Point stratégique pour l’occupant et pour la Résistance, le 8 juin 1944, c’est là que les FFI décidèrent de bloquer la route en faisant sauter une mine et engagèrent un combat de plusieurs heures. Le 14 août 1944, le défilé fut à nouveau l’enjeu des combats et Montgirod se trouva au coeur de l’affrontement. Les combats firent huit morts et deux otages emmenés furent exécutés les jours suivants.

Montgirod est situé à 10 km en amont de Moûtiers, sur la rive droite de l’Isère. Ce village de Tarentaise est constitué de trois villages ; Centron (alt. 600 m), dans le fond de la vallée, Le Villaret, (770 m) et Montgirod, chef lieu historique installé sur un plateau à 1100 m. C’est sur cette commune que se situe l’Étroit du Siaix. Ce verrou glaciaire constitue le passage le plus resserré de la haute vallée de l’Isère. Dans ce défilé, la N90 passait alors à flanc de rocher et devait emprunter deux courts tunnels pour pouvoir passer (le tunnel actuel permettant d’éviter ce passage difficile date de 1990). Cette configuration en faisait un point stratégique.
Entre le 7 et le 14 août 1944, la Tarentaise, entre Feisson-sur-Isère et Bourg Saint-Maurice était passée sous le contrôle des FFI. Dès le 10 août, la Wehrmacht lança une puissante contre-attaque pour reprendre la maîtrise de la vallée et l’accès au col du Petit Saint-Bernard. Les uns après les autres, les dispositifs FFI rompirent sous la puissance de feu allemande et le 13 août au soir Moûtiers était reprise.
Le 14 août, l’étroit du Siaix, à environ 5 km en amont de Moûtiers, restait le dernier barrage FFI encore en place. La veille Gaston Cleaz-Savoyen, FFI de 21 ans, avait été tué dans les rochers surplombant la route.
Au matin de ce même jour, la Compagnie du Lac, du 3e bataillon AS arriva à Montgirod, village dominant de 500 m le cours de l’Isère, sur sa rive droite. Sous le commandement du capitaine Jean-Marie Bulle, cette unité était venu du Beaufortain pour prêter main forte au FFI de Tarentaise. Se trouvaient avec eux les six hommes de la mission Union II, parachutés aux Saisies le 1er août. Ils constatèrent rapidement que leur renfort arrivait trop tard et dès le début de la matinée le village fut pris sous un feu d’artillerie et de mitrailleuses rendant impossible toute riposte. Des sections d’Alpenjäger progressant sur le versant de la vallée depuis le village d’Hautecour, les FFI durent entamer une retraite précipitée pour éviter l’encerclement.
Plusieurs résistants blessés et se trouvèrent dans l’impossibilité de pouvoir suivre la marche. Georges Dietrich et Gabriel Pierroz furent dissimulés sous des fourrés, à l’extérieur du village. François Chapuis et Jean Simond furent eux cachés dans l’église.
Une section allemande fit irruption dans le village lançant presque immédiatement des grenades et des pastille de phosphore sur deux maisons. Alors que les habitants essayaient d’éteindre l’incendie, des rafales d’armes automatiques blessèrent trois d’entre eux dont deux grièvement.
Puis tous les hommes furent rassemblés et gardés pendant une heure et demi adossés à un mur, menacés d’être fusillés. Pendant le pillage du village, Auguste Charrière qui s’opposait au vol de son mulet fut abattu. Peu après, vers midi les soldats allemands remirent le feu au maisons.
L’incendie détruisit la quasi-totalité du village, 341 personnes se retrouvant sans logis. Le corps d’Auguste Charrière resté sur place fut brûlé dans le brasier.
Les quatre résistants blessés furent découverts lors du ratissage du secteur. Georges Dietrich et Gabriel Pierroz furent achevés sur place
quant à Jean Simond et François Chapuis, ils furent incarcérés à Bourg Saint-Maurice et emmenés lors de la retraite allemande le 24 août, avec 26 autres prisonniers. François Chapuis, restés sans soins, incapable de marcher fut exécuté au col du Petit Saint-Bernard, le 26 ou le 27 août 1944. Jean Simond fut exécuté avec les 27 autres prisonniers à Terre Noire dans la même journée (voir notice Terre Noire).
En quittant le village les Allemands avaient emmené avec eux une vingtaine de jeunes hommes jusqu’à Bourg Saint-Maurice pour mener les mulets transportant leurs munitions et les sacs remplis du fruit de leurs rapines. Ils furent gardés quelques jours sur place puis relâchés.
Le 16 août, les six hommes de la mission Union II revenaient du secteur de Longefoy, où ils avaient tenté en vain de retrouver l’EM FFI de Tarentaise. Ils cherchaient en plein jour à rejoindre la rive droite de l’Isère pour retourner dans le Beaufortain. Une section allemande les surpris et ouvrit le feu sur eux. Marie Richel, 56 ans, habitante de Montgirod, fut mitraillée alors qu’elle gardait sa vache en terrain découvert sur les berges de l’Isère.
Enfin, le 21 août, Robert Beaulieu, Jean-Marie Caille, Henri Notta et Ugolin Zantoni, quatre jeunes FFI capturés le 19 août plus haut dans la vallée, sur la commune de Granier, furent exécutés d’une balle dans la tête dans la carrière Beratto située au dessus de l’étroit du Siaix. Leurs corps grossièrement recouverts de pierres ne furent retrouvés que le 2 septembre. Les victimes étaient attachées les unes aux autres par la main droite avec du fil de fer. On peut supposer que les Allemands choisirent ce lieu d’exécution à dessein.
Les victimes du 14 août 1944 :
Auguste Charrière
Georges Dietrich
Gabriel Pierroz
Le 16 août 1944 :
Marie Richel
Le 21 août 1944 :
Robert Beaulieu,
Jean-Marie Caille,
Henri Notta
Ugolin Zantoni
Exécutés le 26 ou 27 août 1944 :
François Chapuis au col du Petit-Saint-Bernard
Jean Simond à Terre Noire, Val d’Aoste
La Thuille, Terre-Noire (Val d’Aoste, Italie), 26-27 août 1944
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Savoie, 961 W 31. — Arch. Dép. Rhône, 3808 W 1259. — Jean d’Arbaumont, Entre Glières et Vercors : Vie et mort du capitaine Bulle (1913-1944). Annecy : Gardet, 1974. — Montgirod, une commune, trois villages, Société d’Histoire et d’Archéologie d’Aime, Bulletin n° 27, 2012.

Michel Aguettaz

Version imprimable