Né le 11 août 1903 à Dol-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine), fusillé le 31 mai à Saint-Jacques-de-la-Lande (Ille-et-Vilaine) ; meunier ; communiste membre du comité de la région du PCF des Côtes-du-Nord (Côtes-d’Armor) en 1938 ; résistant, membre du PCF clandestin.

À la Maltière en Saint-Jacques-de-la-Lande
À la Maltière en Saint-Jacques-de-la-Lande
SOURCE : Photos Husson
Jean Garnier était le fils de Jean-Marie Garnier, meunier né en 1866, et de Anne-Marie Dardennes, ménagère. Il exerçait le métier de meunier au lieu-dit Maltournée en Le Hinglé (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor). Dans cette commune vivait un véritable îlot prolétarien autour du bassin granitier. Plusieurs dizaines d’ouvriers avaient créé depuis la scission de 1921 un puissant syndicat CGTU. Ils avaient envoyé à la mairie Ernest Briand, militant SFIO qui adhéra au PCF à la Libération. Jean Garnier créa la cellule locale du PCF, forte d’une vingtaine d’adhérents. Il fut candidat aux élections cantonales de 1937 où il obtint le score remarquable de 16,4 % des suffrages exprimés au premier tour, score annonciateur de l’influence électorale à venir du PCF dans la région de Dinan. Il obtint la majorité absolue en particulier dans la commune du bassin granitier du Hinglé avec 53,9 % et plus de 20 % dans trois autres localités (Quévert, Taden et Trélivan). Le siège fut enlevé par un radical-socialiste favorable au Front populaire, Le Breton, qui l’emporta dès le premier tour. Jean Garnier siégea de 1937 à 1939 au comité régional de ce parti, que dirigeait Francis Marzin, militant de Lannion qui avait émergé au moment des luttes contre les ventes-saisies à la tête de la CGPT (Confédération générale des paysans travailleurs).
Mobilisé, Jean Garnier fut fait prisonnier au moment de la débâcle mais, parvenant à s’évader, il revint en Bretagne. Membre du PCF clandestin, surveillé de très près par les forces de l’ordre, il subit une perquisition le 21 mai 1941. Jean Garnier, proche des ouvriers carriers dont il partageait la culture revendicative et révolutionnaire de la profession, avait intégré la Résistance FTP. Il fit partie du groupe chargé de mener des opérations militaires sensibles dans la région de Dinan (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor). La libération de deux membres de la direction FTP d’Ille-et-Vilaine, Jean-Marie Guérillon et Jean Marguerite, arrêtés le 1er avril à Dinan, devint un objectif majeur. Après une première tentative infructueuse, une vingtaine de résistants puissamment armés de revolvers et de mitraillettes s’introduisirent dans la nuit du 11 au 12 avril 1944 au sein de la prison de Dinan pour les exfiltrer. Cette opération, qui resta dans la mémoire collective comme un fait d’armes relevant de l’épopée, fut menée sous la responsabilité personnelle de Louis Pétri, chef des FTP d’Ille-et-Vilaine.
Le 12 mai 1944, Jean Garnier, qui appartenait au groupe fut arrêté, sur dénonciation d’un proche, par un gendarme français au Hinglé puis livré aux Allemands qui l’incarcérèrent à la prison Jacques-Cartier de Rennes. Le 30 mai 1944, il fut jugé et condamné à la peine de mort pour « activité de franc-tireur ». Le lendemain 31 mai 1944, il a été fusillé à 6 h 35 au camp militaire de La Maltière en Saint-Jacques-de-la-Lande avec ses neuf camarades Marcel Blanchard, Jean-Baptiste Brault, René Fayon, Louis Hesry, Francis Lafranche, Henri Laplanche, Charles Maillard, Jean Perquis et Hippolyte Thomas. Jean-Baptiste Garnier avait quarante et un ans.
Il fut d’abord inhumé au cimetière de l’Est à Rennes. Exhumé le 16 septembre 1944 il fut enterré au cimetière du Hinglé. Sa sépulture au cimetière du Hinglé est commune à celle de Jean-Baptiste Brault et Marcel Blanchard. Son nom figure sur La plaque du camp de La Maltière en Saint-Jacques-de-la-Lande et sur Le monument de la Résistance et de la Déportation à Dinan (Côtes-d’Armor).
Jean Garnier avait épousé Marianne Le Quillec à Chateaulin (Finistère) le 7 mai 1929. Secrétaire de mairie au Hinglé, elle adhéra au PCF en 1938. À la Libération, Marianne Garnier milita activement au sein de la structure dinannaise de l’UFF (Union des femmes françaises), véritable laboratoire politique réunissant des militantes issues des matrices d’obédience chrétienne, socialiste et communiste. Femme de fusillé, elle côtoyait notamment Alice Pinaud, femme d’un professeur au lycée de Dinan, catholique progressiste. Elle siégea au comité de la fédération du PCF des Côtes-du-Nord de 1952 à 1954. Syndiquée au syndicat CGT des employés et ouvriers communaux, elle resta adhérente du PCF jusqu’à son décès à 93 ans en 2003.

À Saint-Jacques-de-la-Lande, le nom de Jean Garnier est inscrit sur la plaque commémorative de la Butte des fusillés de la Maltière. Sur le poteau élevé à son nom en décembre 2017, il est dit fusillé non pas le 31 mai 1944, mais le 30 juin 1944, date retenue par le jugement déclaratif de décès du tribunal civil de Rennes daté du 14 février 1945 et transcrit en mairie du Hinglé. Jean Garnier ne figure pas sur la liste des fusillés du 31 mai 1944 adressée par le tribunal de la Feldkommandantur au préfet d’Ille-et-Vilaine le 26 juin 1944.

Site des Lieux de Mémoire du Comité pour l’Étude de la Résistance Populaire dans les Côtes-du-Nord
Sources

SOURCES : Arch. Dép. Côtes-d’Armor 2W104, 2W106, 2W109, 2W129, 1043W32 (activité du PCF (1940-1944). – Bibliothèque marxiste de Paris, microfilm bobines 841 et 853, composition de la région des Côtes-du-Nord, mars 1938 et janvier 1939. – L’Aube nouvelle, no 50, 17 novembre 1945. – Ouest-Matin, Une semaine dans les Côtes-du-Nord, supplément de l’Humanité Dimanche. – « Épopées glorieuses de la Résistance dans les Côtes-du-Nord », Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 2, 1995. – Collectif, Le peuple des carrières, Éd. Apogée, 2011. – Louis Pétri, « Les hommes du Maquis », Le Patriote de l’Ouest, 1945. – Alain Prigent, Histoire des communistes des Côtes-du-Nord (1920-1945), Saint-Brieuc, 2000. – Alain Prigent, notices de Jean-Baptiste et Marianne Garnier, in Le Maitron, t. 5, nouvelle série, 2008. – Alain Prigent, Serge Tilly, « Les fusillés et les décapités dans les Côtes-du-Nord (1940-1944) », Les Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 12, 2011. – Serge Tilly, « L’occupation allemande dans les Côtes-du-Nord (1940-1944), Les lieux de mémoire », Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 10, 2004 et no 11, 2005. — " Les fusillés de la Maltière et du Colombier, recherche documentaire sur une faute historique ", blog de Kristian Hamon, 16 avril 2017. — Notes et photographies de Jean-Pierre et Jocelyne Husson. — État civil, Le Hinglé (jugement déclaratif de décès du tribunal civil de Rennes).

Alain Prigent, Serge Tilly

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