Onze maquisards de l’ORA du sud de la forêt de Lyons (Eure) en action dans le cadre de l’opération Tortue visant à retarder les troupes allemandes en retraite en Haute-Normandie, sont fusillés ou massacrés à Lisors (Eure) tout près de l’abbaye de Mortemer occupée par une garnison allemande. Le lieu d’exécutions qui comporte un monument du souvenir en forme de croix, a pris par la suite le nom de lieu-dit la Croix des Fusillés.

Vue générale du site Croix des Fusillés de Mortemer à Lisors (Eure). Vue de route de Lyons.
Vue générale du site Croix des Fusillés de Mortemer à Lisors (Eure). Vue de route de Lyons.
 Onze noms de résistants sont gravés sur la croix, qu'il aient été fusillés à cet endroit ou bien exécutés aux alentours ou encore disparus et jamais retrouvés.
Onze noms de résistants sont gravés sur la croix, qu’il aient été fusillés à cet endroit ou bien exécutés aux alentours ou encore disparus et jamais retrouvés.
Croix des fusillés, détail
Croix des fusillés, détail
Photo JP Nicolas (2022)
La Plaque de l'ORA n'indique que huit noms de tués de Mortemer. Les trois autres (comprenant pourtant le chef ORA Jean Balmino) étant "définitivement disparus"ne sont pas mentionnés.
La Plaque de l’ORA n’indique que huit noms de tués de Mortemer. Les trois autres (comprenant pourtant le chef ORA Jean Balmino) étant "définitivement disparus"ne sont pas mentionnés.
Le panneau explicatif au bord de la route de Lisors à Lyons.
Le panneau explicatif au bord de la route de Lisors à Lyons.
Mi-août 1944, Jean Balmino, chef de trentaine du Groupe sud de Lyons (Eure), propose à Roger Thuret, responsable de l’ORA sur Lyons-la-Forêt, de réaliser avec les membres des sizaines de Lisors, Touffreville et Rosay-sur-Lieure (communes de l’Eure) un exercice de mobilisation. Thuret accepte, ce sera au taillis de Mortemer, commune de Lisors, l’objectif est d’attaquer des soldats isolés en vue de récupérer des armes qui manquent aux résistants.
La finalité est bien une mise en œuvre du plan Tortue élaboré par les alliés qui demandent à toutes les forces de la Résistance de retarder les déplacements ennemis, de créer un climat permanent d’insécurité. La route de Mortemer est un axe de repli par la forêt des troupes allemandes en déroute, les Résistants y sont certains d’engager un combat.
Le 23 août 1944 en fin d’après-midi, une trentaine d’hommes se rassemblent vers la côte des 13% rejoints par deux aviateurs cachés chez Huguette Verhague (Nixon et Baskett), une unité de pionniers de la Wehrmacht est alors stationnée à la ferme de l’abbaye de Mortemer.
Dans la soirée, l’attaque est lancée par huit résistants vers la Fontaine Sainte-Catherine lorsque quatre soldats passent sur la route à bicyclette. La mitraillette Sten tenue par un des alliés s’enraye, le repli est ordonné mais le groupe est repéré par les Allemands.
Balmino décide une nouvelle opération le lendemain matin vers six heures à la source du Fouillebroc. Six hommes sont en embuscade de part et d’autre de la route de Mortemer lorsqu’arrive une voiture avec un officier et un chauffeur à son bord. L‘ordre est donné de ne pas tirer. Un convoi suit et des soldats se mettent à fouiller les bois Le groupe se replie au camp en vue de la dispersion mais les allemands bouclent très vite le secteur. Jean Balmino est arrêté, il ne sera jamais retrouvé.
D‘autres, par chance et sans doute par une meilleure connaissance de la forêt, réussissent à échapper à l’encerclement, ce sera le cas de Pierre Maillard, Albert Delacour, Robert Pohu.
Le 25 août plusieurs hommes qui ont participé à l’opération sont arrêtés chez eux notamment André Derly et André Beauclé, considérés avec Balmino comme des chefs de la résistance locale. Ils ne seront jamais retrouvés malgré les recherches.
Le corps de René Loucopoulos est découvert le 1er septembre au Coisel (commune de Lisors) : arrêté le 25 août à Lisors, il aurait sauté du camion allemand.
Le 30 août 1944, jour de la libération du secteur par les troupes anglaises, les corps de cinq hommes sont retrouvés enterrés au creux du fossé bordant la route à quelques mètres, ils ont été mutilés. 2 autres sont découverts dans une parcelle du Clos Saint Antoine le 19 septembre.
Les onze noms qui suivent sont inscrits sur le monument


BALMINO Jean Benoît
BEAUCLÉ André
BELLIART Jean, Jules, Auguste
DERLY Louis, André
LÉON Guy
LOUCOPOULOS René
OUVRY Gilbert
PETAS Henri
SAQUEPÉE Achille
SCHMITT Émile
VALLAT Jean


Sur le bas de la croix géante, une plaque de cuivre indique que cinq membres de l’ORA furent fusillés en ce lieu et que trois autres furent arrêtés quelques heures après et "subirent le même sort". Un panneau au décor tricolore confirme l’appartenance de huit tués au groupe de résistance l’ORA. : Le 23 août :Vallat, Léon, Ouvry, Saquepée, Pétas, Schmitt, Belliard ; le 25 août : Loucopoulos. Balmino, Beauclé et Derly furent arrêtés et disparurent à jamais. Aucun des trois corps ne fut retrouvé.
Sources

SOURCES : Site internet et physique de la Croix des fusillés du Maquis de Mortemer à Lisors, route de Lyons. Panneau explicatif. — La Croix des fusillés de Mortemer at Musée de la Résistance en ligne.

Jean-Paul Nicolas

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