au Secrétariat général de la Police).
Dès le mois de novembre 1943, les GMR et un escadron de Gardes furent présents à Treignac, traquant les maquisards aux alentours. Le 29 janvier au matin, ils arrêtèrent trois maquisards au bourg du Lonzac, au sud-ouest de Treignac, parmi lesquels le lieutenant Georges Besse de l’AS. Les captifs furent immédiatement transférés à Limoges. Les maquisards FTP et AS l’ignoraient et ils tentèrent une opération conjointe pour délivrer les captifs.
Une embuscade fut organisée le jour même vers 16h, deux kilomètres avant Treignac, dans la côte de Balème, contre un convoi de GMR accompagné d’un escadron de la Garde. Si les hommes de Vichy comptèrent 3 morts, 4 blessés graves (dont un amputé du bras) et 3 blessés légers, les maquisards subirent aussi des pertes importantes. Deux maquisards de l’AS, Léon Dessal et Jean Glevarec, furent tués au cours du combat. Deux autres, blessés, décédèrent l’un, Paul Plazanet, à l’hôpital de Tulle le 30 janvier, l’autre, Jean Vigneron, alias Trocadéro, gravement blessé à la tête (un témoignage postérieur indique que blessé, il eut le crâne fracassé à coups de crosse de fusil), subit en urgence à l’hôpital de Limoges une trépanation avant de tomber dans le coma et de succomber le 30 ou le 31 janvier. Sept autres maquisards furent capturés : René Chabanier, FTP, un Soviétique, Ivan Alexandrov, de l’unité AS, Paul Gérodolle, Auguste Cipan, Philippe Planet et Jules Frage. Ils furent conduits à Limoges. René Chabanier et Ivan Alexandrov, inculpés de meurtre et tentative de meurtre, furent condamnés par une Cour martiale de Vichy le 11 février 1944 à la peine capitale et fusillés le jour même à la maison d’arrêt de cette ville. La cour martiale se montra plus clémente avec les autres maquisards capturés de l’AS, en les inculpant de « détention d’armes et participation à une entente subversive » et en les condamnant à 4 à 6 mois de prison et une amende.
Dans le prolongement de la contre-attaque menée par les GMR, les gardes tirèrent sur un véhicule qui se présentait à un barrage et abattirent trois des occupants civils de l’automobile, Louis Bretagnolle, Marthe Cheype et Pierre Chassagne, en train de ramener un malade de l’hôpital de Tulle.
L’émotion de la population fut considérable, d’autant plus forte que cinq des victimes étaient originaires de Treignac et d’Affieux, une commune limitrophe : Dessal, Plazanet et les trois civils. Les morts du maquis furent transportés dans l’église des Pénitents, veillés, et une foule importante participa à leurs funérailles.
Les menuisiers refusèrent de livrer des cercueils pour les policiers tués. Le lendemain, des femmes se rassemblèrent pour manifester contre les GMR. Une pétition réclamant le départ des GMR recueillit près de 400 signatures. Le préfet Lecornu transmit la pétition à Laval. Il fut immédiatement révoqué par Darnand, chef de la Milice et responsable du maintien de l’ordre. Laval le remplaça par Pierre Trouillé. Quelques jours plus tard, Darnand vint sur place féliciter les GMR et fit procéder à huit arrestations. Trois des personnes arrêtées furent déportées, parmi lesquelles Gabriel Hoffre, 67 ans, qui périt à Buchenwald.
Georges Guingouin, informé de la présence de Darnand, organisa une embuscade sur la route de Limoges que devait emprunter le chef de la Milice à son retour. Un pont fut miné, mais il sauta avant le passage de Darnand. Averti du danger, celui-ci prit la décision de rejoindre directement Vichy par Ussel.
Le lieutenant de l’AS Georges Besse, dont la capture fut à l’origine de cette tragédie, fut libéré de la prison de Limoges en août 1944 par les maquisards de la Haute-Vienne.
Le canton de Treignac fut encore endeuillé du 3 au 5 avril 1944 par le passage de la division Brehmer.


Liste des victimes
Maquisards
ALEXANDROV Ivan
CHABANIER René
DESSAL Léon, Jules
GLEVAREC Jean
PLAZANET Paul
VIGNERON Jean
Civils
BRETAGNOLLE Léonard
CHASSAGNE Pierre
CHEYPE Marthe née VERGNE
Sources

SOURCES : Maquis de Corrèze, 150 combattants et témoins, Paris, Éditions Sociales, 1975, pp. 186-188. — MémorialGenWeb.

Dominique Tantin

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