QUILLET Paul, Gustave [Pseudonymes dans la Résistance : Arnoux, Penot, Dolfi]
Né le 25 avril 1922 à Tours (Indre-et-Loire), fusillé après condamnation à mort le 24 mars 1944 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; quincaillier à Châtellerault (Vienne) ; réfractaire STO ; résistant FTPF.
Il s’engagea dans les Francs-tireurs et partisans (FTP) fin août 1943 et fut affecté aux Groupes spéciaux (GS), dont le rôle était l’exécution des actions les plus spectaculaires et les plus importantes, notamment contre les policiers les plus zélés.
Le 14 septembre 1943, en début d’après-midi, il participa à une opération à Saint-Rémy contre un inspecteur de police en compagnie de « Jarlac » et « Bruno ». Le premier tira une fois, le second à deux reprises contre l’inspecteur Paland.
Il fut dans l’équipe qui repéra l’ancien maire communiste d’Athis-Mons Marius Paquereaux qui avait rejoint le PPF de Jacques Doriot. Le 21 septembre à 20 heures 30, « Bruno » et « Jarlac » se présentèrent par erreur chez son voisin, puis allèrent à la bonne adresse. Marius Paquereaux ouvrit la porte… trois coups de feu furent tirés sur lui.
Vers le 15 octobre 1943 un nouvel objectif fut assigné, il s’agissait de mener une opération dans une annexe de la mairie de Nogent-sur-Marne. Le 23 octobre Camus « Claude » était revêtu d’une pèlerine caoutchoutée de gardien de la paix, Franz Roeckel « Rageac » avait dissimulé une mitraillette dans un sac à provision, tous les autres étaient armés de pistolets. « Claude » et Roeckel entrèrent dans la salle et crièrent « Pas un geste… le long du mur ». La vingtaine de personnes obtempéra. Un homme se précipita en direction de Roeckel, ce dernier tira et « Claude » à trois reprises… l’homme s’affaissa… Les tickets de rationnement nécessaires à la survie des clandestins furent raflés. L’équipe de FTP quitta les lieux sans difficulté.
Suite à ces actions, Paul Quillet devint responsable militaire pour la Seine-et-Oise sous le pseudonyme d’Arnoux. Il constitua rapidement trois détachements.
Il fut interpellé par des inspecteurs des Brigades spéciales le 18 novembre 1943 à 14 heures sur le pont de Sèvres alors qu’il allait rencontrer Roland Cauchy.
Fouillé, il portait sur lui un pistolet de marque Savage calibre 7,65 mm en état de fonctionnement muni de son chargeur ; un pistolet automatique marque F.F. calibre 6,35 mm avec une cartouche dans la chambre et un chargeur de cinq cartouches ; neuf cartouches 6,35 mm ; une fausse carte d’identité au nom de Paul Penot, né le 25 août 1925 à Lorient qui portait sa photographie, et le timbre humide de la mairie de Caudeval dans l’Aude ; une enveloppe qui contenait quinze mille francs ; un récépissé d’immatriculation d’une bicyclette 4 190 Y.B.7 au nom de Favre 8 rue Guyemer au Chesnay en Seine-et-Oise ; neuf feuillets sténographiés ; deux documents manuscrits ; un état d’effectifs ; une lettre signée Piot ; une enveloppe au nom de Claveau ; des papiers annotés (reçus, notes de frais et autres…) ; un faux certificat de travail au nom de Penot.
Dans sa chambre de Gentilly furent saisis une grenade à main ; une bicyclette de couleur noire, sans immatriculation ; une plaque d’immatriculation de bicyclette, n° 4190.Y.B.7. ; un document manuscrit concernant les opérations effectuées sur la Région 14 des FTP ; deux carnets annotés ; une note dactylographiée ; un lot de divers documents relatifs à l’organisation clandestine ; des bons d’achat d’articles textiles ; des tracts édités par le Parti communiste clandestin et quatre cartes d’état-major.
Paul Quillet était inconnu des différents services policiers, les armes saisies furent portées au service de l’identité judiciaire. Interrogé, il déclara que son dernier employeur avait été son père, quincailler au 10, place Dupleix à Châtelleraut dans la Vienne. Il quitta le domicile familial parce qu’il avait été désigné pour aller travailler en Allemagne. Il vint à Paris en juillet 1943, fut hébergé par des amis restaurateurs quai de la Mégisserie à Paris Ier arrondissement. Par mesure de prudence il alla habiter à Gentilly chez une cliente des restaurateurs. Celle-ci lui loua une chambre, « elle pensait que j’avais trouvé du travail chez Renault » déclara-t-il aux policiers.
Lors de son interrogatoire, il raconta avoir rencontré dans la salle d’attente d’une chirurgienne dentiste au 55 rue Pierre-Charron dans le VIIIe arrondissement, une jeune femme, il lui aurait fait des confidences sur sa situation de réfractaire. Ils sympathisèrent, se rencontrèrent à nouveau, elle lui proposa d’entrer dans le Front national de résistance. Il accepta, rencontra « Rageac » ([Franz Roeckel]), celui-ci lui déclara qu’il s’agissait de « commettre des attentats contre des membres et du matériel de l’armée d’occupation. »
Il affirma aux policiers que récemment il avait appris qu’il s’agissait d’une organisation communiste. Dès la fin août 1943, il fut appointé 2 000 francs par mois, plus des tickets d’alimentation, il savait que ces tickets avaient été volés. Il fit la connaissance d’autres membres du groupe « Bruno » et « Jarlac »(Henri Haudelaine]). Paul Quillet participa à une opération de récupération de bicyclettes dans un wagon de la SNCF à Saint-Rémy lès Chevreuse, arrondissement de Rambouillet (Seine-et-Oise, Yvelines).
Il a été chargé des liaisons, fut en contact avec « Rageac » responsable militaire de la région 89, « Roger » responsable technique, « Maurice » chef de détachement, « Bruno » chef d’équipe, et « Jarlac » (Henri Haudelaine) et « Jo ». Il rencontra Jean Camus dit Bertrand chez Madame Nicolas qui vivait à Antony (Seine, Hauts-de-Seine).
Après la chute de plusieurs FTP à Roissy-en-France au début octobre 1943, Paul Quillet « Bruno » et « Jarlac » furent mutés dans les Groupes spéciaux. « Lagarde » ex. « Béret » devint chef de groupe, il avait sous sa responsabilité « Francis », Camus dit « Bertrand », « René » et « Petit ».
Livré aux Allemands, Paul Quillet fut condamné à mort par un tribunal de guerre de la Wehrmacht pour "Activités de franc-tireur" et fusillé au Mont-Valérien le 24 mars 1944.
L’inspecteur B. était l’un des inspecteurs qui interrogea Paul Quillet, il exerça de nombreux et graves sévices sur les résistants détenus. Le 17 août 1944 il prenait la fuite pour l’Allemagne dans un convoi de membres du Parti populaire français (PPF) de Jacques Doriot. Il aurait dispensé des cours de culture physique à des élèves d’une école de renseignements qui devaient exécuter en France des missions de sabotage. Il aurait exercé également les fonctions de Chef de la police à l’Ile Mainau sur les bords du lac de Constance où s’était retiré le comité directeur du PPF.
Le 29 janvier 1947, il comparut devant la 12ème sous-section de la Cour de Justice de la Seine. Il participa à l’arrestation de quatre-vingt-seize résistants. Quatre-vingt-un d’entre eux étaient cités par l’accusation, parmi eux six inspecteurs des Brigades spéciales, un brigadier et trois gardiens de la paix, pour sa défense, un commissaire, un officier de police et dix inspecteurs.
L’inspecteur B. prétendit avoir exécuté les ordres sans jamais faire preuve d’initiative. Il nia avoir exercé des sévices dans le but d’obtenir des aveux, mais reconnaissait avoir donné quelques coups de poings et quelques gifles dans des moments d’énervements. Il nia avoir été membre du PPF et avoir donné des cours à des membres du PPF, et établi de fausses cartes d’identités.
Un inspecteur de la Police Judiciaire M. affirma avoir été arrêté le 14 février 1944 et avoir été frappé par B., celui-ci nia. Un brigadier des gardiens de la paix déclara avoir assisté au matraquage de Pierre Georges (Fabien). B. rétorqua « Je ne me suis pas occupé de Pierre Georges », et ajouta « Ce que je sais, c’est que Pierre Georges était dans un drôle d’état à son arrivée dans nos services. Il avait été frappé par les gardiens de la paix lors de son arrestation. » L’inspecteur B. réfuta les actes de violences dont il était accusé, tout au plus avait-il donné quelques gifles.
Paul Quillet obtint la mention mort pour la France attribuée par le Secrétaire général aux Anciens Combattants en date du 18 septembre 1945. Il a été homologué à titre posthume combattant des Forces françaises de l’intérieur au grade de lieutenant et reçut la Médaille de la Résistance toujours à titre posthume par décret du 15 juin 1946.
Le nom de Paul Quillet a été gravé sur le Monument commémoratif quai des Martyrs de la Résistance avec cette épitaphe en hommage aux 52 fusillés et déportés de Châtellerault : « Unis par la même volonté de résistance. Ils sont morts en martyrs pour briser les chaînes de l’esclavage ennemi. » Sur la plaque en hommage aux victimes de la guerre en mairie de Châtellerault, sur la plaque commémorative du collège René Descartes dans la même ville où il a été élève. Ainsi que sur la Cloche au Mont-Valérien dédiée « Aux résistants et aux otages fusillés au Mont-Valérien par les troupes nazies 1941-1944, et à tous ceux qui n’ont pas été identifiés » œuvre de l’artiste plasticien Pascal Convert.
SOURCES : Arch. PPo. BA 2117, BA 2309, GB 133, GB 137, KB 15, 77 W 3114-294412, 77 W 5348-291297. — SHD Vincennes GR 16 P 495739 (nc) — Arch. Dép. Indre-et-Loire et Vienne, (état civil, registre matricule, recensements) — Archives de la CCCP (Notes Jean-Pierre Ravery). — Mémoire des Hommes — Mémorial genweb. — État civil.
Daniel Grason, Michel Thébault